Epitech vient de lancer une série vidéo sur les grandes figures de l’informatique. Présentées par Marcus, également aux manettes de Retro Game One (l’émission qui retrace l’Histoire du jeu vidéo), elle compte actuellement cinq épisodes. Deux autres sont attendus pour boucler la première saison, tandis qu’une deuxième est en cours de préparation.
Drôles, décalés, et originaux, « Les Dieux de l’Informatique » mettent en avant deux dimensions du métier de développeur : la passion et l’inventivité. L’occasion de discuter avec Emmanuel Carli, Directeur général d’Epitech sur l’importance de ces valeurs, et sur la nécessité de promouvoir la culture générale et l’Histoire dans une société à la mémoire de plus en plus courte, qui semble aujourd’hui confondre compétences informatiques et consommation d’applications. Nous nous sommes également entretenu avec le Directeur Internet du Groupe IONIS, Yannick Lejeune, sur le choix des grands noms effectués avec Marcus.
Drôles, décalés, et originaux, « Les Dieux de l’Informatique » mettent en avant deux dimensions du métier de développeur : la passion et l’inventivité. L’occasion de discuter avec Emmanuel Carli, Directeur général d’Epitech sur l’importance de ces valeurs, et sur la nécessité de promouvoir la culture générale et l’Histoire dans une société à la mémoire de plus en plus courte, qui semble aujourd’hui confondre compétences informatiques et consommation d’applications. Nous nous sommes également entretenu avec le Directeur Internet du Groupe IONIS, Yannick Lejeune, sur le choix des grands noms effectués avec Marcus.
Developpez.com : Vous venez de lancer une série de vidéos sur quelques personnages clefs de l’informatique et du développement. Pourquoi cette série ?
Emmanuel Carli : Nous voulions illustrer, avec un ton jeune et décalé, que dans l’informatique les idées folles peuvent avoir un impact énorme.
J’ai 38 ans. J’ai vu l’avènement de l’open-source et les précurseurs des années 90, comme Linus Torvald qui a créé le noyau de Linux en essayant de comprendre pourquoi le serveur de son école fonctionnait mal. Il ne faut pas que les jeunes générations oublient cela. Pensez par exemple que PHP a été développé par Rasmus Lerdorf simplement parce qu’il voulait connaitre le nombre de visiteurs qui consultaient son CV sur son site… Aujourd’hui PHP c’est 200 millions de sites webs !
Nous voulions rappeler, de manière ludique, que ce sont des personnes de conviction, engagés, qui ont imaginé des technologies qui ont eu des répercutions très lourdes sur le monde.
C’est aussi le message que nous essayons de faire passer en interne à Epitech. Avec cette série nous voulions aussi faire connaitre et souligner cette différence.
Developpez.com : A qui s’adresse « Les Dieux de l’Informatique » (jeunes développeurs, lycéens, tout le monde) ?
Emmanuel Carli : Plutôt aux jeunes, c’est vrai. Mais aussi plus largement à tous ceux qui sont intéressés par l’informatique.
Developpez.com : L’équipe dirigeante d’un autre groupe pédagogique, qui a fait beaucoup de bruit l’année dernière, expliquait en substance que « la culture générale c’est bien, mais que dans une école de développement on peut s’en passer ». Pourquoi connaître l’Histoire de l’informatique vous semble-il au contraire important ?
Emmanuel Carli : Parce qu’il me parait crucial de contextualiser ce que l’on fait et de se poser la question « Qu’est-ce qui fait qu’on en est là ? ». Typiquement, l’histoire du gars dans son labo avec son oscilloscope qui imagine le premier jeu vidéo pour attirer le public à ses journées portes ouvertes (NDR : histoire vraie de la naissance du premier Pong), les étudiants n’en ont plus aucune idée.
Et pourtant il ne faut pas perdre cette connaissance parce qu’elle montre que c’est la prise d’initiative, avec souvent peu de moyens mais avec toujours beaucoup de passion, d’abnégation et de convictions qui ont abouti à des résultats. Des résultats attendus mais aussi inattendus. C’est vraiment un message de passion et d’ouverture d’esprit que transmet cette Histoire.
Vous et moi sommes d’une génération qui a connu la période où pour faire un site web, il fallait trouver un serveur, tirer des câbles, etc. Aujourd’hui, il y a un décalage par rapport à cela dans les jeunes générations. Un hébergeur, un CPU sur Amazon, c’est devenu très simple. Donc il est important de rappeler que l’informatique ce n’est pas que déployer un site en deux clics ou télécharger une appli sur l’AppStore. A la base il y a toute une chaîne à comprendre (les différents langages, à quoi ils servent, les composants, le réseau, l’algorithmique, etc.). C’est ce que traduit aussi en filigrane cette série.
