
Il créerait une « zone de non-droit »
Leslie Caldwell, un procureur général adjoint au ministère de la Justice des États-Unis a déclaré mardi dernier lors d'une conférence à Washington que le gouvernement américain est très préoccupé par la décision de Google et Apple qui consiste à chiffrer automatiquement toutes les données sur les appareils Android et iOS. La raison donnée par Caldwell est que ceci conduit à la création de ce qu'elle appelle « une zone de non-droit ».
Le chiffrement en question (chiffrement point à point) est considéré comme l'une des mesures de sécurité les plus efficaces pour protéger ses informations privées, en l'activant automatiquement sur les téléphones des utilisateurs. Apple déclare, par exemple, qu’elle n'est plus en mesure de déchiffrer les données issues des appareils de ses utilisateurs. Seuls ceux-ci en auront possibilité de le faire, ce qui ennuie beaucoup la justice américaine et spécialement les agences gouvernementales parce qu'il est plus difficile de continuer leurs plans de surveillance en masse.
Alors que ces agences gouvernementales ne cessent de faire pression sur les constructeurs de smartphones ainsi que les fournisseurs d'accès pour introduire des backdoors (portes dérobées) dans leurs systèmes, le directeur du FBI James Comey avait déclaré en octobre dernier que « si Apple et Google ne veulent pas déchiffrer les téléphones, nous les forcerons à le faire », en redoutant le jour où « des gens innocents se retrouveront pénalisés parce que nous, les forces de l'ordre, ne pourrons pas accéder à certains types de données ou d'informations, même avec une autorisation légale ». Cette déclaration avait suscité un long débat chez les experts en sécurité informatique puisque les backdoors sont souvent utilisés par les hackers pour voler des informations privées et/ou répandre des programmes malveillants. Ces entreprises doivent « durcir leurs systèmes » et « résister catégoriquement aux tentatives [de la NSA] visant à y insérer des portes dérobées » avait déclaré l'EFF il y a quelques jours dans un rapport où elle explique son plan pour luter contre la NSA et défendre les libertés civiles dans le monde du numérique.
Les outils d'anonymat comme Tor sont aussi sous le viseur du ministère de la Justice, « Tor a évidemment été créé avec de bonnes intentions, mais c'est un énorme problème pour l'application de la loi », déclare Leslie Caldwell. « Il ya beaucoup de sites en ligne où vous pouvez acheter de l'héroïne et des armes, ou embaucher quelqu'un pour tuer une personne », continue-t-elle, avant d'ajouter que « 80% du trafic sur le réseau Tor implique la pornographie enfantine », en citant comme source une étude relayée par Wired le 30 décembre dernier. Ces propos ont causé l'indignation de Andy Greenberg, l'auteur de l'article d'origine publié sur Wired. Dans un nouvel article qu'il publia le lendemain matin. Greenberg déclare à l'attention de Leslie Caldwell que « cette statistique est horrible » et que c'est aussi « de la foutaise ».
En effet, si on lit bien son article du 30 décembre, on remarque qu'Andy Greenberg avait clairement écrit que selon l'étude « 80% du trafic des services cachés de Tor est lié à la pornographie juvénile » et non pas « 80% de tout le trafic de Tor ». Or, ces services cachés de Tor, aussi connus sous le terme sites web sombres, représentent moins de 2% de tout le trafic de Tor selon les créateurs du logiciel.
« Les organismes d'application de la loi visitent souvent des sites pédopornographiques pour les suivre et les infiltrer », rappelle Greenberg. « Les hackers lancent parfois des trafics frauduleux sur ces sites dans le but de les mettre hors-ligne. Ces sites instables qui sont souvent hors-ligne peuvent indiquer un plus grand nombre de visites selon la méthode de calcul utilisée dans l'étude ». Il explique ensuite que le réseau Tor est également utilisé pour permettre aux internautes d'échapper à la censure dans certains pays comme la Chine et l'Iran, mais aussi par les agences de renseignements américaines dans le but de recueillir des données en ligne sans être détectées. « Ces deux utilisations expliquent pourquoi beaucoup du financement de Tor vient directement du département d'État militaire américain », continue-t-il. « Alors à celui du ministère de la Justice qui prépare ces points de discussions pour la consommation du public : merci d'avoir cité mon article. La prochaine fois s'il vous plaît, essayez de le lire ».
Source : vice.com, article de Greenberg du 30/12/2014, article de Greenberg du 28/01/2015
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