Les centres de données du géant de la recherche sur Internet ont besoin de milliards de litres d’eau par jour pour être refroidis
Selon le rapport de Bloomberg, Google d'Alphabet Inc. est en train de construire de nouveaux centres de données à travers les États-Unis afin d’alimenter la recherche en ligne, les services du cloud et la publicité sur le Web. L'entreprise se vante depuis des années que ces énormes entrepôts remplis d'ordinateurs sont économes en énergie et respectueux de l'environnement. Mais il y a un coût que l'entreprise essaie de garder secret. Ses milliers de centres de données utilisent des milliards de litres d'eau, et ce parfois dans des zones sèches qui luttent pour conserver cette ressource publique limitée.
En l’Arizona, et plus précisément dans la ville de Mesa par exemple, Google utilise un million de gallons (1 gallon américain = 3,78541 litres) par jour pour refroidir son centre de données, et aura le droit d’utiliser jusqu’à 4 millions de gallons par jour si son projet d'expansion du centre aboutit. Mais cela risque de priver de plus en plus de foyers d’eau ou encore de faire monter les factures d’eau dans la région. Plusieurs organisations ont dénoncé cela, mais les autorités semblent ne rien entendre.
« Les centres de données se développent et sont un peu partout. Ils doivent être construits d’une manière garantissant qu'ils ne retirent pas des ressources essentielles aux communautés qui manquent d’eau », a déclaré Gary Cook, directeur des campagnes climatiques mondiales chez le groupe de défense de l'environnement Stand.earth. Par ailleurs, selon le rapport, le géant de la recherche considère que son utilisation de l'eau est un secret commercial et interdit même aux fonctionnaires de divulguer la consommation de l'entreprise.
Mais des informations ont été divulguées, parfois dans le cadre de batailles juridiques avec les services publics locaux et les groupes de protection de l'environnement. Rien qu'en 2019, Google a demandé, ou obtenu, plus de 2,3 milliards de gallons d'eau pour des centres de données dans trois États différents, selon les dossiers publics mis en ligne et les dépôts légaux. D’après certains analystes, Google n’est pas le seul à user des ressources publiques pour faire face à cette grande demande en eau de leurs diverses installations.
La montée du cloud et la course sans cesse aux centres de données en sont les plus grandes causes. « La course aux centres de données pour suivre le rythme est assez frénétique », a déclaré Kevin Kent, directeur général de la société de conseil Critical Facilities Efficiency Solutions. « Ils ne peuvent pas toujours faire les meilleurs choix environnementaux ». De même, Google a l’habitude de placer ses centres de données à proximité des grandes agglomérations de population pour aider ses services Web à réagir rapidement.
Parfois, cela signifie qu'il faut construire dans des régions chaudes et sèches. Les unités de traitement à l'intérieur se réchauffent facilement et il faut de l'eau pour les refroidir. Selon un dépôt légal, à Red Oak, au Texas, Google veut jusqu'à 1,46 milliard de gallons d'eau par an pour un nouveau centre de données d'ici 2021. Dans le même temps, selon les données du Texas Water Development Board, le comté d'Ellis, qui comprend Red Oak et environ 20 autres villes, aura besoin de près de 15 milliards de gallons cette année pour tout, de l'irrigation à l'usage résidentiel.
Bientôt une pénurie d'eau dans les villes où se situent les centres de données ?
Cependant, il subsiste un problème. Le rapport estime que la ville de Red Oak n'est pas aussi décontractée en ce qui concerne l'utilisation de l'eau. Sur une page consacrée à la conservation de l'eau, la ville affirme qu'elle s'approvisionne à moitié à Dallas et encourage les habitants à réduire leur consommation d'eau, car les six réservoirs de Dallas sont épuisés à 18 %. Des restrictions obligatoires sur l'eau entreront en vigueur si ces sources sont épuisées à 35 %. De son côté, Google a déclaré qu’il n’utilise pas toute l'eau qu'il demande.
L’entreprise estime qu’elle doit s'assurer qu'il y en a suffisamment pour les périodes de forte demande ou en temps de chaleur, ajoutant que cela est nécessaire pour que les services Internet restent fiables. Dans la région de Californie, l’utilisation de l’eau par Google est devenue un sujet de controverse. Dans le comté de Berkeley, en Caroline du Sud, un groupe environnemental s'est opposé à la demande de l'entreprise d'utiliser 1,5 million de gallons d'eau souterraine par jour. Selon le groupe, la demande concerne une source d’eau jugée “historiquement menacée”.
Les groupes de défense sont sur le pied de guerre avec l’entreprise
Toujours en Californie, plusieurs groupes de défense sont sur le pied de guerre avec l’entreprise, car le ministère de la Santé aurait accordé des privilèges à Google pour continuer à puiser l’eau dans la nappe phréatique alors qu’il demande à d’autres entreprises de réduire leurs prélèvements. « Il est injuste que l’État nous demande de réduire notre prélèvement d'eau alors qu’un autre comme Google peut venir demander trois fois plus que son permis initial et l'obtenir », a déclaré Clay Duffie, directeur général de Mount Pleasant Waterworks.
Selon les experts en centres de données, il y a généralement un compromis entre l'utilisation de l'eau et de l'énergie. « Si la consommation d'eau diminue, la consommation d'énergie augmente et vice versa », a déclaré Otto Van Geet, ingénieur principal au Laboratoire national des énergies renouvelables. En effet, dans son rapport sur l’environnement, Google a expliqué qu’il s'appuie sur le “refroidissement par évaporation”, qui consiste à faire évaporer de l'eau pour refroidir l'air autour des unités de traitement empilées dans les centres de données.
Les systèmes les plus courants, connus sous le nom de climatiseurs de salles informatiques, sont gourmands en énergie. Le refroidissement par évaporation consomme moins d'énergie, mais le processus nécessite plus d'eau. D’après Cook de Stand.earth, les opérateurs adoptent souvent l'approche de l’eau parce qu'elle est moins coûteuse. Enfin, selon le rapport, Google a accordé plus d'attention à l'utilisation de l'eau ces dernières années. Elle s'appuie désormais sur de l'eau recyclée ou de l'eau de mer lorsqu'elle le peut pour éviter d'utiliser de l'eau potable ou de vider les réserves locales.
Source : Bloomberg
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