Cela fait 17 mois que Francis Rawls, un ancien sergent de la police de Philadelphie est détenu en prison. Les raisons ? Il est suspecté d'avoir du contenu lié à la pornographie juvénile sur deux disques durs externes qu'il refuse de déverrouiller, pour permettre à la police d'en vérifier le contenu.
Dans le cadre de l’enquête, la police a saisi du matériel appartenant à monsieur Rawls. Il s’agit entre autres d’un iPhone 5S, un Mac Pro et ses deux disques durs externes. D’après les documents du tribunal, le suspect « a volontairement fourni le mot de passe pour l'iPhone 5S d'Apple, mais a refusé de fournir les mots de passe pour déchiffrer l'ordinateur Apple Mac Pro ou les disques durs externes. Malgré son refus, les enquêteurs ont découvert le mot de passe pour déchiffrer le Mac Pro, mais n'ont pas pu déchiffrer les disques durs externes. »
Les enquêteurs n’ont pas trouvé de contenu pédopornographique sur le Mac Pro, mais une analyse de la machine a révélé des traces de pornographie juvénile. Les fichiers journaux indiquaient par exemple des termes couramment utilisés dans cette forme d’exploitation juvénile. En plus, « l'examen a montré que [Francis Rawls] a accédé ou tenté d'accéder à plus de 20 000 fichiers avec des noms de fichiers compatibles avec une évidente pornographie juvénile ».
Pour le tribunal de première instance qui a jugé cette affaire, il n’y a aucun doute que le suspect détienne ce type de contenu. Il estime d’ailleurs que les fichiers en question ont été stockés sur les disques durs que Rawls refuse de déchiffrer. Accusé de faire outrage au tribunal, le suspect a donc été détenu en prison depuis maintenant 17 mois. Il affirme pourtant ne pas se souvenir des mots de passe nécessaires pour débloquer les disques durs et a même essayé plusieurs mots de passe incorrects.
Dans un dépôt à la Cour d’appel, l’avocat de l’accusé conteste donc cette décision, soutenant que son client a été incarcéré sans avoir été jugé coupable pour aucun crime relatif à la pornographie juvénile, mais à cause de son incapacité de débloquer les deux disques durs externes. L’appel remet en cause la capacité du gouvernement fédéral à obliger le déchiffrement des appareils numériques lorsqu’il saisit ces appareils en vertu d'un mandat de perquisition valide. Rawls estime par ailleurs qu’en le forçant à révéler ses mots de passe, sa protection du Cinquième Amendement contre l’auto-incrimination est violée ; un argument qui a été rejeté par le tribunal.
Dans une décision rendue ce lundi, la Cour d’appel du troisième circuit des États-Unis a décidé de ne pas s’opposer à la décision rendue par le tribunal de première instance rejetant l’argument de violation du Cinquième Amendement. Ce nouveau verdict se base sur une règle qui stipule que « le Cinquième Amendement ne protège pas un acte de production de preuve [ici le déchiffrement des dispositifs] lorsque l'existence, la détention et l'authenticité de la preuve est une « conclusion prévisible » qui « ajoute peu ou rien à la quantité d’informations du gouvernement fédéral ». Pour que la règle s'applique, le gouvernement doit être en mesure de « décrire avec une précision raisonnable » les documents ou éléments de preuve qu'il cherche à imposer.
Dans le cas de Rawls, la Cour estime en effet qu’en demandant à l’accusé de débloquer ses dispositifs, on ne le force pas à témoigner contre lui-même ou fournir des preuves qui pourraient l’incriminer, puisque les autorités disent qu’elles savent déjà qu’il y a du contenu de pornographie juvénile sur les disques durs. La Cour d’appel indique également que « l'acte de déchiffrer des dispositifs ne serait pas un témoignage dans le sens du privilège du Cinquième Amendement contre l'auto-incrimination. Le Cinquième Amendement ne s'applique que lorsque l'accusé est obligé de faire une communication testimoniale qui est incriminante. Et pour être un témoignage, une communication doit explicitement ou implicitement… relater un fait ou divulguer de l'information », ce qui ne semble pas être le cas de Rawls. Cela signifie que le suspect va rester indéfiniment en prison, à moins que cette décision soit levée.
Source : Décision de la Cour d’appel
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USA : un tribunal estime qu'un suspect a l'obligation de déchiffrer ses disques durs
Si la police pense y trouver des preuves pouvant l'incriminer
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Le , par Michael Guilloux
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