À l'approche de l'interdiction, le président brésilien Luiz Inácio Lula da Silva a apparemment fait ses adieux à ses adeptes de X en créant un lien vers ses autres comptes de médias sociaux, à commencer par Bluesky.
Qu’est-ce que Bluesky ?
Bluesky est une plateforme de médias sociaux décentralisée qui se présente comme une alternative à Twitter. Elle a été initialement soutenue par Jack Dorsey, le cofondateur de Twitter, et repose sur un nouveau protocole appelé AT Protocol (Authenticated Transfer Protocol). Bluesky a été lancé en 2021 et a rapidement attiré l’attention en tant qu’alternative plus éthique et sécurisée à Twitter. Initialement, l’accès à la plateforme se faisait sur invitation uniquement, ce qui a permis de contrôler la croissance et de tester l’infrastructure. En février 2024, Bluesky a ouvert ses portes à tous les utilisateurs sans restriction.
Bluesky se distingue par son approche décentralisée, ce qui signifie que les données des utilisateurs ne sont pas stockées sur des serveurs centralisés, mais réparties sur plusieurs nœuds. Cela offre plusieurs avantages :
- Sécurité et confidentialité : La décentralisation rend les attaques de données plus difficiles, car il n’y a pas de point de défaillance unique.
- Contrôle utilisateur : Les utilisateurs ont plus de contrôle sur leur expérience en ligne, y compris la modération du contenu et la gestion de leurs données personnelles.
- Résilience : En cas de panne ou d’attaque sur un nœud, les autres nœuds peuvent continuer à fonctionner normalement, assurant ainsi une meilleure continuité de service.
Depuis son lancement, Bluesky a connu une croissance rapide, atteignant plus de 4,9 millions d’utilisateurs en février 2024. La plateforme a gagné en popularité, bénéficiant notamment d'un coup de pouce inattendu : l’interdiction de X (anciennement Twitter) au Brésil, qui a poussé de nombreux utilisateurs à migrer vers Bluesky.
Malgré son succès initial, Bluesky fait face à plusieurs défis :
- Concurrence : Le marché des réseaux sociaux est très concurrentiel, avec des plateformes comme X, Threads et Mastodon.
- Toxicité : En s’ouvrant à un plus grand nombre d’utilisateurs, Bluesky risque de rencontrer les mêmes problèmes de toxicité que ses concurrents.
- Régulation : Les plateformes décentralisées devront également naviguer dans un paysage réglementaire complexe, notamment avec des lois comme le DSA en Europe
Contexte de l’interdiction de X
La décision de bannir X découle d’un conflit juridique entre la plateforme et la Cour suprême brésilienne. X a été accusé de ne pas avoir bloqué certains comptes diffusant de la désinformation électorale. En réponse, le juge Moraes a exigé que X nomme un représentant légal au Brésil, sous peine d’interdiction. Face à la non-conformité de X, l’interdiction a été mise en place, accompagnée de menaces de sanctions pour les utilisateurs tentant de contourner la restriction via des VPN.
Pour bloquer X, l'autorité brésilienne de régulation des télécommunications, Anatel, a demandé aux fournisseurs d'accès à internet de suspendre l'accès des utilisateurs à la plateforme de médias sociaux. Samedi, après minuit (heure locale), les principaux opérateurs avaient commencé à le faire.
Dans une interview accordée à la chaîne de télévision Globonews, le président de l'agence, Carlos Manuel Baigorri, a déclaré que l'ordre avait déjà été transmis aux fournisseurs d'accès à Internet. « Étant donné que nous parlons de plus de 20 000 entreprises, chacune d'entre elles aura son propre délai de mise en œuvre, mais [...] nous pensons que toutes les entreprises seront en mesure de mettre en œuvre le blocage au cours du week-end », a-t-il déclaré.
Dans un premier temps, le juge Moraes a également sommé Apple et Google de « mettre en place des barrières technologiques pour empêcher l'utilisation de l'application X par les utilisateurs des systèmes iOS et Android » et de bloquer l'utilisation des applications de réseaux privés virtuels (VPN). Quelques heures plus tard, le tribunal a rendu une deuxième ordonnance suspendant certaines des mesures prévues dans sa première ordonnance de 51 pages contre X. Le juge a notamment reporté la mise en œuvre de ces mesures « jusqu'à ce qu'il y ait une déclaration des parties [X et Musk] dans l'affaire, afin d'éviter toute perturbation potentielle inutile pour les sociétés tierces [Apple et Google] »
Mais ce n'est pas tout. En plus de la suspension de la plateforme, le juge de Moraes a imposé une amende quotidienne de 50 000 reais (~8 055 €) pour les personnes ou entreprises utilisant des VPN pour accéder à X pendant la période de suspension.
Cette décision a suscité des réactions mitigées, certains la voyant comme une mesure nécessaire pour faire respecter la loi, tandis que d’autres la considèrent comme une atteinte à la liberté d’expression. Quoiqu'il en soit, c'est sans doute elle qui a provoqué l'exode
L’ascension de Bluesky
La plateforme de microblogging a annoncé vendredi en fin de journée qu'elle enregistrait des « records d'activité » avec 500 000 nouveaux utilisateurs « au cours des deux derniers jours » puis « un million au cours des trois derniers jours ».
Elle est également numéro un du classement des applications iPhone gratuites au Brésil, juste devant Threads de Meta, qui occupe la deuxième place, selon les statistiques du baromètre Sensor Tower.
Notant ces classements, le PDG de Bluesky, Jay Graber, a écrit : « Bon travail au Brésil, vous avez fait le bon choix ».
