Le régulateur antitrust sud-coréen a déclaré qu'il imposerait une amende de 2,85 milliards de wons à Tesla pour avoir omis d'informer ses clients de l'autonomie plus courte de ses véhicules électriques à basse température. La Commission coréenne du commerce équitable (Korea Fair Trade Commission ou KFTC) a déclaré que Tesla avait exagéré « l'autonomie de ses voitures sur une seule charge, leur rentabilité en carburant par rapport aux véhicules à essence ainsi que les performances de ses superchargeurs » sur son site Web local officiel depuis août 2019 jusqu'à récemment.
L'autonomie des voitures du constructeur américain de véhicules électriques chute jusqu'à 50,5 % par temps froid par rapport à la façon dont elles sont annoncées en ligne, a déclaré mardi la KFTC dans un communiqué.
Sur son site Web, Tesla fournit des conseils de conduite en hiver, tels que le préconditionnement des véhicules avec des sources d'alimentation externes et l'utilisation de son application Energy mise à jour pour surveiller la consommation d'énergie, mais ne mentionne pas la perte d'autonomie à des températures inférieures à zéro.
En 2021, Citizens United for Consumer Sovereignty, un groupe de consommateurs sud-coréen, a déclaré que l'autonomie de la plupart des véhicules électriques chute jusqu'à 40 % par temps froid lorsque les batteries doivent être chauffées, Tesla souffrant le plus, citant des données du ministère de l'Environnement du pays.
L'année dernière, la KFTC a infligé une amende de 20,2 milliards de wons au constructeur automobile allemand Mercedes-Benz et à son unité coréenne pour publicité mensongère liée aux émissions de gaz de ses véhicules de tourisme diesel.
Le régulateur a imposé une amende supplémentaire de 1 million de wons à Tesla pour violation de la loi sur le commerce électronique, affirmant que le constructeur automobile n'a pas fourni suffisamment d'informations aux consommateurs sur sa politique d'annulation.
Fin septembre, Tesla avait vendu 45 812 véhicules électriques en Corée du Sud depuis l'ouverture d'un bureau local en 2015, selon le ministère des Transports. Cela en fait la troisième plus grande marque de voitures vertes avec une part de marché locale de 13 %, juste derrière Hyundai Motor Co. et son unité Kia Corp.
Tesla de plus en plus ciblé par les autorités sur les informations véhiculées par ses publicités
Des noms qui donnent la sensation de sécurité aux utilisateurs (Autopilot, Full Self-Driving)
Les véhicules deviennent de plus en plus sophistiqués, et la technologie sous-jacente évolue de telle enseigne que certains d’entre eux sont capables de rester dans une voie et de maintenir une vitesse et une distance définies avec une intervention minimale du conducteur. Mais ce type d'automatisation présente des limites qui peuvent être difficiles à comprendre pour les conducteurs. En juin 2019, deux études de l'IIHS ont mis en évidence des perceptions erronées ou des lacunes dans la compréhension des conducteurs.
« Les niveaux actuels d'automatisation pourraient potentiellement améliorer la sécurité », a déclaré David Harkey, président de l'IIHS. « Cependant, à moins que les conducteurs aient une certaine connaissance et compréhension, ces nouvelles fonctionnalités sont également susceptibles de créer de nouveaux risques ».
L’automatisation disponible dans les véhicules disponibles à l’achat était considérée comme étant de niveau 1 ou 2 (aujourd'hui elles vont jusqu'au niveau 3 pour certains véhicules). Elle s’applique aux systèmes capables d’exécuter une ou plusieurs parties de la tâche de conduite sous la supervision du conducteur. Ces systèmes sont loin de l’automatisation de niveau 5, dans laquelle toute la tâche de conduite peut être effectuée sans intervention humaine dans toutes les conditions.
