Shopify a passé l'année dernière à réduire ses coûts. Maintenant, elle réduit les réunions. Alors que les employés reviennent de leurs vacances, Shopify a déclaré qu'il procédait à une "purge du calendrier", à travers différentes mesures. Le mail annonçant la nouvelle aux employés a été envoyé par le directeur des opérations (COO) de Shopify, Kaz Nejatian. Il aurait décrit les nouvelles mesures comme une "soustraction utile" et a ajouté qu'elles visaient à libérer du temps pour les employés. Elles interviennent après que de nombreuses entreprises technologiques ont connu une forte augmentation du nombre de réunions pendant la pandémie.
Dans le cadre de son annonce, Shopify a déclaré qu'il supprimerait près de 10 000 événements des calendriers des employés, libérant ainsi plus de 76 500 heures. En fait, Shopify envisage de supprimer toutes les réunions récurrentes de plus de deux personnes "à perpétuité", tout en réitérant la règle selon laquelle aucune réunion ne peut avoir lieu le mercredi. Les grandes réunions de plus de 50 personnes seront regroupées dans un créneau de six heures le jeudi, avec une limite d'une par semaine. Les dirigeants de l'entreprise encourageront également les travailleurs à refuser d'autres réunions et à se retirer des grands groupes de discussion internes.
« La meilleure chose que les fondateurs puissent faire est la soustraction. Il est beaucoup plus facile d'ajouter des choses que de les supprimer. Si vous dites oui à une chose, vous dites en fait non à toutes les autres choses que vous auriez pu faire pendant cette période de temps. Au fur et à mesure que les gens ajoutent des choses, l'ensemble des choses qui peuvent être faites se réduit. On se retrouve alors avec de plus en plus de personnes qui se contentent de maintenir le statu quo », explique le directeur général de Shopify, Tobi Lutke, qui a cofondé l'entreprise. Ce changement fait également suite à une année difficile pour Shopify.
L'entreprise a supprimé 10 % de son personnel l'année dernière après avoir admis avoir fait le "mauvais" pari sur la durée du boom des achats en ligne, alimenté par la pandémie. Selon des analystes, la réduction des réunions pourrait contribuer à rendre l'entreprise plus efficace tout en remontant le moral de certains travailleurs. « Personne n'a rejoint Shopify pour assister à des réunions », écrit Nejatian. Une fois le gel des horaires de deux semaines terminé, Nejatian a déclaré que les employés devraient "à l'avenir, se montrer très critiques" sur ce qui figure dans leur calendrier. En outre, Shopify préconise une "zone de non-jugement".
L'entreprise encourage également les employés à annuler les réunions comme ils le souhaitent. Shopify s'attaque également à la façon dont les employés utilisent les outils de communication sur le lieu de travail. La société a déclaré que l'utilisation de Slack par ses employés peut être "gonflée, bruyante et distrayante". Pour aller de l'avant, Shopify aurait réparti la communication interne entre Slack et l'outil Workplace de Meta pour être "super intentionnel" sur la façon dont les employés reçoivent et partagent les différents types d'informations. L'entreprise encourage également les employés à quitter les grands et distrayants groupes Slack.
Ces dernières années, et notamment pendant la pandémie de la Covid-19, les réunions en entreprise sont devenues le sujet de débats récurrents entre les employés sur les sites communautaires. Pour un grand nombre d'employés, "ces réunions sont pour la plupart "inutiles" et constitueraient une perte de temps". Ils proposent que les entreprises les suppriment presque entièrement. Selon certains avis, le problème organisationnel des réunions est qu'elle ne profite souvent qu'à une seule personne. La structure de réunion la plus courante serait celle dans laquelle les employés subalternes font le travail de fournir des informations à un responsable.
