L’idée selon laquelle la suppression des limites spatiales entre collègues de travail donnerait lieu à une collaboration et une efficacité collective accrues a conduit bon nombre d’entreprises à réaménager leurs locaux de manière à n’avoir que des bureaux open spaces. Dans une étude qu’ils viennent de mener sur le sujet, Ethan Bernstein et Stephen Turban, deux chercheurs de l’université Havard, reconnaissent que cette théorie pourrait sembler vraie à plus d’un titre. Dans ce sens, ils nous apprennent que « l’idée selon laquelle la proximité précéderait l’interaction sociale est l’une des plus importantes découvertes en sociologie ».
Mais, en dépit de cette théorie, les résultats obtenus par les deux chercheurs lors de l’analyse des conséquences des bureaux open spaces sur l’interaction furent très mitigés. Ils ont donc décidé d’affiner leurs recherches. Ils ont convaincu les 52 employés d’une entreprise de porter autour de leur cou un dispositif mesurant directement chaque rencontre face à face. Ils ont aussi utilisé les journaux de serveurs de messagerie électronique et de messagerie instantanée pour déterminer si et à quel point le niveau d’interactions électroniques allait changer. Sur une durée de 15 jours, les chercheurs ont pu remarquer un changement significatif sur le volume d’interaction, d’une part, et sur les performances des sujets, d’autre part.
L’étude a montré que les interactions face-à-face entre les sujets avaient chuté de 72 %, passant des 5,8 heures par personne observées sur chacun des 15 derniers jours avant le réaménagement en bureaux open spaces à 1,7 heure par personne par jour. Paradoxalement, avec la suppression des limites spatiales, le nombre de messages et de mails envoyés a explosé, augmentant respectivement de 67 % et de 56 %. On a donc assisté à un passage des interactions face à face aux interactions électroniques qui inexorablement a conduit à une chute non négligeable de la productivité.
Sur la base de ces résultats, les chercheurs ont donc décidé de procéder à une deuxième étude dans une autre entreprise. Ils ont collecté des données à propos d’une centaine d’employés travaillant au même étage, ce qui équivalait à environ 45 % du nombre total d’employés de cet étage. La collecte s’est faite en deux phases : la première, pendant huit semaines sur les trois derniers mois avant le réaménagement en bureaux open spaces et la seconde, pendant les huit semaines suivant les deux premiers mois après le réaménagement. La collecte a aussi inclus des données spécifiques telles que le sexe, l’équipe, le rôle et la position du bureau.
« Dans la première phase, les pupitres se trouvaient dans des cabines, de sorte que les sièges étaient à environ 2 mètres l'un de l'autre et directement adjacents l'un à l'autre. Au cours de la deuxième phase, les sièges se trouvaient encore à environ 2 mètres l'un de l'autre et directement adjacents l'un à l'autre, mais ils étaient regroupés à des tables non divisées et non cloisonnées de six à huit places. L'emplacement du siège nous a permis de calculer la distance physique entre les dyades des postes de travail des employés avant et après la refonte, de sorte que nous puissions inclure la distance physique, ainsi que les autres attributs des employés, comme variables de contrôle », ont déclaré les deux chercheurs.
Ils nous apprennent que l’ensemble de données recueillies pour la deuxième étude « comprenait 63 363 minutes d'interaction face-à-face et 25 553 mails, tous générés par 1 830 dyades des 100 employés concernés » et que « l'étude 2 a seulement collecté des données de courrier électronique pour mesurer l'interaction électronique ». Les résultats de cette seconde étude montrent une baisse entre 67 % et 71 % du temps passé par les employés à interagir face à face et une augmentation entre 22 % et 50 % du nombre de mails envoyés.
Bien évidemment, que ce soit face à face ou par mail, les dyades de la même équipe ou avec le même rôle ont beaucoup plus communiqué. Le sexe n’a eu absolument aucun effet notable sur le volume des interactions. La position du bureau, par contre, a eu son petit effet. Les chercheurs ont remarqué que plus les bureaux étaient proches, plus le volume d’interactions face à face était important.
Il est surprenant de remarquer à quelle vitesse le volume d’interactions face à face chute lorsque les cloisonnements entre collègues sont supprimés. C’est carrément paradoxal. La raison avancée par les deux chercheurs pour justifier cet état de choses est que les hommes ont, eux aussi, besoin de limites pour restreindre leurs interactions, réduisant ainsi les risques de distraction, de surcharge, de myopie et d’autres symptômes de rationalité limitée.
Source : Rapport de l'étude
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Le , par Bill Fassinou
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