Michael Atleson, un avocat de la Federal Trade Commission (FTC) des États-Unis, s'en est pris aux milliardaires de la Silicon Valley qui apportent leur soutien à la candidature de Donald Trump à l'élection présidentielle américaine de novembre prochain. Il a récemment publié un billet de blogue dans lequel il dénonce les entreprises qui utilisent l'IA à mauvais escient pour voler, tromper ou frauder. Selon certains analystes, il s'agit d'un indicateur révélateur de la raison pour laquelle nous assistons à une ruée de milliardaires de la technologie qui injectent de l'argent et de l'aide dans la campagne de l'ancien président américain.
À en croire certains critiques dans la communauté, l'escroquerie s'installe de plus en plus dans l'industrie technologique. L'innovation réelle s'est considérablement ralentie ces dernières années, menaçant de réduire les profits faramineux du début du siècle. Pour remplacer ces revenus, les dirigeants du secteur technologique se tournent de plus en plus vers des produits surfaits, voire carrément frauduleux, comme en témoigne l'effondrement de la bourse de cryptomonnaies FTX (et l'emprisonnement de son fondateur). Selon eux, l'administration Biden a fait de la lutte contre la fraude à la consommation une priorité absolue.
Pour Amanda Marcotte, rédactrice politique senior pour le webzine Salon, plutôt que de réduire "les comportements douteux", l'industrie technologique se tourne vers Donald Trump, un homme dont toute la carrière commerciale a été bâtie sur la fraude, pour la sauver. Atleson dénonce notamment les surenchères successives dont les capacités de l'IA font l'objet. Il estime que l'interaction entre l'homme et la machine devient de plus en plus bizarre en raison de l'émergence de toute une gamme de produits d'IA qui tendent à manipuler les gens ou à les exploiter plutôt que de les aider réellement. Il écrit dans son billet de blogue :
Envoyé par Michael Atleson
- ne donnez pas une fausse image de ce que sont ces services ou de ce qu'ils peuvent faire : vos robots thérapeutiques ne sont pas des psychologues diplômés, vos petites amies d'IA ne sont ni des filles ni des amies, vos "griefbots" n'ont pas d'âme et vos assistants d'IA ne sont pas des dieux ;
- n'offrez pas ces services sans atténuer de manière adéquate les risques de résultats nuisibles : c'est un choix de conception délibéré que de proposer des robots et des avatars qui fonctionnent comme s'ils étaient humains. Nous avons vu que ce choix comporte des risques inhérents en matière de manipulation et d'incitation des consommateurs à faire des choix préjudiciables ;
- n'insérez pas de la publicité dans une interface de discussion sans préciser qu'il s'agit d'un contenu payant : il est probable que de plus en plus de publicités se glisseront dans les résultats que les consommateurs obtiennent lorsqu'ils interagissent avec divers services d'IA générative ;
- n'utilisez pas les relations des consommateurs avec les avatars et les robots à des fins de manipulation commerciale : une entreprise offrant un service anthropomorphique ne doit pas non plus manipuler les gens par l'intermédiaire des liens tissés avec ce service, notamment en les incitant à payer pour des services supplémentaires ou en les orientant vers des entreprises affiliées ;
- ne violez pas le droit à la vie privée des consommateurs : ces avatars et robots peuvent collecter ou déduire un grand nombre d'informations extrêmement personnelles. En effet, certaines entreprises présentent comme une caractéristique de ces services d'IA leur capacité à tout savoir sur nous.
Atleson se pose aussi cette question : « est-il possible que les entreprises finissent par développer tous ces services d'une manière qui ne mérite pas l'attention de la FTC ? Nous avons posé cette question à notre boule magique. Sa réponse : "les perspectives ne sont pas très bonnes ». Les avertissements d'Atleson sont considérés comme des vœux pieux par certains critiques. Toutefois, Marcotte a déclaré que le durcissement du ton par la FTC est l'une des raisons à l'origine du virage à droite de la classe dirigeante de la Silicon Valley. Les PDG de la Silicon Valley se sentiraient plus en sécurité avec le programme de Donald Trump.
L'ancien président s'est rendu à San Francisco au début du mois pour courtiser un groupe restreint d'entrepreneurs de la Tech qui adoptent le programme de Donald Trump qui serait favorable aux entreprises, en opposition à la politique du président Joe Biden et des démocrates. La collecte de fonds de 300 000 dollars par personne, organisée dans le manoir du milliardaire en capital-risque David Sacks à Pacific Heights, comprenait de nombreux membres de l'élite de la Silicon Valley qui se sont montrés hostiles à l'approche de Biden en matière d'application de la législation antitrust, d'IA, de cryptomonnaies, et bien d'autres.
Le coanimateur Chamath Palihapitiya, un ancien cadre de Facebook devenu investisseur en technologie qui a longtemps vanté les mérites du secteur des monnaies numériques, s'est exprimé de manière positive sur l'ancien président dans un podcast. « Ces dernières semaines, le président Trump est devenu incroyablement procryptomonnaie », a-t-il déclaré. Selon les analystes, l'une des différences clés entre cette nouvelle cohorte et la classe ultra-riche de la Silicon Valley (qui a traditionnellement essayé de façonner la réglementation des entreprises) est leur volonté de s'affranchir de la réglementation sur d'autres questions.
L'accélération rapide de l'IA a mis les démocrates, qui souhaitent la contenir, en porte-à-faux avec les dirigeants du secteur technologique les plus réfractaires à la réglementation. Au début du mois, l'on a appris que les autorités fédérales préparent des enquêtes antitrust sur Nvidia, Microsoft et OpenAI, les plus principaux acteurs qui développent l'IA. Cette initiative a été menée en partie par Lina Khan, la présidente de la FTC nommée par le président Joe Biden. Cette dernière a exprimé pendant des mois son désir d'éliminer ce qu'elle considère comme des pratiques anticoncurrentielles potentielles dans la Silicon Valley.
La semaine dernière, la FTC a poursuivi Adobe pour avoir dissimulé des frais et rendu impossible l'annulation des abonnements. Tout cela intervient alors que les Big Tech tentent de renforcer leurs défenses en Californie, cherchant à lutter contre les tentatives des législateurs démocrates de dompter l'IA avec de nouvelles politiques sur l'évaluation des risques, la responsabilité et la transparence. Dans son podcast, Sacks a déclaré que Donald Trump bénéficie d'un large soutien dans la Silicon Valley et qu'il espérait que son événement encouragerait d'autres personnes à s'exprimer. Marcotte a écrit dans un article :
Envoyé par Amanda Marcotte
Ce comportement les pousserait à soutenir l'élection de Donald Trump, car le programme de l'ancien président en matière de réglementation serait plus laxiste et plus favorable aux entreprises technologiques. Bien que l'analyse de Marcotte soit partagée par de nombreux internautes, elle fait également l'objet de beaucoup de critiques, notamment sur sa pertinence.
Source : Michael Atleson, avocat de la FTC
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Y a-t-il des chances que les grandes entreprises technologiques tiennent compte de ces mises en garde ?
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Les Big Tech américains sont-ils devenus plus grands et plus puissants que les instances de régulation ? Faut-il les démanteler ?
Quelles sont vos prédictions sur l'avenir de l'industrie technologique à court, moyen et long terme ? Quels seraient les impacts de l'IA ?
L'IA tiendra-t-elle un jour ses promesses ? Les régulateurs américains doivent-ils bannir certains cas d'utilisation de l'IA comme l'a fait l'UE ?
Partagez-vous l'argument selon laquelle la Silicon Valley soutient Trump en raison de son programme prétendument favorable aux escrocs ?
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