I. Interview

  1. Sylvain James :
    Delphi 2005 : Que pensez-vous de la nouvelle cohabitation des langages C# et Delphi, qui sonne en même temps l'abandon de C# Builder ?

    Olivier Dahan :
    Je pense que Borland a fait le bon choix, il était temps de proposer un véritable "studio" de développement. Quelle que soit l'excellence de Delphi, sous .Net les développeurs professionnels ont aussi besoin de connaître et d'utiliser C#, leur proposer un EDI tout en un leur évite d'avoir à « choisir leur camp » ou bien d'acheter des produits séparés. Désormais nous avons tout sous la main dans un ensemble cohérent. Dès lors l'abandon de C#Builder en tant que EDI séparé m'apparaît logique. Alors ne disons pas que C# Builder est abandonné, il est juste intégré sans augmentation de prix dans Delphi, et c'est plutôt une bonne nouvelle !
  2. SJ :
    Les produits périphériques liés à la gestion du cycle de vie des applications se font de plus en plus nombreux dans le package Borland. Ces nouveaux outils sont-ils réservés à "une élite" ou aux grosses équipes de développement ?

    OD :
    Pour être franc je ne vais pas vous dire que le développeur qui se borne à créer des petits utilitaires ou des petites applications de gestion de quelques écrans a un besoin impérieux de tous ces outils. Mais en réalité ce développeur là n'existe pas! Les grosses équipes de développement font aussi des petits utilitaires alors que les développeurs de petites applications ont aussi besoin un jour ou l'autre d'en étoffer certaines qui cessent alors d'être "petites". Au final tout le monde à besoin de gérer proprement ses sources, ses projets, ses diagrammes, de tester ses classes et librairies. Les outils fournis par Borland ne sont donc pas réservés à une "élite" pour reprendre votre expression. Parfois on développe de petites choses, parfois de plus grosses. Le fait que Delphi 2005 offre tous ces outils va faire progresser tout le monde. Nous sommes donc loin d'une démarche "élitiste", bien au contraire.
  3. SJ :
    Une des technologies phare mise en avant est le modèle de développement ECO. Qu'est-ce, et en quoi cela démarque-t-il Borland de la concurrence ?

    OD :
    ECO est un outil extraordinaire. En simplifiant à l'extrême on peut dire qu'il permet de dessiner une application sous la forme de diagrammes UML et qu'il se charge d'écrire automatiquement le code applicatif. Mais s'il s'agissait de simple magie on se lasserait vite, les automatismes imposent souvent plus de contraintes qu'ils ne libèrent. ECO c'est tout l'inverse, la liberté s'exprime dans les diagrammes qui décrivent les classes, leurs relations. C'est l'essence même, l'âme de l'application que le développeur contrôle en permanence et en toute liberté. Le gain énorme se fait dans la traduction des diagrammes en code. Cette étape est fastidieuse et se trouve être la source principale des bugs dans une application. ECO supprime ces risques inhérents à la traduction des idées en code. Il simplifie aussi les évolutions en évitant les probables nouveaux bugs ajoutés lors des modifications. Le fait que Borland intègre un outil aussi puissant dans Delphi ouvre à tous les développeurs la voie de MDA (Model Driven Architecture, architecture pilotée par les modèles). D'ailleurs, avec ECO II qui ajoute le support ASP.Net, Delphi 2005 étend la méthode MDA aux applications Web, ce qui dépasse de loin bien d'autres studios de développement.
  4. SJ :
    Hormis les nouveaux produits accompagnant Delphi 2005, verra-t-on apparaître de nouveaux composants ?

    OD :
    Delphi a toujours bénéficié, depuis sa première version, de l'appui d'une communauté particulièrement dynamique et féconde. Les composants existants, tant gratuits que payants, se comptent par milliers et couvrent les besoins les plus divers. Nul doute que cet élan ne s'arrêtera pas en chemin. D'un autre côté, si porter des composants VCL Win32 vers Delphi .Net est assez simple, la création de nouveaux composants réclame réflexion. Il faut d'abord le temps de « digérer » le framework .Net et il faudra que les créateurs de composants fassent un choix délicat : écrire directement pour VCL.Net ou bien écrire des composants Windows Forms, voire ASP.Net, ou encore mieux, utilisables dans deux ou trois de ces contextes à la fois. Cela peut réclamer plus de temps de codage mais ouvrir une clientèle nouvelle, le choix est stratégique, donc délicat. Delphi 2005 ouvre une multitude d'horizons nouveaux, nous ne sommes qu'au début d'une nouvelle ère, l'avenir sera passionnant, ne nous en plaignons pas !
  5. SJ :
    D'ailleurs, puisque nous parlons composants, qu'en sera-t-il de MK Query Builder que vous éditez ? Une version .Net est-elle prévue ?

