De nombreuses entreprises américaines disposant de plateformes en ligne, dont Meta et Google, se seraient mises d'accord pour créer une alliance visant à lutter contre la désinformation. Baptisée "Misinformation Combat Alliance", l'alliance aurait été créée dans un premier temps pour répondre à une demande du gouvernement indien, mais devrait finalement étendre son champ d'action à l'échelle mondiale. L'initiative est bien accueillie par certains et est critiquée par d'autres. Dans le cas de l'Inde, en particulier, elle est accusée de vouloir faire taire les voix dissidentes et donner le pouvoir au gouvernement de contrôler le discours en ligne.
Le problème de la désinformation en ligne commence à devenir très préoccupant et les plateformes de médias sociaux favorisent grandement sa propagation. Bien que diverses formes de propagande existent depuis des lustres, les infox sont devenues une menace majeure avec l'avènement des réseaux sociaux, en partie en raison de la facilité de création, de diffusion et de consommation des contenus. En fait, de fausses histoires ou trompeuses peuvent être facilement créées et diffusées à travers les réseaux mondiaux en ligne - en quelques clics. Les fausses histoires font partie des flux personnalisés et sans fin que les gens consomment quotidiennement.
Et ce qui aggrave le problème, c'est qu'un pourcentage important des utilisateurs de médias sociaux ont tendance à consommer du contenu facilement et à le partager mécaniquement, sans l'esprit critique nécessaire. En Inde, le ministère des Technologies de l'information a apporté jeudi de nouveaux amendements aux règles sur les technologies de l'information de 2021, en vertu desquels il mettra en place une unité de vérificateurs de faits pour agir sur les infox liées au gouvernement. Et dans la foulée, les principales plateformes de médias sociaux, dont Meta et Google, auraient fait une proposition à l'Inde pour soutenir cette initiative.
The Indian Express rapporte que cette proposition détaille leurs projets de création d'un réseau de vérificateurs de faits qui vérifieront les contenus douteux postés sur leurs plateformes. Le réseau est baptisé Misinformation Combat Alliance. La proposition de cinq pages indique que l'alliance agira comme un organisme de certification qui vérifiera qui est un vérificateur de faits "digne de confiance". Ces derniers se chargeront ensuite de vérifier les contenus jugés "douteux". Selon plusieurs critiques, il est certain que ce réseau - s'il est créé - ne sera habilité qu'à vérifier les informations qui ne provienne pas ou qui ne sont pas liées au gouvernement indien.
« L'industrie a envoyé à MeitY une proposition sur la manière dont elle souhaite créer un réseau d'autorégulation de vérificateurs de faits pour les informations qui ne sont pas liées au gouvernement central. Les plateformes proposent de créer un réseau de vérificateurs de faits indiens et étrangers dans le cadre de l'Alliance de lutte contre la désinformation », a déclaré un haut fonctionnaire du gouvernement, qui a requis l'anonymat étant donné que les discussions en sont à un stade préliminaire. Dans les faits, les plateformes de médias sociaux font déjà appel à un certain nombre de vérificateurs de faits reconnus par diverses institutions.
Par exemple, Meta travaille avec des vérificateurs de faits certifiés par l'International Fact-Checking Network (IFCN), qui a été créé en 2015 à l'Institut Poynter, basé aux États-Unis. Les membres de l'IFCN examinent et évaluent l'exactitude des articles par le biais de reportages originaux, qui peuvent inclure des entretiens avec des sources primaires, la consultation de données publiques et l'analyse de médias, y compris de photos et de vidéos. Bien qu'un certain nombre de médias indiens fassent partie du réseau de l'IFCN, le gouvernement ne souhaiterait pas qu'un réseau basé ailleurs dans le monde agisse sur le contenu émanant du pays.
Il souhaite au contraire mettre en place un réseau national de vérificateurs de faits. Sur ce point, les critiques accusent le gouvernement indien de vouloir contrôler le discours en ligne en qualifiant tout ce qu'il ne lui plait pas de désinformation et en censurant la voix des opposants ou des dissidents. « Il semble qu'il y ait un sérieux problème de confusion entre opinion et désinformation. Ceux qui n'aiment pas une opinion la qualifient de désinformation, puis demandent qu'elle soit retirée et que la ou les personnes qui ont une opinion opposée soient punies. Cela ne va pas bien se passer si l'on continue dans cette voie », a écrit un critique.
Il note que l'alliance ne servira qu'à promouvoir le récit des gouvernements et réduire la portée des sources d'informations alternatives. « Pour ceux qui ne savent pas ou ne comprennent pas de quoi il s'agit réellement, Google et Meta vont essentiellement laisser le régime Modi dicter ce qui est considéré comme de la désinformation en Inde. Une fois qu'ils auront gagné la confiance du grand public, comme c'est déjà le cas pour la plupart d'entre eux, leurs discussions seront considérées comme définitives et tout le monde sera forcé d'y croire », a écrit un autre critique. D'autres pensent toutefois que le problème est beaucoup plus nuancé que cela.
« Si ces entreprises ne s'attaquent pas au problème à un niveau plus élevé, le problème se poursuivra exactement de la même manière. L'alternative serait un contrôle gouvernemental, une chose généralement impopulaire, et quelque chose que les entreprises seront heureuses de payer les amendes des répercussions plutôt que de changer leurs tactiques de profit », indique un autre. Tout porte à croire qu'il est difficile de trouver un consensus sur la façon de lutter contre la désinformation en ligne. En Inde particulièrement, la désinformation est un problème majeur, notamment en raison de la diversité de sa population et d'autres facteurs.
Cela serait également dû au fait qu'une grande partie de la population commence tout juste à accéder à Internet. L'Inde est également l'un des plus grands marchés pour les grandes plateformes de médias sociaux comme Facebook, WhatsApp et YouTube, qui comptent collectivement des centaines de millions d'utilisateurs actifs. Selon une étude publiée en 2021, l'Inde est le pays qui a produit le plus grand nombre d'informations erronées sur la Covid-19 en raison de son taux de pénétration de l'Internet plus élevé, de l'augmentation de la consommation des médias sociaux et du manque de connaissances des utilisateurs en matière d'Internet.
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Mais l'initiative ne fait pas l'unanimité dans la communauté
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Le , par Bill Fassinou
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