Fin aout, Emmanuel Macron a confirmé que l’IA est une priorité pour la France et exprimé son ambition de devenir leader mondial. Suite à cela, en septembre dernier, le Premier ministre a chargé le député et mathématicien Cédric Villani d’une mission importante sur l’IA : proposer une stratégie visant à repositionner la France et l’Europe au premier plan de ces transformations et en saisir les opportunités. Début décembre, Cédric Villani a donc lancé une consultation publique sur l'intelligence artificielle pour permettre à tout le monde (ensemble des acteurs et des citoyens) de contribuer à l’élaboration de cette stratégie. Le résultat est un rapport de 235 pages qui vient d'être publié. Nous n’allons pas entrer dans les détails du rapport, mais il y a certains points qui méritent une attention particulière et que nous allons présenter ici.
Cédric Villani, député LREM et mathématicien
Inciter les acteurs économiques au partage et à la mutualisation de leurs données
Les données sont généralement le point de départ de toute stratégie en IA, car de leur disponibilité dépendent de nombreux usages et applications. « Or les données bénéficient aujourd’hui majoritairement à une poignée de très grands acteurs », peut-on lire dans le rapport. D'après Cédric Villani, il est nécessaire que les pouvoirs publics, mais aussi les acteurs économiques plus petits et la recherche publique, puissent bénéficier de ces données. Et « cela devra passer par une incitation des acteurs économiques au partage et à la mutualisation de leurs données, l’État pouvant ici jouer un rôle de tiers de confiance. » Dans certains cas, dit-il, « la puissance publique pourrait imposer l’ouverture s’agissant de certaines données d’intérêt général. » Le député LREM compte aussi sur plusieurs réformes en cours au niveau européen qui doivent permettre un meilleur accès et une plus grande circulation des données.
Anticiper et maîtriser les impacts de l’IA sur le travail et l’emploi
Le rapport appelle à anticiper les impacts sur l’emploi via la création d’un « laboratoire public de la transformation du travail ». Il sera la « tête chercheuse » à l’intérieur des politiques publiques de l’emploi et de la formation professionnelle. Il recommande aussi de lancer un chantier législatif relatif aux conditions de travail à l’heure de l’automatisation afin de prendre en compte les nouveaux risques.
Le député LREM pense aussi qu'il faut former des talents en IA, à tous les niveaux (bac+2, bac+3, master, doctorat), en se fixant un objectif clair : à un horizon de trois ans, multiplier par trois le nombre de personnes formées en intelligence artificielle en France, à la fois en faisant en sorte que l’offre de formation existante s’oriente vers l’IA, mais également en créant de nouveaux cursus et de nouvelles formations à l’IA (doubles cursus droit-IA par exemple, modules généraux…).
Endiguer la fuite des cerveaux
L'un des objectifs de la mission était de proposer des solutions pour mettre fin à la fuite de cerveaux (vers l'étranger ou vers des acteurs privés dont les activités sont d’un intérêt social réduit) et attirer les chercheurs étrangers. Pour cela, Cédric Villani propose de créer des Instituts Interdisciplinaires d’Intelligence Artificielle (3IA) qui vont rassembler les chercheurs, ingénieurs et étudiants en IA. « Ces instituts devront procurer un environnement de travail suffisamment attractif pour résister à la pression compétitive des géants du numérique ». En parlant d'attractivité, il fait référence à « un allègement drastique des formalités administratives du quotidien, [des] compléments de salaire conséquents, [et des] aides pour l’amélioration de la qualité de vie ».
Le mathématicien et député LREM reconnait qu' « il est illusoire de penser rivaliser financièrement avec les offres des GAFAM », mais pense qu'un « doublement des salaires en début de carrière est un point de départ minimal indispensable » pour éviter de « voir se tarir définitivement le flux de jeunes prêts à s’investir dans l’enseignement supérieur et la recherche académique. » Il est par ailleurs nécessaire, selon lui, de renforcer l’attractivité de la France pour les talents expatriés ou étrangers, notamment avec des incitations financières. Il ne manque pas non plus d'insister sur le fait que les instituts de recherche en IA doivent pouvoir disposer d’outils de calcul qui leur permettent de rivaliser avec les moyens quasi illimités des grands acteurs privés.
Se concentrer dans un premier temps sur quatre secteurs clés
La mission a choisi de se concentrer sur quelques secteurs clés qui constituent des niches économiques d’excellence et qui permettent de répondre à de grands défis collectifs. Il s'agit notamment de la santé, l’écologie, les transports-mobilités et la défense-sécurité. Les auteurs du rapport justifient le choix de ces secteurs par le fait que « tous représentent un défi majeur du point de vue de l’intérêt général, tous requièrent une impulsion importante de l’État et tous sont susceptibles de cristalliser l’intérêt et l’implication continue des acteurs publics et privés ».
Et bien d'autres propositions...
Dans les grandes lignes, le rapport sur l'IA suggère, entre autres, d'établir un cadre éthique et de confiance pour le développement de l’IA. Cédric Villani insiste également sur le fait que l'IA doit être au service d’une économie soutenable et écologique.
Pour le moment, ce ne sont que des propositions que l’exécutif français va étudier en vue de retenir ce qui lui semble pertinent. Toutes ces idées sonnent peut-être bien, mais dans quelle mesure peuvent-elles devenir une réalité et propulser la France au premier plan au niveau mondial dans le domaine de l’IA ?
Sources : Reuters, Rapport de Cédric Villani sur l’IA
Et vous ?
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Que suggérez-vous pour que la France soit attractive pour les talents et chercheurs en IA ?