    OD :
    Je suis comme les autres développeurs, et ce que j'évoquais il y a quelques secondes à propos des choix stratégiques et de l'éventuel surcoût de développement est bien entendu valable pour moi aussi. Deux axes sont aujourd'hui prévus : la sortie prochaine (fin 2004 / début 2005) d'une version VCL.Net de MKQB compatible avec la version 3 sous Win32, et une refonte complète du produit avec un moteur indépendant du langage et des composants spécifiques, l'un pour Windows Forms, l'autre pour VCL.Net et une partie serveur Internet pour l'interrogation via Internet par des navigateurs Web classique. Ce produit là, beaucoup plus complexe, est actuellement à l'étude et aucune date de sortie n'est pour l'instant annoncée. Vos lecteurs intéressés pourront d'ailleurs trouver toutes les informations à jour sur mon site e-naxos.com
  6. SJ :
    Le développement Web ASP .NET avec Delphi comme langage est une nouveauté importante. Allez vous prendre le virage pour vos développements web futurs ?

    OD :
    Bien entendu. ASP.Net est une vraie révolution, rien à voir avec ASP Win32. Développer un site Web dynamique comme on développe une application fenêtrée a quelque chose de libérateur, de surcroît le faire avec Delphi est purement génial ! Enfin le développement Web devient mature, mais au-delà du plaisir d'avoir enfin des outils adaptés on gagne surtout beaucoup de temps tout en produisant quelque chose de plus abouti, de plus ergonomique et de plus maintenable. C'est ça qui est essentiel. Il reste que pour généraliser les développements ASP.Net il faut que les entreprises basculent vers .Net ce qui se fait très progressivement, comme toujours lorsqu'on change de plateforme.
  7. SJ :
    Quels risques prennent les actuels possesseurs de Delphi de ne pas migrer sur Delphi 2005 ?

    OD :
    Tout dépend de quel "Delphi" vous parlez... Beaucoup de développeurs utilisent encore Delphi 5 ou 6. Ceux là sont coincés dans le monde Win32 alors que le futur s'appelle .Net. Ils doivent migrer absolument au risque d'être définitivement "largués" si vous me permettez cette expression triviale mais cruellement vraie. Ils bénéficieront en outre d'une version plus puissante de Delphi Win32 puisque Delphi 2005 intègre l'équivalent de Delphi 7 avec des nouveautés. Pour ceux qui utilisent Delphi 7 le constat est le même concernant .Net : s'ils ne veulent pas être abandonnés sur le bas côté de la route, il leur faudra s'intéresser à .Net. Delphi 2005 leur offre à la fois la continuité Win32 et l'ouverture sur Delphi .Net tout autant que C#, on ne peut rêver mieux. Reste les développeurs Delphi 8 ou C# Builder, ceux là sont déjà convaincus que .Net est indispensable mais ils utilisent encore Delphi 7. Pour eux le choix d'un EDI totalement intégré permettant de tout faire dans un même cadre cohérent me semble purement logique et coulant de .. source !
  8. SJ :
    L'API OpenTools sera-t-elle bien documentée ? Permettra-t-elle d'accéder aux nouvelles fonctionnalités de l'IDE ?

    OD :
    Borland a fait beaucoup d'effort pour documenter OTA ces dernières années. Parler de perfection serait mentir, mais nous sommes sur la bonne voie. Je ne sais pas encore ce qui sera intégré dans la version finale de Delphi 2005 mais il existe déjà un fichier d'aide fourni pour C# Builder qui utilise le même IDE (BDS - Borland Delphi Studio) et dont les descriptions restent valables sous Delphi 2005. Vous noterez d'ailleurs que les anciens experts restent assez facilement migrables, preuve en est des fameux GExperts, par exemple, qui sont depuis plusieurs mois déjà disponibles pour Delphi 8.
  9. SJ :
    Que penser de l'abandon de CLX ?

    OD :
    Je ne parlerais pas d'abandon, cela serait mal comprendre Delphi. CLX est en fait le socle de base, le framework de Delphi et ce socle est toujours bien vivant, la VCL.NET en est la preuve. Mais je comprends bien votre question, vous parlez en réalité de la VCL spécifique qui permet de faire des développements portables entre Delphi Win32 et Kylix sous Linux et qui s'appelle en réalité VisualCLX. Une fois cela posé on comprend mieux pourquoi VisualCLX n'existe pas sous Delphi 2005. En effet, les applications Delphi .Net ne font pas qu'afficher des écrans, il y a du code aussi... et ce dernier est désormais intimement lié à la plateforme .Net et son framework. Proposer une CLX portable entre Delphi .Net et Kylix reviendrait à fournir un équivalent .Net de ce qu'est QT pour le couple Win32/Linux. Borland ne peut pas réinventer .Net sous Linux, tout simplement, Ce projet existe déjà par ailleurs, il s'appelle MONO... Il n'y a donc pas d'abandon, il y a juste un changement de logique dans la façon de faire des applications portables Windows / Linux. Sous Win32 c'était aux langages de proposer des solutions, ce qu'a fait Borland, sous .Net c'est la plateforme elle-même qui doit être portée, c'est le but d'un projet comme MONO. Cela étant dit il reste tout à fait possible d'écrire de façon « traditionnelle » (avec des $DEFINE) des applications portables Win32 / Linux et .Net, c'est d'ailleurs un thème que je développe dans mon dernier ouvrage.
  10. SJ :
    Peut-on considérer Delphi 2005 comme une alternative sérieuse à Visual Studio 2003 ?

