Le 20 décembre dernier, le gouvernement a publié un décret ayant pour objectif de permettre aux enquêteurs (police et gendarmerie nationales, pouvoirs publics, justice, douanes), dans le cadre d'une information judiciaire en matière de criminalité et de délinquance organisées et sur autorisation du juge d'instruction, « d'utiliser les moyens techniques permettant de capter en temps réel des données informatiques ».
Lors de l’examen du projet de loi de réforme pénale en commission des lois, les sénateurs ont adopté la semaine dernière une modification du texte qui permet aux enquêteurs d’accéder aux correspondances d'un suspect sans qu'il en soit informé.
Ils expliquent que cet amendement, qui reprend partiellement les dispositions votées à l'article 3 de la proposition de loi tendant à renforcer la lutte antiterroriste adoptée par le Sénat le 2 février dernier, vise à créer un régime de saisie de données de messagerie électronique, indépendant de la perquisition, conditionné à l’existence d’une interception de correspondances électroniques.
« Depuis un arrêt de la chambre criminelle du 8 juillet 2015, la Cour de cassation considère que l’appréhension, l’enregistrement et la transcription des correspondances émises ou reçues antérieurement à la date de la décision d’interception prise par le juge d’instruction, c’est-à-dire les correspondances stockées sur une messagerie, ne peuvent être transcrites selon le régime des interceptions de correspondances. En l’absence d’un autre cadre juridique, elles relèvent des dispositions légales relatives aux perquisitions. Or le régime des perquisitions oblige à prévenir la personne que ses correspondances sont saisies. Cet amendement répond à cette situation et permet la saisie des données à l'insu de la personne concernée, dans un régime ad hoc uniquement applicable en matière de lutte contre le crime organisé, dépendant du régime des interceptions de correspondances défini aux articles 100 et suivants du code de procédure pénale ».
L’amendement stipule que « si les nécessités de l’enquête relative à l’une des infractions entrant dans le champ d’application des articles 706-73 et 706-73-1 l’exigent, le juge des libertés et de la détention peut, à la requête du procureur de la République, autoriser par ordonnance motivée les officiers et agents de police judiciaire requis par le procureur de la République à accéder, en tous lieux, aux correspondances numériques émises, reçues ou stockées sur une adresse électronique si cette dernière fait l’objet d’une autorisation d’interception en application de l'article 706-95, dans la limite de la durée de cette autorisation. Les données auxquelles il aura été permis d’accéder peuvent être saisies et enregistrées ou copiées sur tout support ».
Si le texte, qui doit encore être confirmé en séance plénière, prévoit que « ces données peuvent être saisies et enregistrées ou copiées sur tout support », il ne définit cependant pas de limite à la durée de conservation de ces données.
Le texte indique également que « les opérations mentionnées aux articles 706-95-2 et 706-95-3 sont effectuées sous l'autorité et le contrôle du magistrat qui les a autorisées et ne peuvent, à peine de nullité, avoir un autre objet que la recherche et la constatation des infractions visées dans la décision de ce magistrat. Le fait que les opérations prévues au présent article révèlent des infractions autres que celles visées dans la décision du magistrat qui les a autorisées ne constitue pas une cause de nullité des procédures incidentes ». En clair, il sera possible pour les enquêteurs qui mènent des investigations sur un délit de poursuivre pour toute autre infraction pénale pour des délits qui seront révélés pendant cet exercice.
Source : Sénat
Voir aussi :
France : le gouvernement recommande aux entreprises de bloquer Tor via un serveur proxy pour filtrer les connexions sortantes vers le réseau
France : la pénalisation de la consultation habituelle des sites web terroristes n'a pas été soutenue à l'Assemblée nationale
France : les Républicains veulent intégrer le délit de consultation des sites terroristes au projet de loi pénale après le vote du Sénat
France : les sénateurs ont adopté une modification du texte qui permet aux enquêteurs
D'accéder aux correspondances d'un suspect
France : les sénateurs ont adopté une modification du texte qui permet aux enquêteurs
D'accéder aux correspondances d'un suspect
Le , par Stéphane le calme
Une erreur dans cette actualité ? Signalez-nous-la !