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Larry Ellison avait prédit que « les citoyens adopteraient leur meilleur comportement » s'ils étaient surveillés constamment.
Désormais, Oracle va jouer un rôle clé sur TikTok

Le , par Stéphane le calme

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Larry Ellison avait prédit que « les citoyens adopteraient leur meilleur comportement » s'ils étaient surveillés constamment.
Désormais, Oracle va jouer un rôle clé sur TikTok

Larry Ellison a longtemps défendu l’idée qu’une société placée sous l’œil constant de la surveillance numérique finirait par adopter un « meilleur comportement ». Aujourd’hui, alors qu’Oracle s’apprête à prendre un rôle central dans la gouvernance de TikTok aux États-Unis, sa vision prend une tournure concrète. Ce basculement soulève des enjeux majeurs : influence algorithmique, sécurité nationale, transparence et libertés publiques.

Il y a un an, Larry Ellison, cofondateur et président d'Oracle, décrivait un avenir où tout le monde, y compris les forces de l'ordre, serait soumis à une surveillance régulière, la vie quotidienne étant documentée de manière apparemment ininterrompue.

Lors de la réunion des analystes financiers d'Oracle en septembre dernier, il a prédit que l'intelligence artificielle aiderait à traiter les énormes quantités d'images enregistrées par les caméras placées partout, des tableaux de bord des voitures aux portes d'entrée en passant par les systèmes de sécurité et les policiers.

« Nous allons être surveillés », a déclaré Ellison. « Chaque policier sera surveillé en permanence, et en cas de problème, l'IA le signalera et le signalera à la personne appropriée. Les citoyens se comporteront de manière irréprochable, car nous enregistrons et signalons en permanence tout ce qui se passe. »

Ces commentaires ont pris une nouvelle importance maintenant que son entreprise est devenue un acteur majeur dans le secteur de l'IA et s'apprête à jouer un rôle crucial dans l'accord concernant les activités américaines de TikTok. La plateforme de partage de vidéos TikTok fait partie des réseaux sociaux les plus populaires du pays.

Des accords sur l'infrastructure IA à plusieurs milliards de dollars

L'entreprise, qui fournit des infrastructures d'IA, a surpris Wall Street au début du mois en concluant un accord de 300 milliards de dollars avec OpenAI, qui achètera de la puissance de calcul pendant environ cinq ans dans le cadre de l'un des plus importants contrats cloud jamais signés.

Et au début de la semaine dernière, OpenAI a signé des accords avec SoftBank et Oracle pour la création de nouveaux centres de données dans le cadre du gigantesque projet Stargate.

Lors de sa dernière conférence téléphonique trimestrielle avec les analystes, la direction a également présenté des prévisions de revenus qui faisaient état de 455 milliards de dollars de contrats, soit une hausse de 359 % par rapport à l'année précédente. La PDG Safra Catz a révélé qu'Oracle avait conclu des accords avec trois clients différents au cours du trimestre.

Par ailleurs, Oracle devrait faire partie des entreprises qui rachèteront les activités américaines de TikTok à la société mère chinoise ByteDance. En outre, Oracle sera le fer de lance de la surveillance américaine de l'algorithme et de la sécurité.

Jeudi après-midi, le président Donald Trump a signé un décret ouvrant la voie à un accord visant à placer TikTok entre les mains des États-Unis. La structure de propriété américaine est encore en cours de finalisation, mais Trump a déclaré qu'Oracle et Ellison joueraient un rôle « important » dans la gestion de l'application, tandis que le magnat conservateur des médias Rupert Murdoch et le milliardaire informatique Michael Dell siégeraient au conseil d'administration. Trump a laissé entendre que trois autres investisseurs « de premier ordre » faisaient également partie du groupe de propriétaires.

Un algorithme sous pavillon Oracle ?

Le projet de réorganisation de TikTok sur le sol américain ne se limite pas à une question d’actionnariat. Il s’agit aussi de savoir qui contrôle l’algorithme, c’est-à-dire la mécanique invisible qui détermine ce que des millions d’utilisateurs voient et partagent. Dans ce cadre, Oracle est pressenti pour gérer la sécurité des données et superviser ce fameux moteur de recommandation.

Le basculement est stratégique. Si l’opération aboutit, Oracle ne sera plus seulement un fournisseur de technologies critiques mais deviendra un acteur direct de la gouvernance numérique. Un rôle qui dépasse largement le cloud ou les bases de données, puisqu’il touche à l’architecture même de l’attention publique.

Aux États-Unis, la promesse de Donald Trump de « libérer TikTok des griffes de la Chine » se heurte à une réalité plus complexe. Si la plateforme américaine change bien de mains, avec Oracle et Silver Lake en première ligne, son cœur technologique — l’algorithme de recommandation — demeure sous contrôle chinois. Un paradoxe qui soulève des critiques virulentes et pose une question essentielle : qu’est-ce qu’un réseau social sans le code qui le fait tourner ? L’essence même de TikTok réside dans son algorithme de recommandation. C’est ce moteur d’analyse et de prédiction qui capte l’attention de millions d’utilisateurs, ajuste les vidéos proposées et transforme une simple application de partage en machine addictive.

Dans le cadre de l'accord visant à garantir l'avenir de l'application dans le pays, l'algorithme de TikTok, la technologie qui détermine ce que les utilisateurs voient dans leur fil d'actualité, sera copié et réentraîné à partir des données des utilisateurs américains. Un responsable de la Maison Blanche a déclaré que le système de recommandation de TikTok serait audité par le géant technologique Oracle et exploité par une nouvelle coentreprise impliquant des investisseurs américains afin de répondre aux exigences relatives à la vente de l'application.

