La Federal Trade Commission (FTC) des États-Unis tente de rendre "plus facile et moins obscure" l'annulation des abonnements aux services numériques avec le projet de règles "Click To Cancel", mais les entreprises telles que Disney et Netflix s'y opposent farouchement. Des groupes défendant les intérêts de ces entreprises ont déclaré à la FTC qu'un simple bouton "cliquer pour annuler" permettant de résilier facilement les abonnements pourrait en fait conduire les clients à manquer de nouvelles offres intéressantes. Mais encore, d'autres ont même déclaré que certains clients "idiots ou stupides" pourraient annuler accidentellement leur abonnement si c'est trop facile.
La FTC a proposé cette année le projet de règles "Click To Cancel" visant à obliger les entreprises à offrir à leurs clients des options de résiliation d'abonnement en un seul clic. Des entreprises de plusieurs horizons ont provoqué la colère des consommateurs en proposant des services auxquels il est trop facile de s'inscrire, mais qu'il est souvent très difficile d'annuler, les salles de sport et les organes de presse étant considérés comme les pires contrevenants. Amazon Prime est aussi utilisé comme un exemple canonique du problème. L'entreprise incite les utilisateurs à s'abonner à son service, puis rend l'annulation presque impossible pour l'internaute moyen.
La FTC a récemment poursuivi Amazon, alléguant que le détaillant électronique a trompé les consommateurs en les incitant à s'inscrire à Amazon Prime et en élaborant des interfaces utilisateurs obscures pour saboter leurs tentatives de résiliation. « Amazon a trompé et piégé des personnes dans des abonnements récurrents sans leur consentement, ce qui a frustré non seulement les utilisateurs, mais leur a aussi coûté beaucoup d'argent », a déclaré Lina Khan, présidente de la FTC des États-Unis, dans un communiqué de presse. Par conséquent, la proposition de la FCT peut sembler aller de soi, et être sans équivoque bénéfique pour les consommateurs.
Toutefois, ce n'est pas le cas des entreprises concernées. Selon elles, l'introduction de boutons de désabonnement simples pourrait entraîner une vague d'annulations accidentelles de la part de clients stupides. Il vaut mieux, selon eux, laisser les grandes entreprises protéger les clients contre eux-mêmes et faire en sorte que l'arrêt de leur service soit un supplice. Il s'agit là de quelques-uns des arguments avancés par les groupes représentant les principaux éditeurs et annonceurs au cours de la récente période de consultation publique de la FTC, qui s'est achevée en juin. L'opposition comprend les traditionnels de l'industrie d'Hollywood comme Disney.
Elle comprend également les intrus technologiques comme Netflix et d'autres entreprises concernées. « Je ne peux pas vous dire combien de temps j'ai passé à essayer d'annuler des abonnements dont je n'ai jamais voulu, sans parler du coût », a écrit une personne dans un commentaire adressé à la FTC. Les consommateurs semblent enthousiastes à l'égard de la proposition qui, selon ses partisans, pourrait mettre un terme aux tactiques anti-annulation délicates, voire trompeuses, déployées par les sites de divertissement, les salles de sport et d'autres entreprises qui s'ingénient à rendre aussi difficile que possible la résiliation rapide d'un abonnement.
Le projet de règles exigerait des entreprises qu'elles proposent un mécanisme simple permettant aux utilisateurs de résilier leur abonnement de la même manière qu'ils se sont inscrits. Par exemple, il ne serait pas nécessaire d'annuler un service en personne ou par téléphone si vous l'avez souscrit en ligne. La proposition arrive à un moment précaire pour l'industrie du divertissement. Les distributeurs de Hollywood comptent sur la diffusion en direct pour les sauver du déclin de l'offre groupée du câble. Mais le modèle dépend de l'adhésion et de la fidélisation des abonnés, et les consommateurs ont pris l'habitude de souvent résilier leurs abonnements.
D'après une enquête de Deloitte, 44 % des personnes interrogées ont déclaré avoir annulé un abonnement à un service de diffusion en direct au cours des six derniers mois, le niveau le plus élevé depuis près de cinq ans que Deloitte suit le taux de désabonnement. La lutte contre le désabonnement est donc devenue une priorité pour le secteur. Dans les commentaires soumis à la FTC le mois dernier, la News/Media Alliance, un groupe d'intérêt représentant les éditeurs, a tenté de réfuter ces clients. L'Alliance affirme que ses membres reçoivent en fait "très peu de plaintes" concernant les annulations. Pour elle, les difficultés dont on parle n'existent pas.
