Le bras de fer entre les responsables de l’application de messagerie chiffrée Telegram et l’organe de régulation des télécommunications russe – Roskomnadzor – a des répercussions à l’échelle mondiale. Les utilisateurs de la version iOS de l’application sont privés de mises à jour. Pavel Durov – CEO de Telegram – a fait des apparitions sur Twitter et Telegram pour faire le point sur la situation.
« Malheureusement, certaines fonctionnalités comme les stickers ne tournent pas sous iOS 11.4 même si nous avons résolu ce problème il y a quelques semaines. Le fait est qu’Apple empêche globalement Telegram de mettre ses applications iOS à jour depuis que la Russie a ordonné le retrait de l’application de l’App Store », a-t-il écrit.
Le Kremlin dénonce l'utilisation de la messagerie par les mouvements djihadistes, notamment, par les auteurs des attentats de Saint-Pétersbourg le 3 avril 2017. Il y a deux mois, Roskomnadzor a obtenu d’un tribunal de Moscou que le blocage de l’application de messagerie s’effectue. Le régulateur a enchaîné mi-avril avec le blocage de plus de 15 millions d’adresses IP qui n’a impacté que sur 15 à 30 % des utilisateurs dans le pays. Dans l’incapacité d’opérer un blocage total du service de messagerie, Roskomnadzor a, pour la première fois en avril, joué la carte Apple en demandant à l’entreprise de supprimer l’application de l’App Store. Le régulateur a renouvelé sa demande auprès du géant de la marque à la pomme à la fin du mois de mai.
Le contrôle d’Apple sur les applications publiées sur sa boutique en ligne lui permet d’inspecter, d’approuver ou désapprouver les nouvelles versions, y compris les mises à jour destinées à apporter réponse à de petits soucis d’ordre technique. Dans le cas où il n’y a pas approbation d’une version d’application mise à jour par l’éditeur, elle ne peut être distribuée au travers de l’App Store. D’un point de vue technique, la décision d’Apple permet donc de coller à la requête de Moscou …
… Et donc, d’être contre Telegram
« Malheureusement, Apple ne s’est pas rangé de notre côté. Bien que la Russie ne compte que pour 7 % des utilisateurs de Telegram, Apple empêche que les utilisateurs de par le monde reçoivent les mises à jour. Résultat des courses, nous avons été incapables de nous conformer au règlement général sur la protection des données dans les temps », a ajouté Pavel Durov.
Curieux comme positionnement pour une entreprise devenue célèbre pour son bras de fer avec le FBI dans le cadre de l’affaire San Bernardino. Apple déposé une requête pour faire annuler une injonction qui lui intimait l'ordre de collaborer avec le FBI en implémentant le logiciel de déverrouillage de l'iPhone d'un terroriste. En des termes techniques, l’entreprise avait fait valoir ce que cela lui coûterait de se soumettre à cet ordre :
« Le système d'exploitation modifié que le gouvernement demande va réquisitionner d'importants efforts et ressources pour être mis sur pied. Bien qu'il soit difficile d'en faire une estimation parce que cela n'a jamais été réalisé auparavant, la conception, la création, la validation et le déploiement du logiciel pourraient probablement nécessiter entre six et dix ingénieurs et employés Apple qui dédieront une part substantielle de leur temps pour un minimum de deux semaines, qui pourrait sans doute s'étendre sur une période de quatre semaines. Parmi les membres de cette équipe vont figurer des ingénieurs Apple du groupe dédié au core operating system, un ingénieur assurance qualité, un gestionnaire projet et un rédacteur documentaliste ou un rédacteur outils ».
« Aucun système d'exploitation qui permet de faire ce que le gouvernement exige n'existe à ce jour, et, tout effort dans l'optique d'en créer un, demandera qu'Apple écrive un nouveau code, il ne s'agira pas juste de désactiver les fonctionnalités existantes dans le code. Apple devra plutôt concevoir et implémenter des fonctionnalités non testées dans l'optique de permettre d'entrer le mot de passe sur le dispositif de la manière décrite par le gouvernement. [...] ».
Grosse défense (abrégée) de la part du géant de la marque à la pomme dont on sait qu’elle a finalement obligé les autorités fédérales à se tourner vers des hackers indépendants. En 2008, Apple avait martelé son refus de franchir la limite de la vie privée des utilisateurs. C’est exactement ce que rappelle Pavel Durov dans son dernier propos. Il y a seulement qu’Apple semble contribuer à plomber un idéal que l’entreprise elle-même défend.
Source : Telegram
Et vous ?
Que pensez-vous du positionnement d’Apple dans la gestion de la requête du Kremlin ? L’entreprise avait-elle le choix ?
Voir aussi :
Iran : l'accès aux réseaux sociaux Telegram et Instagram a été limité sur le territoire après des manifestations contre le gouvernement
L'Iran interdit à son tour l'usage de l'application Telegram peu de temps après l'adoption d'une mesure similaire par la Russie
Telegram : Apple prive les utilisateurs mondiaux de l'application de messagerie chiffrée de mises à jour sur iOS
Après le bannissement par la Russie
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Le , par Patrick Ruiz
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