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TikTok en Nouvelle-Calédonie : le Conseil d'État maintient le blocage du réseau social malgré les appels à la suspension
Notant que le blocage est à la fois limité et temporaire

Le , par Stéphane le calme

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Le Conseil d’État a tranché sur le sort de TikTok en Nouvelle-Calédonie, maintenant le blocage du réseau social malgré les appels à la suspension. Cette mesure, initialement mise en place par le gouvernement local, a été contestée par des associations et des particuliers qui ont saisi le juge des référés du Conseil d’État. Ce dernier estime que les requérants n’apportent pas d’éléments pour démontrer que ce blocage a des conséquences immédiates et concrètes sur leur situation et leurs intérêts, ce qui est une « condition d’urgence » nécessaire pour l’intervention du juge des référés. Dans un contexte où tous les autres réseaux sociaux et médias presse, TV et radio restent accessibles, et parce que ce blocage temporaire vise à contribuer au rétablissement de la sécurité sur l’archipel, le juge des référés a rejeté la demande des requérants.

La Nouvelle-Calédonie a été le théâtre de troubles graves à l’ordre public, avec des attaques et des destructions de bâtiments publics, d’infrastructures et de commerces, entraînant un bilan humain lourd. En réponse à ces événements, le gouvernement a déclaré l’état d’urgence et a pris la décision de bloquer l’accès à TikTok, arguant de l’utilisation du réseau social dans le cadre des violences.

La Ligue des droits de l’Homme, la Quadrature du Net et trois habitants de Nouvelle-Calédonie avaient déposé un recours en référé-liberté le 17 mai, estimant que ce blocage portait une atteinte grave aux libertés de communication et d’information.

Arguments du Conseil d’État

Le Conseil d’État a jugé que les requérants n’avaient pas apporté d’éléments suffisants pour démontrer que le blocage avait des conséquences immédiates et concrètes sur leur situation et leurs intérêts. De plus, il a été noté que le blocage était à la fois limité et temporaire, avec un engagement du gouvernement à lever cette mesure dès que les troubles cesseraient :

« Dans cette affaire, les requérants se bornent à soutenir qu’il existe une atteinte aux libertés d’expression et de communication, mais n’apportent aucun élément justifiant de l’urgence. Ils estiment en effet qu’on se trouverait dans une hypothèse où l’atteinte aux libertés est suffisamment grave pour que soit reconnue une présomption d’urgence, c’est-à-dire où l’urgence n’aurait pas besoin d’être démontrée. Le juge des référés constate toutefois que la mesure de suspension du réseau social en cause est limitée, l’ensemble des autres moyens de communication et d’information n’étant pas affecté, et temporaire, le Gouvernement s’étant engagé à lever immédiatement ce blocage dès que les troubles auront cessé.

« En l’absence d’éléments démontrant des conséquences immédiates et concrètes pour la situation ou les intérêts des requérants, et compte tenu de l’intérêt public qui s’attache au rétablissement de la sécurité et de la tranquillité publiques, le juge des référés du Conseil d’État rejette la demande de suspension du blocage de TikTok en Nouvelle-Calédonie ».


Réactions et Conséquences

La décision a suscité des réactions mitigées. D’un côté, elle a été perçue comme une atteinte aux libertés d’expression et de communication. De l’autre, elle a été vue comme une mesure nécessaire pour rétablir la sécurité et l’ordre public. Les autres réseaux sociaux et médias restent accessibles, ce qui atténue l’impact de cette interdiction sur la liberté de communication.

Les Sages ont aussi rejeté la demande des requérants « pour défaut d’urgence ». « Il s’agit d’une décision consternante qui n’est pas à la hauteur des enjeux. Au vu de l’utilisation du réseau social et du caractère sans précédent de cette mesure, il est impensable de considérer que l’urgence n’est pas caractérisée », a commenté l’avocat des requérants calédoniens, maître Vincent Brengarth.

Lors d’une audience houleuse mardi, la représentante du gouvernement avait mis en avant « la forte adéquation » du profil et de l’âge des émeutiers avec ceux des utilisateurs de la plateforme, afin de justifier son blocage, qui doit durer jusqu’au retour au calme.

Les requérants, eux, avaient unanimement dénoncé « l’absence d’éléments concrets qui prouvaient le lien présumé entre l’utilisation de TikTok et les violences », notamment des extraits de contenus issus du réseau social. Le juge des référés avait accordé un délai supplémentaire de 24 heures au gouvernement pour verser des preuves au dossier, par exemple des captures d’écran.

