
« J'ai été licencié par Google le lundi dernier pour un document que j'ai écrit et diffusé en interne ; lequel document a suscité des questions sur des sujets tabous [de la culture de Google] et la manière dont ils nuisent à notre réflexion sur la diversité des genres dans l'entreprise et dans le secteur technologique en général », dit-il. « J'ai affirmé qu'au moins certaines des disparités homme-femme dans la technologie peuvent être attribuées à des différences biologiques (et, oui, j'ai dit que le biais contre les femmes était aussi un facteur). » James Damore explique ensuite avec plus de détails les raisons de son licenciement et les circonstances dans lesquelles cela s’est produit.
Diversité des genres : un sujet tabou au sein de Google, la dictature de la pensée unique ?
« Nous avons tous des préférences et croyances morales sur la façon dont le monde est et doit être. Avoir ses points de vue contestés peut être douloureux, nous avons donc tendance à éviter les personnes ayant des valeurs différentes et à nous associer à celles qui partagent nos valeurs », explique James Damore. Toutefois chez Google, dit-il, « cette autoségrégation est devenue beaucoup plus puissante au cours des dernières décennies », a-t-il expliqué en faisant référence à l'idéologie de l'entreprise au sujet des inégalités de genre dans le monde et dans la tech en particulier. Il dit en effet que la croyance au sein de Google, c’est que « toutes les inégalités sont dues à un traitement différencié et toutes les personnes sont intrinsèquement les mêmes. » Et personne n’a intérêt à aller à l’encontre de cela.
James Damore décrit en effet Google comme une « chambre d'écho particulièrement intense » et les chambres d'écho, comme il l’explique, « se maintiennent en créant un esprit partagé et en gardant la discussion confinée dans certaines limites […] Mais, les chambres d'écho doivent également se prémunir contre la dissidence et l'opposition », dit-il. Un consensus au sein de la chambre d’écho est donc maintenu en humiliant les gens qui s'opposent à l'idéologie du groupe pour les amener à se conformer ou en les excommuniant s'ils persistent à violer les tabous. Cela sert notamment à « avertir les autres que le même châtiment les attend s'ils ne se conforment pas » aux principes du groupe. Et c’est là que James Damore a commis son erreur.
James Damore
James Damore a osé penser différemment, mais il a été ignoré jusqu’à ce que l’affaire soit rendue publique et que des sanctions soient exigées par des personnes mécontentes
Dans son article sur le Wall Street Journal, James Damore explique que dans son mémo, il a « commis une hérésie contre la croyance de Google en déclarant que les disparités entre hommes et femmes que nous voyons dans le monde ne sont pas toutes le résultat d'un traitement discriminatoire. » Mais, son mémo n’a pas déclenché de polémique juste après sa publication. Son document date en effet de juillet 2017, mais il y a seulement une semaine que cela a créé un déluge de critiques. « Lorsque j'ai fait circuler le document il y a environ un mois à nos groupes de diversité et à des individus au sein de Google, il n'y avait pas de protestation ni d’accusation de misogynie », dit-il. « Je me suis engagé dans une discussion raisonnée avec certains de mes pairs sur ces questions, mais le plus souvent, j'ai été ignoré », a-t-il ajouté.
Mais « tout a changé lorsque le document a fait l'objet de vives critiques au sein de l'entreprise et dans le monde technologique plus large ». Et cela a commencé quand « ceux qui sont les plus zélés envers la croyance sur la diversité [ont décidé de ne] pas laisser cette offense publique rester impunie », dit-il. Ces personnes mécontentes ont donc « envoyé des emails, en colère, au service des ressources humaines de Google et à tous ceux qui sont dans ma hiérarchie supérieure pour exiger une censure, des représailles et des réparations », explique l’ancien ingénieur de Google.
« La haute direction a essayé d'apaiser cette vague d'indignation en m'humiliant et en déformant mon document, mais ils ne pouvaient pas vraiment faire autrement », dit-il, parce que « la foule se serait levée contre toute personne qui partagerait ouvertement mon avis ou même qui aurait toléré mes points de vue. » Ainsi, « lorsque toute l'affaire est finalement devenue une controverse médiatique majeure, à cause des fuites externes, Google a dû résoudre le problème causé par mon manifeste soi-disant sexiste et anti-diversité. »
Sundar Pichai n’avait plus le choix, devrait-il considérer que James Damore avait violé le Code de conduite de Google pour apaiser les mécontents ?
Si James Damore considère Google comme une entreprise qui embauche les personnes les plus intelligentes du monde, il se dit toutefois déçu de ce que l'entreprise soit guidée par ses idéologies et soit si intolérante au débat scientifique et aux arguments raisonnés. « Le PDG de Google, Sundar Pichai, a déclaré que certaines parties de mon exposé avaient violé le code de conduite de la société et "franchissent les limites en perpétuant des stéréotypes offensants sur le genre dans notre lieu de travail". » Pourtant, poursuit-il, « mon document de dix pages énonçait ce que je considérais comme un argument raisonné, bien étudié et de bonne foi, mais comme je l'ai dit, le point de vue que je défendais est généralement banni chez Google en raison de la "chambre d'écho idéologique" de l'entreprise. Mon licenciement confirme exactement ce point. »
Source : The Wall Street Journal
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