Niveaux d'automatisation de la conduite
Malgré les limitations des systèmes actuels, certains noms semblent trop surprenants quant à la capacité du conducteur de détourner son attention de la route. Une étude a révélé comment les noms utilisés par les fabricants pour ces systèmes peuvent envoyer les mauvais messages aux conducteurs en ce qui concerne leur degré d'attention. Une autre a révélé que les conducteurs ne comprenaient pas toujours les informations importantes communiquées par les écrans du système.
Prenons un cas pratique : est-ce que le nom "Autopilot” pourrait conduire les gens à surestimer les capacités de la technologie d'assistance au conducteur de Tesla ? Les critiques préviennent que certains clients vont supposer qu’un système appelé “Autopilot” (pilote automatique) est totalement autonome. Les défenseurs de Tesla répliquent en soulignant que les capacités de pilotage automatique des avions ne sont pas totalement autonomes. Les conducteurs doivent encore surveiller leur fonctionnement et intervenir en cas de problème, et le système de pilote automatique de Tesla n'est pas différent.
Une enquête de l'Institut d'assurance pour la sécurité routière fournit des données précieuses utiles à ce débat. Le groupe a posé des questions aux conducteurs sur les capacités de cinq systèmes avancés d'assistance au conducteur (ADAS - advanced driver-assistance systems). Ils ont identifié les produits uniquement par leur marque : Autopilot (utilisé par Tesla), Traffic Jam Assist (Audi et Acura), Super Cruise (Cadillac), Driving Assistant Plus (BMW) et ProPilot Assist (Nissan). Les participants à l'enquête ne savaient pas quel constructeur fabriquait chaque produit et ils n'en connaissaient pas les capacités. Il y avait 2 000 répondants au total, mais chacun n'a été interrogé que sur deux systèmes sur cinq, donnant lieu à quelques centaines de réponses pour chaque produit.
Il faut préciser qu’aucun de ces systèmes ne gère de manière fiable le maintien de la voie et le contrôle de la vitesse dans toutes les situations. Tous exigent que les conducteurs restent attentifs, et tous sauf Super Cruise, avertissent le conducteur si leurs mains ne sont pas détectées sur le volant. Super Cruise utilise plutôt une caméra pour surveiller le regard du conducteur et émettra un avertissement si le conducteur ne regarde pas vers l'avant.
Pour chaque système ADAS, les conducteurs ont été interrogés sur la sécurité de diverses activités qui ne sont pas recommandées par les constructeurs automobiles (de l’acte consistant à enlever ses mains du volant à la sieste pendant la conduite). Un plus grand nombre de participants ont estimé que poser chacun de ces actes était sans conséquence avec Autopilot activé plutôt qu'avec l'un des quatre autres systèmes ADAS.
Par exemple, 48% des personnes interrogées ont déclaré qu’il était sans danger pour un conducteur d’enlever ses mains du volant quand Autopilot était activé, contre environ 33% pour ProPilot Assist et moins de 30% pour les autres systèmes nommés. Six pour cent des conducteurs ont déclaré qu'il était sans danger de faire la sieste dans une voiture avec Autopilot activé, tandis que seulement trois pour cent ont déclaré la même chose pour les autres systèmes ADAS.
Cette enquête s'est concentrée sur les perceptions du nom de marque Autopilot, et non sur ce que la technologie apporte en réalité. Les répondants n'étaient pas nécessairement propriétaires de Tesla (probablement pas, pour la plupart), et aucune information ne leur a été communiquée concernant les capacités des voitures pour lesquelles ils répondaient à des questions.
Et tandis qu’Autopilot est peut-être plus performant que certains de ces autres systèmes, Tesla ne prétend pas en soi que les conducteurs sont suffisamment en sécurité pour relâcher leur attention lorsqu’Autopilot est activé ; enlever les mains du volant, regarder un film ou faire une sieste tranquillement sur le chemin du retour à la maison n’est pas encore à l’ordre du jour.
