L'administration Obama a été scandalisée en 2016 lorsque les autorités européennes ont sommé Apple de rembourser une somme de 13 milliards d'euros d'impôts pour des accords fiscaux très favorables négociés avec le gouvernement irlandais. Cette position américaine a été conservée par l'administration qui d'après un rapport de Reuters en juillet dernier envisageait de défendre Apple devant le Tribunal général de l'Union européenne.
Dans un communiqué publié plus tôt ce mois-ci, le département du Trésor américain a également réitéré sa position de longue date s'opposant aux « évaluations fiscales rétroactives » de la Commission européenne. Comme l'a déclaré le Trésor dans un livre blanc d'août 2016, « l'approche de la Commission dans les affaires d'aide d'État est injuste, contraire aux principes juridiques bien établis, et remet en cause les règles fiscales des États membres de l'UE. »
Mais ces derniers jours ont montré un changement radical de position des responsables américains face aux efforts précédents des autorités européennes pour collecter des impôts auprès des entreprises de la Silicon Valley. Washington a en effet assoupli sa position d'après des responsables européens et américains. « Les États-Unis sont disposés à reconsidérer le problème et ils comprennent très bien la nécessité d'une taxation équitable des géants du numérique », a déclaré vendredi le ministre français des Finances, Bruno Le Maire. Il s’exprimait après avoir rencontré le secrétaire du Trésor américain Steven Mnuchin en marge des réunions annuelles de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international. Washington a également accepté la création d'un groupe de travail avec la France, selon Le Maire. « Cela nous permettra un examen bilatéral de quelques propositions faites aujourd'hui par la commission », a-t-il dit.
Pascal Saint-Amans, directeur du centre de la politique et de l'administration fiscale de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), confirme également que l'attitude de Washington a changé ces derniers jours. « Les nouvelles sont que les États-Unis s'assiéront à notre table pour ne pas bloquer la discussion, mais au contraire, la conduire et essayer de limiter les dommages que ces taxes pourraient causer », a-t-il dit. La Commission européenne devrait présenter l'année prochaine des propositions pour taxer les géants de la technologie, et la France menace également d'imposer des taxes bien plus lourdes – non sur les bénéfices, mais sur les revenus des entreprises, rappelle Saint-Amans. Washington sait donc que « les pays agiront unilatéralement et préfèrent donc s'impliquer lui-même », a-t-il dit.
L'OCDE travaille depuis plusieurs années sur ce sujet, mais a jusqu'à présent fait face au refus ferme des autorités américaines d'en discuter. L'organisation va présenter aux ministres des Finances du G20 un rapport sur le sujet en avril, dans le but de proposer une solution de long terme. Parce que cela peut prendre du temps, Saint-Amans explique que l'OCDE cherche également à harmoniser les propositions fiscales des différents gouvernements afin de réduire le préjudice qu'elles pourraient causer à la situation financière des entreprises. Selon Saint-Amans, l'OCDE offrira aux pays membres des moyens raisonnables de perception des recettes « tout en satisfaisant la nécessité d'empêcher ces sociétés d'avoir une charge fiscale proche de zéro. »
Le commissaire européen chargé des affaires économiques et financières, Pierre Moscovici, s'est adressé vendredi au G20 pour discuter de l'attitude de Bruxelles vis-à-vis des GAFA. S'adressant à l'AFP en marge des réunions de la Banque mondiale et du FMI, Moscovici a salué le « pragmatisme » américain sur la question fiscale. « Pour un problème international, vous avez besoin d'une solution internationale », a-t-il dit. « Les Américains sont dans la même situation que nous : leur propre système fiscal n'est pas adapté à cette économie et ils perdent également des revenus très importants qui doivent être compensés », a déclaré M. Moscovici. « Le problème de l'imposition des sociétés GAFA est global et la meilleure réponse devra l'être aussi », a-t-il dit.
« Nous attendrons que le G20 tire ses propres conclusions » à partir d'une étude de l'OCDE, explique M. Moscovici, qui a également averti que si une solution globale ne venait pas, la Commission européenne proposerait ses propres mesures fiscales.
Source : Daily Mail
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