Les associations avaient également pointé l’absence de fondement légal solide et le caractère disproportionné du blocage.

Sur X/Twitter, La Quadrature du Net, l’association de défense des droits et des libertés sur internet, qui faisait partie des requérants, a regretté cette décision :

« Le Conseil d’État vient de rendre sa décision sur le blocage de Tiktok : il rejette nos demandes et celles des autres requérant·es pour absence d'urgence. Cette décision est extrêmement inquiétante.Pour le Conseil d’État, le fait que d'autres moyens de communications et médias restent accessibles en Nouvelle-Calédonie permettrait de tempérer l'atteinte aux libertés. Il nie donc la gravité qu'il y a à bloquer un réseau social de façon aussi disproportionnée et arbitraire.

« En 2024, il est donc possible de couper un réseau social sur tout un territoire alors qu'il s'agit du moyen de communication principal d'une partie de la population, en l'occurrence la jeunesse, sans preuve ou raison apportée et que le Conseil d’État n'y voie rien d'urgent. Par ce jugement, il valide en creux le réflexe autoritaire de Macron et Attal de s'en prendre aux moyens de communication lors de moments de crise. L'état des considérations de nos institutions pour les libertés fondamentales est terrifiant ».

[TWITTER]<blockquote class="twitter-tweet"><p lang="fr" dir="ltr">En 2024, il est donc possible de couper un réseau social sur tout un territoire alors qu&#39;il s&#39;agit du moyen de communication principal d&#39;une partie de la population, en l&#39;occurrence la jeunesse, sans preuve ou raison apportée et que le Conseil d’État n&#39;y voie rien d&#39;urgent.</p>&mdash; La Quadrature du Net (@laquadrature) <a href="https://twitter.com/laquadrature/status/1793680733921546718?ref_src=twsrc%5Etfw">May 23, 2024</a></blockquote> <script async src="https://platform.twitter.com/widgets.js" charset="utf-8"></script> [/TWITTER]

Perspective Juridique

Pour justifier le blocage de TikTok, ne pouvant recourir à la loi du 3 avril 1955 relative à l'état d'urgence, qui ne permet le blocage d'un site ou d'un réseau qu'en cas de provocation « à la commission d'actes de terrorisme ou en faisant l'apologie », le gouvernement s'est fondé sur la « théorie des circonstances exceptionnelles », jurisprudence permettant à l'administration de s'affranchir du droit en période de crise, dont l'usage a été validé par le Conseil d'État lors de la pandémie de Covid-19. Cette mesure d'interdiction du réseau social est également intervenue sur fond de crainte d'ingérences et de désinformation sur les réseaux sociaux de pays étrangers qui chercheraient à attiser les tensions, avaient encore justifié des sources gouvernementales et de sécurité, évoquant la Chine ou l'Azerbaïdjan.

Cet outil de la « théorie des circonstances exceptionnelles » semble désormais être un outil juridique reconnu en cas de crise.

Conclusion

La décision du Conseil d’État de maintenir le blocage de TikTok en Nouvelle-Calédonie souligne la tension entre la sécurité publique et les libertés individuelles. Alors que le débat sur l’équilibre entre ces deux impératifs continue, cette affaire pourrait devenir un précédent important pour l’avenir de la régulation des réseaux sociaux en période de crise. Il faut rappeler qu'il est possible de contourner le blocage en passant par un VPN.

Source : Conseil d’État

Et vous ?

Quelle est votre opinion sur la décision du Conseil d’État de maintenir le blocage de TikTok en Nouvelle-Calédonie ?
Pensez-vous que le blocage de TikTok est une mesure efficace pour prévenir les troubles à l’ordre public ?
Comment équilibrez-vous la sécurité publique et les libertés individuelles dans des situations de crise ?
Les réseaux sociaux devraient-ils être tenus responsables des contenus qui contribuent aux troubles sociaux ?
Existe-t-il des alternatives au blocage complet d’un réseau social pour gérer les crises ?
Comment les citoyens peuvent-ils s’assurer que leurs droits à la liberté d’expression sont protégés même en période de crise ?
Le recours à la « théorie des circonstances exceptionnelles » par le gouvernement est-il justifié dans ce cas ?
Quel rôle les utilisateurs de réseaux sociaux comme TikTok devraient-ils jouer pour prévenir la propagation de la violence ?

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