Des véhicules Teslas exécutant Autopilot étaient impliqués dans 273 accidents signalés entre 2021 et 2022
La National Highway Traffic Safety Administration a publié des données sur la sécurité, ou son absence, des systèmes avancés d'aide à la conduite. Depuis juin 2021, les constructeurs automobiles sont tenus d'informer la NHTSA si l'un de leurs véhicules est impliqué dans un accident alors qu'ils utilisent des systèmes de conduite partiellement automatisés, également appelés systèmes SAE de niveau 2. Comme beaucoup le soupçonnaient, le système Autopilot de Tesla était à l'origine de la majorité des accidents depuis le début de la période de référence. En fait, Tesla représentait les trois quarts de tous les accidents ADAS, soit 273 accidents sur 367 signalés entre juillet 2021 et le 15 mai 2022. La nouvelle fournit encore plus de données sapant les affirmations de sécurité de Tesla concernant son système Autopilot.
Les autorités s'en mêlent
Certains législateurs ont appelé à une enquête plus approfondie et à d'éventuelles normes de sécurité pour les voitures dotées de la technologie. Le sénateur Richard Blumenthal (D-Conn.) a qualifié les découvertes de « profondément alarmantes ».
« C'est une sonnette d'alarme qui confirme bon nombre des avertissements que nous avons lancés au fil des ans », a-t-il déclaré. « La fréquence et la gravité de ces accidents sont une cause de carte jaune et peut-être de carton rouge sur certaines de ces technologies ».
Blumenthal et le sénateur Edward J. Markey (D-Mass.) ont précédemment critiqué Tesla pour avoir mis des logiciels sur les routes « sans pleinement tenir compte de ses risques et de ses implications ». Lors d'un appel avec les médias mercredi, Markey a dénoncé l'affirmation de Tesla selon laquelle la technologie d'Autopilot rend les voitures plus sûres.
« Ce rapport fournit des preuves supplémentaires qui freinent les affirmations de Tesla », a-t-il déclaré.
Les sénateurs ont envoyé une lettre à la NHTSA, disant qu'ils étaient « profondément troublés » par les données et appelant le régulateur « à utiliser toutes ses autorités d'enquête et de réglementation pour faire la lumière nécessaire sur cette industrie incontrôlable et imposer des garde-fous pour empêcher plus de décès ».
De son côté, la Californie a procédé à l’adoption d’une loi qui interdit à Tesla d’appeler le logiciel de ses véhicules Full Self-Driving. Motif : c’est de la publicité mensongère qui laisse croire que les véhicules Tesla sont totalement autonomes.
« Un fabricant ou un concessionnaire ne doit pas nommer une fonction d'automatisation partielle de conduite ou décrire une fonction d'automatisation partielle de conduite dans des documents publicitaires en utilisant un langage qui implique ou qui pourrait autrement amener une personne raisonnable à croire que la fonction permet au véhicule de fonctionner comme un véhicule autonome ou qu'elle possède une fonctionnalité qui n'est pas réellement incluse dans la fonction. Une violation de cette subdivision est considérée comme une publicité mensongère », lit-on.
Une nouvelle mise à jour pour les véhicules Tesla est disponible depuis la mi-parcours du mois qui tire à son terme. La nouveauté : Tesla lance Steam dans ses voitures avec des milliers de jeux. La manœuvre était venue raviver le débat autour de la terminologie mise en avant par le constructeur (Full Self-Driving, Autopilot , etc.) En effet, elle renforce l’idée du « Ne vous inquiétez pas, vous pouvez même jouer au volant, Tesla s'occupe de tout, vous n'avez rien à gérer et vous n'avez à penser à rien d'autre qu'au divertissement avant tout. » Cette question de sécurité en lien avec la distraction au volant intervient dans un contexte où le constructeur lui-même reconnaît que ses véhicules en sont encore au stade d’aide à la conduite. Pourtant, les utilisateurs les considèrent comme des voitures dotées de complète autonomie.
Source : Korea Fair Trade Commission
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Tesla devrait-il, selon vous, continuer à utiliser les appellations Autopilot et Full Self-Driving même si cela induit de nombreux utilisateurs en erreur, pensant à tort que leur système peut gérer toutes les étapes de la conduite ?