Le chaos règne toujours sur Twitter, notamment en ce qui concerne les règles de la plateforme. Depuis le rachat de l'entreprise par Elon Musk, les utilisateurs ignorent en quoi elles consistent précisément et de plus en plus de personnes sont éjectées de la plateforme pour des choses qui déplaisent au nouveau propriétaire. Jeudi soir, Twitter a soudainement suspendu les comptes de plusieurs journalistes de renom qui couvrent la plateforme et Musk. Quelques heures après cette décision, Musk a affronté l'un des journalistes qu'il a suspendus dans une discussion audio sur Twitter Space devant un public de plus de 30 000 auditeurs.
Musk a suggéré que ces journalistes ont violé la politique de Twitter sur le "doxxing", ou l'exposition des informations permettant d'identifier une personne. Il a accusé les journalistes de partager des informations privées sur ses allées et venues, qu'il a décrites comme des "informations pouvant conduire à son assassinat". Toutefois, Musk n'a fourni aucune preuve pour étayer ses dires, se contentant de donner la sanction encourue pour une telle faute. « Vous faites du doxxing, vous êtes suspendu. Fin de l'histoire. C'est tout », a déclaré Musk, expliquant sa dernière politique au groupe, avant de partir quelques minutes après avoir rejoint la discussion.
Des journalistes du New York Times, de Voice of America (VOA), de CNN et du Washington Post figurent parmi les personnes privées de leur compte. Mais la suspension des journalistes a contrarié de nombreuses personnes sur la plateforme, ainsi des organisations internationales. « La loi sur les services numériques (Digital Services Act, DSA) de l'UE exige le respect de la liberté des médias et des droits fondamentaux. Cela est renforcé par notre #MediaFreedomAct. Musk devrait en être conscient. Il y a des lignes rouges. Et des sanctions, bientôt », a déclaré Vera Jourova, vice-présidente de la Commission européenne chargée des valeurs et de la transparence.
Jourova n'a pas ajouté de détails supplémentaires sur les sanctions. En vertu de la DSA, les entreprises peuvent se voir infliger des amendes allant jusqu'à 6 % de leurs revenus annuels mondiaux en cas de violation. La loi oblige les grandes plateformes à réduire les préjudices en ligne, à mettre en place des protections pour les droits des utilisateurs et à publier des rapports de transparence. Les plateformes Big Tech sont tenues de communiquer à la Commission le nombre d'utilisateurs finaux actifs dont elles disposent d'ici février 2023. Elles ont ensuite jusqu'à quatre mois après la fin de l'examen des chiffres par le bloc pour se conformer aux règles.
En outre, l'ONU a déclaré sur Twitter que "la liberté des médias ne devrait pas être traitée comme un quelconque instrument". Melissa Fleming, sous-secrétaire générale des Nations unies chargée des communications mondiales, s'est dite "profondément troublée par la suspension arbitraire de comptes de journalistes par Twitter". « La liberté des médias n'est pas un jouet. Une presse libre est la pierre angulaire des sociétés démocratiques et un outil essentiel dans la lutte contre la désinformation nuisible », a-t-elle déclaré. Certains des journalistes suspendus ont qualifié la décision de Twitter de "discutable et malheureuse".
Un porte-parole de Twitter a déclaré à un site d'information technologique américain que les interdictions étaient liées au partage en direct des données de localisation. Les règles sur le doxxing auraient été établies récemment et Twitter se serait basé dessus pour suspendre mercredi le compte principal de Jack Sweeney, l'adolescent de 20 ans de Floride qui a créé des dizaines de comptes automatisés sur la plateforme pour partager la position en temps réel des jets privés de personnes ultrariches et d'autres célébrités. Sweeney suit les jets privés de Bill Gates, Jeff Bezos, Drake, Elon Musk, Bernard Arnault et Mark Cuban.
Twitter a suspendu mercredi matin le compte @ElonJet qui suivait en temps réel la position du jet privé de Musk. Le patron de Twitter a déclaré que ces informations sont sensibles et pourraient porter atteinte à sa sécurité, ainsi qu'à celle de ses proches. Musk a déclaré : « la publication en temps réel de l'emplacement de quelqu'un d'autre viole la politique sur le doxxing, mais la publication différée des emplacements est acceptable ». Après la suspension des journalistes, Musk a déclaré jeudi : « me critiquer toute la journée, c'est très bien, mais divulguer des informations sur ma position en temps réel et mettre ma famille en danger, ça ne l'est pas ».
Selon certaines sources, Musk aurait promis d'intenter une action en justice contre Sweeney. Il a déclaré qu'un "harceleur fou" avait utilisé le partage de localisation en direct pour trouver et accoster un véhicule transportant ses enfants à Los Angeles. Mais la police de Los Angeles a déclaré qu'aucun rapport de crime n'avait encore été déposé. Plusieurs des journalistes suspendus jeudi soir avaient écrit sur la nouvelle politique et sur la raison pour laquelle Musk l'a imposée. Le Comité de protection des journalistes, une organisation à but non lucratif qui défend les journalistes du monde entier, a déclaré jeudi soir qu'il était préoccupé par ces suspensions.
Jeudi en début de soirée, Twitter a également suspendu le compte officiel de Mastodon, une plateforme présentée comme une alternative à Twitter. Les liens vers les comptes individuels de Mastodon semblent également avoir été interdits. Un message d'erreur a informé les utilisateurs que les liens vers Mastodon avaient été "identifiés" comme "potentiellement dangereux" par Twitter ou ses partenaires. À la suite de ces suspensions, le ministère allemand des Affaires étrangères a averti Twitter que "la liberté de la presse ne peut être activée et désactivée sur un coup de tête".
Par ailleurs, Musk a publié vendredi un sondage demandant s'il devait lever la suspension des comptes "maintenant" ou "dans sept jours", suggérant que la décision pourrait être annulée plus tôt que prévu. « Les mêmes règles de doxxing s'appliquent aux journalistes et à tout le monde », a-t-il ajouté. Mais plusieurs journalistes suspendus disent n'avoir pas partagé des informations d'identification sur Musk.
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