Aussi, à l’occasion du discours du président Juncker sur l’état de l’Union en 2016, la Commission a présenté des propositions sur la modernisation du droit d’auteur afin « d'accroître la diversité culturelle en Europe et les contenus disponibles en ligne, tout en clarifiant les règles pour tous les acteurs des services en ligne ».
L’ensemble des propositions concernant le droit d’auteur s'articule autour de trois grandes priorités, notamment :
- un plus grand choix et un accès amélioré et transfrontière aux contenus en ligne : ici, la Commission propose un mécanisme juridique qui permettra aux radiodiffuseurs d’obtenir plus facilement les autorisations dont ils ont besoin auprès des titulaires des droits pour pouvoir diffuser des programmes en ligne dans d’autres États membres de l’UE. Il s’agit de programmes que les radiodiffuseurs transmettent en ligne en même temps que leur émission et des services de rattrapage qu’ils souhaitent mettre à disposition en ligne dans d’autres États membres, tels que MyTF1 en France, ZDF Mediathek en Allemagne, TV3 Play au Danemark, en Suède et dans les pays baltes et AtresPlayer en Espagne. La Commission estime que le fait de donner la possibilité aux radiodiffuseurs de diffuser l'essentiel de leurs contenus, comme des informations télévisées, des programmes culturels, des émissions politiques, des documentaires ou des divertissements, dans d’autres États membres également élargira le choix dont disposent les consommateurs. Elle précise également que les règles proposées permettent aussi aux opérateurs offrant des bouquets de chaînes (comme Proximus TV en Belgique, Movistar + en Espagne, ou IPTV Entertain de Deutsche Telekom en Allemagne) d’obtenir plus facilement les autorisations dont ils ont besoin : au lieu de devoir négocier individuellement avec chaque titulaire de droit pour pouvoir offrir ces bouquets de chaînes provenant d’autres États membres de l’UE, ils pourront obtenir ces licences auprès d’organismes de gestion collective représentant les titulaires de droits ;
- l’amélioration des règles en matière de droit d’auteur dans les domaines de la recherche, de l’éducation et de l’inclusion des personnes handicapées : la Commission rappelle qu’aujourd’hui, près d'un éducateur sur quatre se heurte chaque semaine à des restrictions liées au droit d’auteur dans ses activités pédagogiques numériques. Aussi, elle a proposé une nouvelle exception en vue de permettre aux établissements d'enseignement d’utiliser des matériaux à des fins d'illustration dans leurs activités pédagogiques fondées sur des outils numériques et dans le cadre des cours en ligne transfrontières. La directive proposée permettra également aux chercheurs dans l’ensemble de l’Union d'utiliser plus facilement les technologies de fouille de textes et d'exploration de données («text and data mining», TDM) pour analyser de gros volumes de données. La Commission pense que l’exception envisagée stimulera ainsi très utilement la recherche innovante, sachant qu'aujourd'hui la quasi-totalité des publications scientifiques sont numériques et que leur volume total progresse de 8 % à 9 % par an au niveau mondial ;
- un marché plus équitable et durable pour les créateurs et la presse : la directive sur le droit d’auteur vise à renforcer la capacité des titulaires de droits à négocier et à être rémunérés pour l’exploitation en ligne de leurs contenus sur les plateformes de partage de vidéos telles que YouTube ou Dailymotion. Ces plateformes seront tenues de déployer des moyens efficaces tels que des technologies permettant de détecter automatiquement des chansons ou des œuvres audiovisuelles identifiées par les titulaires de droits et devant être soit autorisées, soit supprimées. Les journaux, magazines et autres publications de presse ont bénéficié du passage de la presse écrite aux services numériques et en ligne comme les médias sociaux et les agrégateurs d’informations. Cette évolution leur a permis d'élargir leur lectorat, mais a également eu une incidence sur leurs recettes publicitaires et a rendu le respect des droits dans ces publications de plus en plus difficile. Aussi la Commission propose-t-elle d'instaurer un nouveau droit voisin pour les éditeurs, comparable à celui qui existe déjà dans le droit de l'Union pour les producteurs de films, les producteurs de disques et les autres acteurs des industries créatives tels que les radiodiffuseurs.
Le troisième axe envisagé par Bruxelles peut s’avérer redoutable. Il soutient que « le nouveau droit reconnaît le rôle important que jouent les éditeurs de presse en termes d’investissements et de contribution à la création de contenus journalistiques de qualité, ce qui est essentiel pour l’accès des citoyens à la connaissance dans nos sociétés démocratiques. Ils seront ainsi, pour la toute première fois, juridiquement reconnus comme des titulaires de droits, ce qui les placera dans une meilleure position, d'une part, pour négocier l'utilisation de leurs contenus avec les services en ligne qui les utilisent ou en permettent l’accès et, d'autre part, pour lutter contre le piratage. Cette approche permettra à l’ensemble des acteurs de disposer d’un cadre juridique clair pour l’octroi de licences à des fins d’utilisation numérique de contenus, et contribuera au développement de modèles économiques innovants au profit des consommateurs ». Un proposition qui rappelle la « taxe Google », déjà mise en place en Espagne. où Google a préféré fermer son service Google News.
Malgré tous ses efforts pour défendre son texte, la proposition de loi ne reçoit pas les louanges escomptées. « On n’aurait pas pu imaginer pire », s’est offusqué Joe McNamee, le directeur exécutif de European Digital Rights (EDRi). « Nous avons besoin d’une réforme du droit d’auteur qui rend l’Europe adaptée au 21e siècle. Nous avons maintenant une proposition qui est un poison pour la liberté d’expression, un poison pour les entreprises européennes, et un poison pour la créativité », a-t-il continué.
Source : communiqué de presse de la Commission européenne, propositions de directives (au format PDF)
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