Developpez.com : Pour l’instant sept épisodes d’environ trois minutes ont été produits avec Marcus, sur le modèle de son émission sur l’Histoire du jeu vidéo. Une saison deux est-elle prévue ?
Emmanuel Carli : Les premières vidéos fonctionnent très bien. Nous avons eu 80.000 vues pour la bande annonce et plus de dix mille pour le premier épisode. Une saison deux est en cours. On verra après comment tout cela est reçu.
Developpez.com : A titre purement personnel et subjectif (et donc parfaitement injuste) qui sont, d’après vous, les trois contemporains vivant qui méritent le plus de rentrer dans un « Hall of Fames » de l’informatique ?
Emmanuel Carli : De manière un peu bateau, je pourrais vous citer les grands noms habituels… Mais si c’est à titre perso… je dirais plutôt Kent Beck, l’inventeur du concept d’eXtreme Programming (j’ai pas mal été impliqué là-dedans quand j’étais chez Thalès) ; le japonais Yukihiro Matsumoto, créateur de Ruby, et aussi le danois David Heinemeier Hansson, inventeur de Ruby on Rails. Je m’amuse bien avec Ruby et RoR en ce moment.
Ces trois-là ne sont pas forcément les plus connus mais ils ont en commun d’avoir un engagement fort. Tous ces grands noms sont aussi de très fortes personnalités, forcément. Ce sont des hommes qui au départ ont codé dans leurs salles de bain des trucs et qui ont ensuite construit et travaillé pendant des années pour arriver à fédérer des communautés énormes. On en revient en fait à la base de la série : en informatique avec de la passion, de la curiosité et de l’initiative on peut faire de grandes choses.
Les critères d’un choix difficile et obligatoirement subjectif
Comme tout choix, la sélection d’une dizaine de grands noms dans une liste historique pléthorique n’a pas été facile. Les « Dieux de l’informatique » n’échapperont certainement pas aux critiques de uns et des autres.
Les créateurs de la série – Epitech et Marcus – en ont bien conscience. « Dès le départ, on savait qu’on allait nous dire : mais pourquoi vous avez fait un épisode sur lui et pas sur elle ? », assume Yannick Lejeune, Directeur Internet du Groupe IONIS. Alan Turing est par exemple absent de cette première saison, ce qui peut étonner. « Typiquement, Turing donnera lieu à un épisode un peu plus tard. Mais Alan Turing c’est un nom que vous connaitrez en faisant des études d’informatique. Ce qui nous a intéressés, c’est aussi d’aller chercher d’autres personnalités, plus à la marge, qui nous permettent de raconter des anecdotes rigolotes avec un côté « le saviez-vous ? » pour faire progresser la culture générale de manière ludique ». Et de résumer la philosophie du projet : « le but n’est pas de faire une fiche Wikipedia […] on est aussi là pour rigoler ».
Cette démarche éditoriale traduit également les envies de Marcus (« il y a des noms qui lui parlaient – comme Jordan Mechner (NDR : créateur de « Prince Of Persia ») et d’autres moins, sur lesquels il ne se sentait pas nécessairement capable de faire 3 minutes drôles sans temps morts »).
Ce parti pris explique en tout cas un format court, parfaitement assumé, qui par définition ne vise pas l’exhaustivité. Dans « Les Dieux de l’Informatique », Grace Hopper est par exemple présentée comme la première découvreuse d’un bug. « Mais c’est aussi une femme remarquable, développeuse de très grand talent qui a travaillé sur les bases du Cobol », ajoute Yannick Lejeune. « Le but c’est aussi d’attiser la curiosité et de pousser à aller voir ce qu’il y a derrière », conclue-t-il
Si la série continue à connaître le succès, l’Epitech n’exclut d’ailleurs pas d’ouvrir le choix des « Dieux » aux internautes, qui pourront ainsi proposer et voter pour les noms à traiter dans de prochains épisodes.
« Les Dieux de l’Informatique » : tous les épisodes
Et vous ?
Que pensez-vous de cette mini-série ?
Si vous deviez choisir six grands noms de l’informatique et trois contemporains pour un « Hall of Fames », quels seraient-ils (et elles) ?