    OD :
    Honnêtement, VS.Net est un bel environnement, je ne suis pas de ceux qui critiquent bêtement pour préserver leur pré carré. Mais comme beaucoup d'autres développeurs cet EDI n'est pas ce que j'attends. Il est trop fortement inféodé à Microsoft et ses langages. A quoi me sert un EDI proposant Visual Basic .Net par exemple ? A rien. En revanche Delphi 2005 m'offre ce qu'il y a de mieux dans VS.Net : C#, ASP.Net, les concepteurs visuels, les experts, le tout en préservant mes acquis sous Win32. Mieux, VS.Net n'offre que les Windows Forms pour développer sous Windows, cette bibliothèque est la partie la moins réussie de .Net. Ce n'est qu'un portage rapide des API Win32 sans grande nouveauté et très limitée en nombre de composants. Pas assez pour développer sérieusement. Delphi 2005 m'offre tout cela et bien plus notamment avec la VCL.Net ou des outils comme ECO que nous évoquions tout à l'heure. Entre les deux EDI je n'ai donc aucune hésitation, Delphi 2005 correspond bien mieux à mes besoins actuels et futurs.
  11. SJ :
    Le langage Delphi évolue à chaque version. Il semble d'ailleurs que les templates/generics soient au programme des prochaines évolutions. Comment accueillez-vous les nouveautés (Delphi 2005 : Nouveautés du langage) ?

    OD :
    Je ne suis pas un développeur anxieux ou timoré qui ne cesse de comparer Delphi à C++, Java ou aujourd'hui à C#. Pour être franc je pense que ceux qui s'adonnent à ce genre de comparatifs font un complexe d'infériorité, moi je suis à l'aise dans mon choix de Delphi ! Jusqu'à ce jour jamais je n'ai été coincé dans un développement parce que Delphi ne supportait pas les templates ou la surcharge des opérateurs. Ceux qui le disent sont victimes d'un snobisme typiquement « cplusplussien ». De fait, que ces améliorations existent aujourd'hui ne m'émeut pas plus que cela car elles ne m'ont jamais manqué pour développer des applications robustes depuis Delphi 1. Mais désormais nous en disposons, je ne vais pas m'en plaindre non plus, cela peut être utile dans certaines circonstances. Mais finalement ce qui me plait le plus dans ces ajouts c'est que cela supprimera quelques "trolls" sur les forums et coupera l'herbe sous les pieds à ceux qui en faisait un éventuel critère de choix pour leur outil de développement. Maintenant c'est dans la boîte, que dire de plus à part happy coding !
  12. SJ :
    Vous avez déjà publié Delphi 7 et Delphi 8 aux éditions Eyrolles. Est-ce que vous avez prévu d'écrire un nouvel ouvrage sur Delphi 2005 ? Le cas échéant quels sont les nouveaux aspects que vous approfondiriez ?

    OD :
    J'y travaille sérieusement, vous vous en doutez ! Je désire réellement apporter quelque chose de nouveau dans ce futur ouvrage qui ne peut pas être traité comme les deux précédents en raison de la présence de trois langages différents dans Delphi 2005 (Delphi Win32, Delphi .Net et C#). L'approche doit donc être différente. Mais que les lecteurs se rassurent, les deux ouvrages actuels, « Delphi 7 Studio » et « Delphi 8 pour .Net » n'ont jamais été autant d'actualité que sous Delphi 2005 qui intègre ces deux langages ! Le prochain livre ne répètera pas ce qui y est dit et ces deux ouvrages devraient rester encore un bon moment une référence de base pour Delphi Win32 et .Net.

Olivier Dahan est un expert reconnu des développeurs Delphi. Beta testeur Delphi depuis la première version, c'est aussi un contributeur assidu de longue date sur les forums de news. Ce qui l'a amené naturellement à écrire Delphi 7 Studio et Delphi 8 pour .NET aux éditions Eyrolles qui sont devenus des ouvrages de référence pour les "Delphinautes".
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