Puis, ces employés attendent et regardent pendant que les autres font de même. Il s'agit surtout d'une performance, qui cimente la hiérarchie sociale de l'entreprise et l'autorité de ses dirigeants. Des études révèlent que les réunions longues et improductives sont devenues un fléau du lieu de travail hybride d'aujourd'hui, ce qui a incité les entreprises à tenter de les réduire. Meta, le fabricant de produits ménagers Clorox et la société de technologie Twilio font partie de ceux qui ont institué des journées sans réunion. Selon une enquête réalisée l'année dernière, les employés passent en moyenne 18 heures par semaine en réunion.
Ces derniers ne refuseraient que 14 % des invitations, même s'ils préféraient se retirer de 31 % d'entre elles. Selon l'enquête, le fait d'assister à contrecœur à des réunions non critiques représente un gaspillage d'environ 100 millions de dollars par an dans les grandes entreprises. Shopify a déclaré qu'un bot servira d'exécuteur de la politique, rappelant les nouvelles règles aux organisateurs de réunions à partir du 5 janvier. « Au fil des ans, nous avons vu des réunions excessives s'insinuer de nouveau dans notre quotidien », a déclaré Nejatian. Notons que depuis 2020, Shopify permet à ses employés de travailler de n'importe où.
Selon une étude de l'école de commerce française NEOMA (NEOMA Business School), les politiques visant à supprimer des réunions peuvent stimuler la productivité et réduire le stress des employés. D'autres études révèlent que les personnes qui exigent le plus de réunions sont les jeunes cadres ou les cadres nouvellement promus - en particulier les hommes - qui sont "désireux d'être visibles ou d'envoyer le signal qu'ils ont le contrôle". Par ailleurs, d'autres experts estiment que les réunions mal organisées ou mal gérées peuvent également nuire à l'engagement des employés et même renforcer leur intention de démissionner.
Des données de Microsoft basées sur des milliers d'utilisateurs de son logiciel de travail Teams ont montré que le temps passé en réunion a plus que triplé au cours des deux premières années de la pandémie, et que le nombre de réunions hebdomadaires a plus que doublé. Toutefois, selon une étude de 48 millions de réunions réalisée par la société d'analyse Vyopta, la part des réunions virtuelles en tête-à-tête est toutefois passée de 17 % en 2020 à 42 % en 2022, signe que les entreprises tentent de contenir les participants. Certains anciens employés de Shopify soulignent que ce n'est pas la première fois que la société prend une telle mesure.
« Tobi a fait cela à plusieurs reprises, et je pense que cela vient d'un sentiment de narcissisme. Il l'applique de manière très arbitraire à l'ensemble de l'organisation à des moments aléatoires. On a l'impression qu'il veut faire quelque chose de grand et de visionnaire au lieu de s'occuper du quotidien ennuyeux de la gestion comme un adulte, alors il lance des bombes qui font les gros titres. Même pour les développeurs qui n'avaient pas beaucoup de réunions externes, c'était une douleur parce que la direction exécutive ne fait que réduire l'autorité des gestionnaires », a commenté une personne qui se présente comme un ex-employé de Shopify.
Et vous ?
Quel est votre avis sur le sujet ?
Que pensez-vous des mesures proposées par Shopify ?
Selon vous, quelle est l'utilité des réunions en entreprise pour les informaticiens ?
Selon vous, ces réunions sont-elles nécessaires ? Quels impacts ont-elles sur le travail ?
À votre avis, comment les réunions pourraient-elles être mieux organisées dans les entreprises ?
Voir aussi
Pour combien de temps un travailleur est-il productif sur une journée de travail ? Seulement 2h 53 min, d'après une étude
Google serait en train de sévir contre les déplacements des employés, l'entreprise aurait fait le choix de « serrer la ceinture » en ce qui concerne certains avantages offerts aux employés
Demander aux employés d'allumer leurs caméras est une violation des droits de l'Homme, selon un tribunal néerlandais qui tranche sur une pratique qui divise l'opinion en matière de télétravail