Cette croissance est particulièrement impressionnante pour une plateforme qui n'a ouvert ses portes au public qu'en février et qui a reconnu avec humour sa petite taille (surtout par rapport à ses rivaux X et Threads) en se décrivant comme « le petit roi des applications sociales ». La société affirme qu'elle comptait plus de 6 millions d'utilisateurs en mai 2024. Désormais, elle en compte 7,6 millions.
Bluesky a été annoncé pour la première fois en 2019 comme une initiative soutenue par Twitter pour construire un protocole social ouvert et décentralisé. Elle est depuis devenue une société d'utilité publique indépendante, le fondateur de Twitter, Jack Dorsey, ayant quitté le conseil d'administration plus tôt cette année.
Concernant la modération, l'entreprise explique :
Notre approche de la modération comporte trois volets : le filtrage automatisé, les actions manuelles de l'administrateur et la labellisation de la communauté. Elle superpose de nouvelles approches de la modération à ce que font déjà les sites sociaux centralisés, et expose les rouages du système pour que tout le monde puisse les observer.
Le système d'étiquetage ouvert et composable que nous créons pour la modération permettra à quiconque de définir et d'appliquer des étiquettes à des contenus ou à des comptes, et laissera à chacun le choix de s'abonner à ces ensembles d'étiquettes. Les étiquettes peuvent être générées automatiquement ou manuellement, et peuvent être appliquées par n'importe quel service ou personne dans le réseau.
Le système d'étiquetage ouvert et composable que nous créons pour la modération permettra à quiconque de définir et d'appliquer des étiquettes à des contenus ou à des comptes, et laissera à chacun le choix de s'abonner à ces ensembles d'étiquettes. Les étiquettes peuvent être générées automatiquement ou manuellement, et peuvent être appliquées par n'importe quel service ou personne dans le réseau.
Le président brésilien Luiz Inácio Lula da Silva a également encouragé ses partisans à rejoindre Bluesky, partageant des liens vers ses autres profils de médias sociaux. Cette transition massive vers Bluesky soulève des questions sur l’avenir des plateformes de médias sociaux centralisées et sur la manière dont les utilisateurs réagissent aux régulations gouvernementales
Impact sur la liberté d’expression
L’interdiction de X au Brésil a suscité un débat intense sur la liberté d’expression. D’un côté, certains estiment que cette mesure est nécessaire pour lutter contre la désinformation et protéger l’intégrité des élections. De l’autre, des critiques affirment que cela constitue une atteinte à la liberté d’expression et un précédent dangereux pour la censure gouvernementale.
Régulation des réseaux sociaux
La question de la régulation des réseaux sociaux est au cœur de cette controverse. Les plateformes comme X sont souvent accusées de ne pas en faire assez pour modérer le contenu nuisible, tandis que d’autres soutiennent que trop de régulation peut étouffer la liberté d’expression. La montée en puissance de Bluesky, avec son modèle décentralisé, pourrait offrir une alternative intéressante en permettant aux utilisateurs de contrôler davantage leur expérience en ligne.
Sécurité et confidentialité
Les plateformes décentralisées comme Bluesky promettent une meilleure sécurité et confidentialité des données des utilisateurs. Contrairement aux plateformes centralisées, où les données sont souvent stockées sur des serveurs centralisés et peuvent être vulnérables aux violations de données, les plateformes décentralisées répartissent les données sur plusieurs nœuds, rendant les attaques plus difficiles.
Adoption de nouvelles plateformes
La migration vers une nouvelle plateforme de médias sociaux n’est pas sans défis. Les utilisateurs doivent s’adapter à une nouvelle interface, reconstruire leur réseau de contacts et s’habituer à de nouvelles fonctionnalités. Cependant, cette transition offre également des opportunités, comme la découverte de nouvelles communautés et la possibilité de participer à une plateforme en pleine croissance.
Influence politique
Les décisions politiques jouent un rôle crucial dans le choix des plateformes de médias sociaux par les utilisateurs. L’interdiction de X au Brésil montre comment les régulations gouvernementales peuvent influencer les comportements en ligne. Les utilisateurs sont de plus en plus conscients de l’impact des politiques sur leur liberté d’expression et leur vie privée, et sont prêts à changer de plateforme en fonction de ces régulations.
Conclusion
L’interdiction de X au Brésil a non seulement perturbé le paysage des médias sociaux dans le pays, mais a également offert une opportunité unique à Bluesky de se positionner comme une alternative viable. Cette situation met en lumière les tensions entre régulation gouvernementale et liberté d’expression, tout en ouvrant la voie à des discussions sur l’avenir des réseaux sociaux.
Sources : BlueSky (1, 2, 3), Sensor Tower
Et vous ?
Pensez-vous que l’interdiction de X au Brésil constitue une atteinte à la liberté d’expression, ou est-ce une mesure nécessaire pour lutter contre la désinformation ?
Quelle devrait être la responsabilité des plateformes de médias sociaux dans la régulation du contenu ? Les gouvernements devraient-ils avoir plus de contrôle ?
Quels sont les défis et les opportunités pour les utilisateurs qui migrent vers une nouvelle plateforme comme Bluesky ?
Comment les plateformes décentralisées comme Bluesky peuvent-elles garantir la sécurité et la confidentialité des utilisateurs par rapport aux plateformes centralisées ?
Dans quelle mesure les décisions politiques influencent-elles votre choix de plateforme de médias sociaux ? Seriez-vous prêt à changer de plateforme en fonction des régulations gouvernementales ?
Comment voyez-vous l’évolution des médias sociaux dans les prochaines années avec l’émergence de plateformes décentralisées ?