
la Commission étudie les conditions d'octroi de licences AV1 par l'alliance
La Commission européenne a annoncé jeudi qu'elle enquête sur la politique d'octroi de licences vidéo AV1 de l'"Alliance for Open Media" (AOM), qui compte parmi ses membres l'unité Google d'Alphabet, Amazon, Apple et Meta (anciennement Facebook). Cette nouvelle intervient alors que l'Union européenne (UE) cherche à renforcer les règles pour les grandes entreprises technologiques dans le bloc à partir de 2023. Un rapport sur le sujet indique que le chien de garde de l'UE a envoyé un questionnaire à certains membres de l'alliance pour tenter de comprendre si l'attribution des licences est conforme aux règles en vigueur dans l'Union.
Le codec AV1 (pour AOMedia Video Codec) est un codec vidéo ouvert et libre de droits créé en 2018 par l’Alliance for Open Media. Il est conçu pour la diffusion de flux vidéo sur Internet et réseaux IP et est considéré comme le successeur de VP9. Le format AV1 serait capable d’atteindre environ 30 % de compression supplémentaire par rapport à VP9, ce qui veut dire que vous atteignez de ce fait environ 80 % mieux que le H.264. Google a déclaré à propos de la technologie : « AV1 est un codec de nouvelle génération. Il améliore l'efficacité de la compression de plus de 30 % par rapport au codec vidéo dernier cri, le VP9 ».
L’alliance elle-même a été fondée en 2015. Les 14 membres dirigeants de l'AOM comprennent Google, Meta, Intel, Microsoft, Netflix, Nvidia, Samsung et bien d'autres, dont Apple, qui a adhéré en 2018. Il y a 41 membres généraux, dont Adobe, AMD, Alibaba, la BBC, Hulu, VideoLan (l'éditeur de VLC), Vimeo, etc. Mais l'on a appris jeudi que l'Union européenne enquête sur un comportement anticoncurrentiel présumé lié aux conditions d'attribution de licences AV1 par l'AOM et ses membres en Europe. L'UE aurait envoyé un questionnaire aux entreprises concernées. Un porte-parole de la Commission aurait confirmé jeudi la conduite d'une telle enquête.
« La Commission dispose d'informations selon lesquelles l'AOM et ses membres pourraient imposer des conditions de licence (licences croisées obligatoires sans redevance) à des innovateurs qui ne faisaient pas partie de l'AOM au moment de la création de la technologie AV1, mais dont les brevets sont jugés essentiels à (ses) spécifications techniques », indique le document comportant le questionnaire. La Commission s'inquiète en effet du fait que l'AOM puisse restreindre la capacité des innovateurs à concurrencer l'AV1. Les régulateurs de l'UE prétendent que si cela est vrai, cela élimine les incitations à l'innovation.
Par ailleurs, le questionnaire s'interrogeait également sur l'impact d'une clause de licence de brevet de l'AOM, selon laquelle les titulaires de licence verraient leurs licences de brevet résiliées immédiatement s'ils lançaient des actions en justice affirmant que la mise en œuvre enfreint leurs revendications. Les membres de l'AOM risquent des amendes pouvant aller jusqu'à 10 % de leur chiffre d'affaires mondial pour avoir enfreint les règles antitrust de l'UE. L'enquête est la dernière en date à frapper l'industrie technologique, qui sera soumise à de nouvelles règles strictes en Europe dès l'année prochaine.
Ces nouvelles règles pourraient obliger les entreprises à changer leurs modèles commerciaux de base et à faire davantage pour lutter contre les contenus illégaux sur leurs plateformes. À ce propos, les législateurs de l'UE ont adopté le mardi 5 juillet des règles historiques pour freiner le pouvoir des grandes enseignes de la technologie tels que Google, Amazon, Apple, Meta et Microsoft. Plus précisément, il s'agit de la loi sur les marchés numériques (DMA pour Digital Markets Act) et de la loi sur les services numériques (DSA pour Digital Services Act) qui ont été proposées par la Commission européenne en décembre 2020.
Désormais rassemblées dans un train de mesures sur les services numériques (DSP pour Digital Services Package), les nouvelles règles ont été adoptées mardi par le Parlement européen et visent à répondre aux gatekeepers des grandes entreprises technologiques. « Le train de mesures sur les services numériques établit un premier corpus complet de règles destiné aux plateformes dont nous dépendons tous dans notre vie quotidienne. Ces nouvelles règles seront applicables dans l'ensemble de l'UE et créeront un espace numérique plus sûr et plus ouvert, fondé sur le respect des droits fondamentaux », a déclaré la Commission.
La Commission estime que la législation sur les services numériques améliore considérablement les mécanismes de suppression des contenus illicites et de protection effective des droits fondamentaux des utilisateurs en ligne, y compris la liberté d’expression. Elle renforce également la surveillance publique des plateformes en ligne, en particulier pour celles qui touchent plus de 10 % de la population de l’UE. Parmi les réactions dans l'industrie, Amazon a déclaré que la société prévoyait d'évoluer avec le « paysage réglementaire » européen et de revoir ce que la nouvelle législation signifie pour Amazon, ses clients et ses partenaires.
Le PDG d'Apple, Tim Cook, a affirmé que les nouvelles règles de l'UE pourraient présenter des risques pour la sécurité et la confidentialité des iPhone. En effet, le DMA pourrait contraindre Apple à autoriser les utilisateurs à installer des applications à partir de magasins d'applications tiers et à les télécharger directement à partir d'Internet. Il obligerait également Apple à autoriser les développeurs à proposer des systèmes de paiement tiers dans les applications et à promouvoir des offres en dehors des plateformes du contrôleur d'accès. Il s'agit là de deux contre lesquelles Apple a farouchement lutté jusqu'à présent.
« Il y a de bonnes choses dans les réglementations, mais je pense que certains aspects de ces réglementations ne vont pas dans le sens du meilleur intérêt pour les utilisateurs. Prenons un exemple : le texte du DMA qui forcerait le side-loading (installation d'applications à partir de sources tierces) sur l'iPhone. Je pense que cela détruirait la sécurité offerte par l'iPhone et les initiatives de respect de la vie privée que nous avons intégré à l'App Store, par exemple, via des labels de respect de la vie privée ou des systèmes qui obligent les applications à demander l'autorisation des utilisateurs pour utiliser leurs données », a déclaré Cook.
« Ces initiatives ne seront disponibles que pour les personnes qui restent au sein de notre écosystème », a-t-il ajouté. Les critiques sont toutefois sceptiques quant à l'efficacité des nouvelles réglementations, déclarant que peu de choses vont changer. Ils estiment que les grandes entreprises technologiques pourront facilement se permettre des amendes massives pour les violations du DMA ou du DSA. Et à environ 80 membres, le groupe de travail sur le DMA serait trop petit pour surveiller la conformité.
Une fois publiées au Journal officiel de l'UE, les deux législations entreront en vigueur, le DMA étant applicable après six mois. Le DSA fonctionne un peu différemment. Il s'appliquera à tous les fournisseurs de services numériques après 15 mois ou à partir du 1er janvier 2024, selon la date la plus tardive. Mais pour les très grandes plateformes en ligne et les très grands moteurs de recherche en ligne, la conformité sera imposée après seulement quatre mois.
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