Dans la nuit du 9 au 10 mars 2021, un incendie s’est déclaré dans l’un des datacenters de la société OVH cloud. Plusieurs entreprises ont été victimes de cet incendie et de nombreux sites internet ont à déplorer une perte irréversible de leurs données. Que les pertes de données n’aient été que temporaires ou définitives, cet incendie a porté, dans tous les cas, un préjudice économique à plusieurs milliers de sociétés.
La CNIL a procédé à la publication d’une note sur son site qui rappelle les règles du RGPD aux propriétaires des sites web affectés par les incidents OVH. S'ils ont perdu des données personnelles, il faut le signaler à l'autorité :
« Suite à l’incendie du 10 mars 2021 ayant eu lieu dans un centre de données d’OVH à Strasbourg, la CNIL rappelle les obligations en matière de notification de violation en cas d’indisponibilité ou de destruction de données personnelles. La destruction de données personnelles (temporaire ou définitive), y compris accidentelle, constitue une violation de données au sens du RGPD. À ce titre, les responsables de traitement qui hébergeaient des données personnelles au sein des infrastructures touchées doivent documenter la violation (les faits, ses effets et les mesures prises pour y remédier) dans un registre tenu en interne. Les sous-traitants doivent informer leurs clients de l'incident afin que ces derniers puissent remplir leurs propres obligations, dont celle de documentation dans le registre des violations tenu en interne par chacun d’entre eux. »
Le cabinet d'avocats parisien Ziegler & Associés a pour sa part amorcé un recours collectif contre OVHcloud. Pour le cabinet, si un accord à l'amiable n'est pas trouvé en termes de préjudice et d'indemnisation, l'affaire prendrait le chemin du tribunal de commerce.
Il faut dire que le 16 mars 2021, le PDG d’OVH avait annoncé que les clients bénéficieraient de trois mois gratuits en cas de coupure de service et d'une gratuité de six mois en cas de perte de données.
À cette même date, le fondateur de la société a également reconnu que beaucoup de clients n’avaient pas compris l’offre d’OVH en matière d’hébergement des données et de la nécessité de souscrire à une offre de sauvegarde complémentaire. Octave Klaba a alors annoncé une modification de la politique d’OVH afin d’accroître la sécurité des données et permettre une option de sauvegarde de données à tous les clients, sans aucun surcoût.
Cette annonce est cruciale car, certains clients n’avaient pas souscrit à l’offre de sauvegarde supplémentaire avant la survenance de l’incendie. Et cela peut avoir un impact sur l’indemnisation future de leurs pertes.
Ainsi, comment les clients dont le préjudice économique est lourd pourront-ils engager la responsabilité d’OVH s’ils sont contraints de ne jamais retrouver leurs données ? Autrement dit, pourront-il obtenir une indemnisation pour les pertes subies ?
La nature juridique des relations établies entre OVH, prestataire de service, et ses clients est contractuelle. Par conséquent, les stipulations contractuelles présentes au sein des conditions générales du fournisseur règlent la question de la responsabilité.
D’autre part, il existe deux grandes catégories de contrat chez ce type d’hébergeurs. On peut donc retrouver un contrat d’hébergement simple qui ne sera pas assorti de services associés ; on peut également retrouver un contrat d’hébergement avec des services ajoutés comme la possibilité de sauvegarde, de mise en place de plan de continuité ou de reprise d’activité etc.
C’est-à-dire que d’un contrat à l’autre, en fonction des options choisies par le client et des clauses rédigées entre les parties, le régime de responsabilité n’est pas le même pour OVH. À titre d’exemple, suivant la disponibilité choisie, OVHCloud dispose entre 9h (99,9%) et jusqu’à 36 jours (90%) pour rétablir les services.
Par conséquent, pour espérer intenter une action en indemnisation, la première question à se poser est de savoir quel type de contrat votre entreprise a conclu avec OVH ?
Ce contrat stipule-t-il l’obligation pour OVH de sauvegarder les données partagées ? À défaut, le client ne pourra engager la responsabilité de l’hébergeur au titre de la perte de données.
Si la sauvegarde de données était comprise dans le contrat, alors il est possible de rechercher la responsabilité d’OVH, car cette dernière aurait dès lors commis une faute contractuelle.
Début novembre, les sept entreprises que le cabinet a fédéré ont été rejoint par 13 entreprises supplémentaires. Cette fois-ci, elles sont 56 et les procédures sont désormais entamées.
Les entreprises qui participent au recours collectif contre OVHcloud sont de divers secteurs : comptabilité, marketing, santé et tourisme. Un accord de confidentialité les lie au cabinet Ziegler & Associés. En vertu de ce dernier, leurs noms sont tenus secrets. L’autre dénominateur commun entre ces personnes morales est qu’elles rapportent des pertes de leurs bases de données suite à l’incendie du mois de mars. Le tableau de l’après incendie c’est un acteur du secteur de la santé qui se retrouve sans aucune information associée aux patients ou une entreprise touristique qui ne sait plus retrouver les détails de réservations de ses clients.
Maître Dakos, avocat chez Ziegler & Associés, travaille sur ce dossier: « Dans ces 56 entreprises, on a une majorité de PME et de TPE, on a aussi quelques grands groupes industriels basés à l’international. On a aussi un groupe du CAC 40 et une administration. On va démontrer dans notre recours qu'OVH aurait pu prendre des mesures, des dispositifs: extincteur automatique, des dispositifs de préventions ».
Les indemnités demandées s’élèvent à plusieurs dizaines de milliers d’euros selon l’avocat. « Les préjudices subis par les entreprises s’échelonnent entre 10 000 euros et 1,9 million d’euros et au total on est sur des sommes considérables de plusieurs millions, voire dizaines de millions d’euros » poursuit l'avocat.
Dans cette affaire, OVH se dédouane de toute « faute » et invoque un cas de « force majeure ». OVHcloud avait consenti a des « gestes commerciaux » au lendemain du sinistre.
Le cabinet d'avocats assure de son côté à OVH l'absence de système d'extinction dans le bâtiment et que les « sauvegardes back-up étaient sur le même serveur que les originales ». Les avocats estiment également que la clause « limitative de responsabilité » ne tient pas et veulent que soient pris en compte « les dommages indirects » subis par les entreprises clientes.
Source : Ziegler & Associés
Près de 60 entreprises, dont un groupe du CAC 40, demandent réparation après l'incendie d'OVH Cloud.
Les procédures sont désormais entamées
Près de 60 entreprises, dont un groupe du CAC 40, demandent réparation après l'incendie d'OVH Cloud.
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Le , par Stéphane le calme
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