Chez Amazon Inc., les actionnaires semblent être divisés sur la question de la vente de la technologie de reconnaissance faciale aux agences gouvernementales. Reuters a rapporté ce vendredi que la pétition lancée pour recueillir le soutien des actionnaires d’Amazon en vue d’interdire la vente de la reconnaissance faciale aux gouvernements n’a pas atteint le suffrage voulu. L’interdiction n’a recueilli que 2 % des suffrages des actionnaires. À noter que les actionnaires ont également rejeté la demande des employés d’abandonner les combustibles fossiles et d’adopter les sources d’énergies renouvelables pour limiter les impacts négatifs du réchauffement climatique.
Lors de la réunion des actionnaires chez Amazon Inc. ce mercredi, les actionnaires ont décliné la pétition de quelques milliers d’employés (un peu plus de 7000) soutenus par quelques actionnaires de la société qui demandent au géant du Web de revoir son attachement aux sources d’énergie fossile. Les employés de la société déplorent le fait que la société, en tant qu’un des plus grands émetteurs de gaz à effet de serre dans le monde, n’entreprend aucune action de grande envergure pour participer à la lutte contre le réchauffement climatique.
« Il est inacceptable que l'une des sociétés les plus riches du monde continue à prendre des demi-mesures, car les conséquences de ses émissions de gaz à effet de serre mettent en péril tant de vies de pauvres dans le monde », a déclaré Rajit Ifthikar, un employé de la société qui a milité pour l'initiative sur le changement climatique, aux journalistes après la réunion. Au cours de la même réunion, a rapporté Reuters hier, les actionnaires d’Amazon Inc. ont massivement rejeté la proposition selon laquelle la société cesserait de vendre la technologie de reconnaissance faciale aux agences gouvernementales.
Seulement quelque 2,4 % des voix étaient en faveur de l'interdiction. Une deuxième proposition qui appelait à une étude sur la mesure dans laquelle le service de reconnaissance faciale d'Amazon nuisait aux droits civils et à la vie privée avait recueilli un soutien de 27,5 %, a expliqué l’agence de presse Reuters. De son côté, Amazon a défendu sa technologie et a déclaré que tous les utilisateurs devaient respecter la loi. Néanmoins, le débat s’accentue autour de la vente de cette technologie. Les actionnaires de la société ne partagent pas le même avis sur le sujet, car la minorité en défaveur de la vente de la reconnaissance faciale aux forces de l’ordre estime que la technologie ne respecte pas la vie privée des personnes.
Ces derniers mettent également en garde contre les faux positifs (fausses correspondances) de la reconnaissance faciale. À ce propos, rappelons que cette technologie de reconnaissance faciale d'Amazon avait identifié à tort 28 membres du Congrès US comme des criminels en juillet de l'année dernière. En effet, l'ACLU, une association à but non lucratif de défense des droits numériques, avait conduit des tests sur le système de reconnaissance faciale d'Amazon et il s’est avéré que Rekognition a identifié 28 membres du Congrès américain comme étant des criminels. Au nombre de ces 28 congressistes identifiés à tort comme des criminels, il y avait des hommes, des femmes, des Républicains, des Démocrates de différents âges.
L’association avait, pour son test, construit une base de données de 25 000 photos de personnes arrêtées. Elle avait ensuite lancé une recherche de correspondance entre cette base de données et l’ensemble des membres en exercice du Congrès. Et elle précise que toute la procédure a été exécutée avec les réglages de correspondance qu’Amazon définit par défaut pour Rekognition. A partir du moment où l’identification peut être biaisée, il est aisé d’anticiper les effets de ces éventuelles fausses identifications. Un policier pourrait, sur la base d’une identification erronée, catégoriser un individu comme armé et dangereux avant même de l’interpeller. Une identification, précise ou non, peut coûter a une personne sa liberté, et même sa vie.
De l’autre côté, les actionnaires d'Amazon qui sont en faveur de la vente de la technologie estiment que cela protège le public. D’après Reuters, beaucoup de résolutions d’Amazon émanant d’actionnaires et d’employés se heurtent à une bataille ardue pour obtenir l’appui de la majorité des voix. De plus, le fondateur et directeur général Jeff Bezos contrôle à lui tout seul, 16 % des actions et des droits de vote. Dans une lettre à Jeff Bezos, Black Caucus du Congrès avait lui-même exprimé son inquiétude à propos des « graves conséquences néfastes inattendues » que Rekognition pourrait avoir pour les Noirs, les immigrants sans papiers et les manifestants. Cette inquiétude se justifie par le fait que 40 % des correspondances erronées lors du test de l’ACLU étaient des personnes de couleur, alors que les personnes de couleur ne représentent que 20 % du Congrès.
Cela dit, les craintes ne viennent pas seulement du rang des 2 % des actionnaires et employés contre la reconnaissance faciale, mais aussi du Congrès américain. L’American Civil Liberties Union, et une kyrielle d’autres organisations du même type avaient expressément demandé à Amazon d’arrêter de vendre sa technologie aux forces de l’ordre. Ces associations craignaient que Rekognition, entre les mains du pouvoir en place, ne soit utilisée à des desseins autres que l’identification de vrais criminels.
Le Congrès s’inquiète de l’impact de la technologie sur les droits civils et une étude a été ouverte sur la question. Une réunion d’un important comité du Congrès a eu lieu en même temps que l’assemblée annuelle à Washington D.C. pour discuter de l'impact sur les droits civils des technologies de reconnaissance faciale, en général.
Un représentant démocrate Jimmy Gomez, qui a participé à la réunion, a réagi aux résultats du vote annoncés par Amazon en déclarant : « Cela signifie simplement qu'il est plus important que le Congrès agisse ». Les représentants républicains ont aussi déclaré être préoccupés par le fait que des citoyens américains voient leurs droits violés et que leurs informations soient partagées avec des personnes comme le FBI sans la supervision des représentants élus. Mais le danger ne vient pas seulement d’Amazon Inc.
Selon Reuters, aux États-Unis, l'application de la loi utilise la reconnaissance faciale depuis des années, et les fournisseurs de cette technologie ont abondé, notamment la société française Idemia et la société japonaise NEC Corp. Cependant, de nouveaux entrants comme AnyVision et Microsoft Corp. ont appelé à une réglementation ces derniers mois. La commercialisation de la reconnaissance faciale d’Amazon a donné lieu à un examen minutieux, et des chercheurs ont déclaré que sa technologie peinait à identifier le sexe des individus à la peau plus sombre, faisant craindre des arrestations injustes.
Source : Reuters
Et vous ?
Quel est votre avis sur le sujet ?
Voir aussi
Les actionnaires et des milliers d'employés d'Amazon tentent de convaincre la société d'abandonner les combustibles fossiles, mais en vain
Les actionnaires d'Amazon rejettent l'interdiction de la reconnaissance faciale, alors que le Congrès s'inquiète de son impact sur les droits civils
La technologie de reconnaissance faciale d'Amazon identifie à tort 28 membres du Congrès US comme des criminels. Quels dangers pour les Américains ?
USA : des associations s'érigent contre la technologie de reconnaissance faciale d'Amazon craignant une surveillance de masse par la police
L'interdiction de la vente de la technologie de reconnaissance faciale d'Amazon n'a recueilli que 2 % des suffrages des actionnaires
L'interdiction de la vente de la technologie de reconnaissance faciale d'Amazon n'a recueilli que 2 % des suffrages des actionnaires
Le , par Bill Fassinou
Une erreur dans cette actualité ? Signalez-nous-la !