Alors que l’examen de la loi pour la République numérique a repris au Sénat, quelques membres de la chambre haute du Parlement français ont ramené à la table des sénateurs, une disposition visant à donner la priorité aux logiciels libres et formats ouverts au sein des administrations françaises « lors du développement, de l'achat ou de l'utilisation d'un système informatique ».
Le texte initial, voté par l’Assemblée nationale en janvier dernier, a par la suite été supprimé par un vote de la Commission des lois au début du mois d’avril. Laquelle suppression, selon les sénateurs qui ont réintroduit le texte, n’était pas fondée sur la réfutation des avantages des logiciels libres, mais sur des inquiétudes quant aux « difficultés au regard du principe d’égalité et du droit de la concurrence qui fondent le droit de la commande publique » et à une possible « injonction au gouvernement ».
Ces derniers ont estimé que si donner la priorité au logiciel libre a été jugé opportun pour le service public d’enseignement supérieur et de recherche, il n’y avait donc aucune raison pour que cela soit rejeté pour les autres administrations. Mais de manière paradoxale, ils notent cependant qu’il ne s’agira pas d’interdire l’acquisition de logiciel « fermé », si ce dernier répond mieux que les logiciels libres aux exigences fonctionnelles définies dans le cahier des charges lors d’un achat. Par conséquent, il n’y aurait pas de discrimination entre les acteurs économiques sur le marché public. Que veulent-ils donc dire par donner la priorité aux logiciels libres, dès lors que le choix entre logiciel libre et logiciel propriétaire devrait se faire sur des critères objectifs, sans discrimination, comme ils le suggèrent ?
Eh bien, nous n’aurons pas de réponse à cette question, étant donné que le texte (amendement N° 393) est « tombé » après la demande de son retrait. Par contre, le Sénat a adopté un amendement (N° 223) qui vise à rétablir le texte supprimé au début du mois d’avril, mais avec une formulation bien différente de celle de l’amendement N° 393.
Contrairement à ce dernier qui veut absolument que la priorité soit donnée aux logiciels libres et formats ouverts, lors du développement, de l'achat ou de l'utilisation d'un système informatique, l’amendement N° 223 laisse une grande marge de manœuvre aux administrations. Il suggère en effet que celles-ci « veillent à préserver la maîtrise, la pérennité et l’indépendance de leurs systèmes d’information. » Il note par la suite que les administrations « encouragent l'utilisation des logiciels libres et des formats ouverts lors du développement, de l'achat ou de l'utilisation, de tout ou partie, de ces systèmes d’information. »
Visiblement, ce texte semble ne pas être en mesure de faire avancer l’utilisation des logiciels libres d’un pouce par rapport à sa progression actuelle. La réalité, en effet, est que l’utilisation des logiciels libres ne progresse pas significativement dans les administrations, comme l’ont indiqué les initiateurs de l’amendement N° 393 ; et ce, malgré la circulaire du Premier ministre du 19 septembre 2012 et les initiatives comme le socle interministériel des logiciels libres (SILL). Le SILL vise par exemple à accompagner les administrations dans l’utilisation des logiciels libres en mettant régulièrement à leur disposition une liste de logiciels libres préconisés selon leur besoin. Toutes ces mesures d’encouragement, n’étant pas incitatives, n’ont pas eu le résultat escompté sur l’utilisation des logiciels libres. Ce vote du Sénat est-il donc un aveu d'une éventuelle impossibilité de donner la priorité aux logiciels libres et formats ouverts ?
Sources : Amendement N° 223, Amendement N° 393
Et vous ?
Quelles conclusions tirez-vous de ces votes du Sénat ?
France : le Sénat choisit d'encourager l'utilisation des logiciels libres et formats ouverts
Plutôt que de leur donner la priorité
France : le Sénat choisit d'encourager l'utilisation des logiciels libres et formats ouverts
Plutôt que de leur donner la priorité
Le , par Michael Guilloux
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