Selon l'Association of National Advertisers, qui représente égalent des éditeurs, les consommateurs pourraient en fait tirer profit d'une friction d'annulation gênante. « Si les entreprises sont tenues de permettre l'annulation par un simple clic ou une action du consommateur, les annulations accidentelles deviendront beaucoup plus fréquentes, car les consommateurs ne s'attendront pas raisonnablement à supprimer leurs biens ou services récurrents d'un simple clic », a déclaré l'association dans un communiqué. En d'autres termes, les clics et les connexions lourds et laborieux pour se défaire d'un service sont en fait là pour vous protéger.
« Si ces alertes supplémentaires "êtes-vous sûr de vouloir vous désabonner ?" n'apparaissaient pas, ou si les clients n'étaient pas obligés de se rendre en personne à la salle de sport pour annuler le service, les utilisateurs à la vue courte et au cerveau de lézard pourraient accidentellement passer à côté d'une nouvelle offre ou d'une promotion », ont déclaré les entreprises. Un groupe commercial de jeux vidéo, l'Entertainment Software Association, a également envoyé un commentaire critiquant vivement les propositions de la FTC, arguant que cela pourrait interférer avec sa capacité à suggérer des paiements récurrents au milieu d'un jeu vidéo.
« Ces méthodes sont à la fois raisonnables et simples, conçues pour être efficaces et réduire la frustration des clients, mais elles semblent être interdites par le projet de règles parce qu'elles ne sont pas symétriques par rapport à l'expérience d'inscription », a écrit l'association. L'Internet & Television Association - qui compte Disney, Paramount et Warner Bros. Discovery parmi ses membres - a déclaré dans son commentaire public que le règlement proposé par la FTC était si vague qu'il conduirait les professionnels du marketing à être excessifs dans leurs divulgations, laissant les consommateurs "inondés" et "confus". Mais ce n'est pas tout.
Selon le groupe, la proposition porterait même atteinte à la liberté d'expression de ses membres. « La proposition restreindrait considérablement la liberté d'expression en interdisant dans certains cas aux entreprises de communiquer avec leurs clients, en violation du premier amendement », a-t-il écrit. Mais selon la FTC, la proposition "Click To Cancel" permettrait de libérer les clients d'une "option négative" qui n'est rien d'autre qu'un moyen de continuer à les faire payer pour des services dont ils ne veulent plus. La FTC a également suggéré une proposition qui obligerait les entreprises à mieux informer les clients lorsqu'ils s'inscrivent à un service payant.
La vision du paysage qu'ont les groupes commerciaux semble complètement déconnectée des réalités quotidiennes de nombreux consommateurs. Une récente étude de ConsumerAffairs a trouvé des centaines d'avis d'une étoile en ligne pour un large éventail d'entreprises, du site de rencontres eHarmony à Adobe, tous contenant des déclarations cinglantes de clients se plaignant de la difficulté à se désabonner. L'écrasante majorité des commentaires sur la page de commentaires publics de la FTC comprenait des histoires d'horreur d'utilisateurs essayant désespérément, parfois pendant des mois, d'annuler des abonnements non désirés.
Les tactiques de blocage des entreprises ne sont pas particulièrement nouvelles, mais l'augmentation massive des abonnements en ligne auxquels les consommateurs ont régulièrement souscrit ces dernières années rend le problème beaucoup plus omniprésent. Selon les données de Statista partagées avec le média CNBC, en 2020, le Millennial moyen disposait d'au moins 17 abonnements différents aux médias et aux divertissements. En outre, une autre enquête menée par la Chase Bank auprès d'adultes américains a révélé que 71 % des Américains gaspillent au moins 50 dollars par mois en frais d'abonnement non désirés.
L'augmentation des services d'abonnement et des expériences d'annulation foireuses est l'une des raisons pour lesquelles la FTC a fait cette proposition au mois de mars. « Certaines entreprises incitent trop souvent les consommateurs à payer pour des abonnements dont ils ne veulent plus ou qu'ils n'ont pas souscrits au départ. La proposition permettrait aux consommateurs d'économiser du temps et de l'argent, et les entreprises qui continueraient à utiliser des astuces et des pièges liés aux abonnements seraient soumises à de lourdes sanctions », a déclaré Lisa Khan, commissaire de la FTC, dans un communiqué.
Sources : la proposition "Click To Cancel" de la FTC, les commentaires recueillis sur la proposition de la FTC
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Le , par Mathis Lucas
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