Le vice-président JD Vance a déclaré que l'algorithme serait « sous le contrôle d'investisseurs américains », ajoutant que plus de détails seraient bientôt disponibles. Selon des informations publiées en début de semaine dernière, Oracle recréera l'algorithme de TikTok et fournira une nouvelle version américaine tout en garantissant la sécurité des données des utilisateurs.

« Cet accord permettra aux États-Unis de contrôler l'algorithme de l'application », a déclaré Vance. « En fait, elle sera entièrement gérée par des Américains. »


Enjeux et paradoxes : surveillance, influence, et pouvoir

Cette évolution met en lumière un paradoxe fondamental. D’un côté, le contrôle algorithmique peut être présenté comme un gage de sécurité nationale, censé protéger les données des utilisateurs d’influences étrangères. De l’autre, il ouvre la voie à une nouvelle forme de surveillance domestique, où les comportements en ligne seraient orientés non pas seulement par les goûts des utilisateurs, mais aussi par les choix techniques et politiques d’un consortium.

La prophétie d’Ellison — un monde où chacun se comporte bien sous l’œil constant d’un enregistrement permanent — n’apparaît plus comme une simple idée abstraite. Elle pourrait se traduire concrètement par des pratiques de modération et de filtrage intégrées au cœur même des plateformes sociales.

Cette concentration de pouvoir soulève des questions fondamentales pour les professionnels de l’informatique, pour les gouvernements, pour les citoyens.

L’instrumentalisation de la surveillance algorithmique

Si Oracle contrôle l’algorithme et les données de TikTok U.S., cela signifie qu’un acteur technologique — par définition non élu — peut exercer un levier sur ce que des centaines de millions d’utilisateurs voient, aiment, partagent. Le dispositif technique devient un instrument d’influence potentielle dans les débats publics. Le discours d’Ellison selon lequel « nous sommes constamment enregistrés » prend ici une dimension opérationnelle : la « surveillance » ne serait plus seulement visible dans la ville connectée (caméras, capteurs, drones, IA) mais dans la « ville des contenus », l’univers numérique même.

La gouvernance algorithmique comme nouvelle frontière du pouvoir

Traditionnellement, la sphère médiatique est régulée (ou du moins encadrée) par des lois, des normes, des organes de régulation. Mais dans la gouvernance algorithmique, les interventions se font par les paramètres internes (poids, signaux de modération, pondérations, biais, rétroaction) qui ne sont visibles qu’en partie ou pas du tout. Le défi pour l’ingénieur ou le chercheur : comment auditer ces systèmes, les rendre transparents, ou imposer des garde-fous ?

Le risque d’un échange entre surveillance étrangère et surveillance domestique

Une des critiques récurrentes du projet TikTok-Oracle est que l’on pourrait remplacer une surveillance chinoise (via ByteDance) par une surveillance américaine — voire un contrôle politique indirect — si le consortium est trop lié aux sphères gouvernementales. Le basculement de la gouvernance algorithmique pourrait créer un nouveau « fournisseur de vérité », où les décisions techniques (ce qui est priorisé, ce qui est amplifié) peuvent avoir des effets politiques.

Une gouvernance algorithmique aux répercussions politiques

Le fait de confier à une entreprise privée la responsabilité du moteur de recommandation d’un réseau social de masse soulève une question cruciale : qui définit ce qu’est le « bon comportement » ?

Dans une démocratie, les débats d’idées, la satire, l’expression contestataire sont autant de manifestations légitimes. Mais dans un environnement où les règles du jeu sont codées dans un algorithme opaque, le risque est que la conformité prenne le pas sur la diversité d’expression. Le code devient alors un outil politique, parfois plus influent que la loi elle-même.

Les responsabilités des professionnels de l’informatique

Pour les ingénieurs, chercheurs et décideurs IT, le défi n’est pas uniquement technique. Il s’agit de réfléchir aux conditions d’un contrôle équilibré, capable d’assurer à la fois la sécurité des données et le respect des libertés fondamentales.

Cela passe par la mise en place d’audits indépendants sur les algorithmes, par la création de mécanismes de transparence permettant d’expliquer les critères de recommandation, et par la défense d’architectures distribuées qui évitent de concentrer un tel pouvoir entre les mains d’un seul acteur.

Vers un nouvel équilibre entre technologie et société

L’entrée d’Oracle dans l’univers des médias sociaux marque une étape symbolique dans l’histoire des technologies numériques. Le passage d’un rôle purement infrastructurel à une influence directe sur le contenu et son agencement révèle à quel point la frontière entre technologie et politique s’estompe.

La vision d’Ellison sur le « meilleur comportement » sous surveillance pourrait se concrétiser, non par des caméras dans les rues, mais par des algorithmes invisibles dictant ce que nous voyons sur nos écrans. Pour les professionnels de l’informatique, l’enjeu est désormais clair : concevoir non seulement des systèmes performants, mais aussi des garde-fous pour préserver la diversité, la liberté et la confiance dans un espace numérique de plus en plus central dans nos vies.

Source : Oracle

Et vous ?

Un acteur privé comme Oracle doit-il avoir le pouvoir de superviser l’algorithme d’un réseau social fréquenté par des centaines de millions de citoyens ?

La surveillance algorithmique peut-elle réellement améliorer les comportements en ligne, ou ne fait-elle qu’instaurer une culture de conformité et de peur ?

Qui doit définir ce qu’est un « bon comportement » sur les réseaux sociaux : les gouvernements, les entreprises ou les utilisateurs eux-mêmes ?

Les professionnels de l’informatique doivent-ils être garants d’un droit à la transparence sur les algorithmes, au même titre qu’un droit fondamental ?

L’avenir des réseaux sociaux passera-t-il par des systèmes centralisés confiés à quelques géants, ou par des architectures distribuées ouvertes à tous ?
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