Reproduire le fonctionnement du cerveau humain ou reconstituer celui d'un homme vivant est une autre des hobbies des grandes entreprises technologiques. La dernière initiative dans ce sens nous vient du mégaconglomérat industriel Samsung Electronics. Le géant sud-coréen prévoit en effet de "copier-coller" la structure du cerveau humain sur des puces électroniques. L'entreprise a déclaré dans un billet de blogue dimanche que le but est de permettre aux futures puces d'accéder aux capacités du cerveau en matière de "faible consommation, d'apprentissage facile, d'adaptation à l'environnement, voire d'autonomie et de cognition".
Pour cela, Samsung s'est associé à l'université de Harvard. Cette annonce vient s'ajouter à un article que des chercheurs et des ingénieurs de Samsung et de Harvard ont récemment publié dans la revue Nature Electronics. Les quatre noms de l'équipe Samsung-Harvard sont les suivants : Donhee Ham et Hongkun Park, professeurs à Harvard ; Sungwoo Hwang, président et PDG de Samsung SDS ; et Kinam Kim, vice-président et PDG de Samsung Electronics. Selon les chercheurs, cette avancée pourrait servir de "raccourci" vers des systèmes d'intelligence artificielle qui se comportent comme de véritables cerveaux.
Ils pourraient avoir notamment la flexibilité nécessaire pour apprendre de nouveaux concepts et s'adapter à des conditions changeantes. Les chercheurs pensent que l'on pourrait même voir apparaître des machines entièrement autonomes dotées d'une véritable cognition. « Le cerveau est composé d'un grand nombre de neurones, et leur carte de câblage est responsable des fonctions du cerveau. Ainsi, la connaissance de cette carte est la clé de la rétro-ingénierie du cerveau », notent les ingénieurs de Samsung. La société a annoncé qu'elle veut en réalité réaliser un concept qui est dans l'air du temps de l'IA depuis les années 80.
Toutefois, l'équipe de recherche a précisé que l'idée des puces informatiques neuromorphiques qui imitent le fonctionnement du cerveau humain est à la fois complexe et simple. Et comme le laisse entendre la description du terme "copier-coller" de Samsung, l'objectif est de prendre les neurones et les synapses du cerveau humain et de les intégrer dans le silicium, c'est-à-dire dans des puces informatiques. Mais la mise en œuvre du système de pensée en silicium semble stupéfiante. C'est pourquoi l'équipe note que la façon la plus simple de comprendre cette technologie est de la considérer comme une ingénierie inverse du cerveau.
De même que le cerveau stocke ses souvenirs de manière décentralisée, à travers une centaine de milliards de neurones, les puces neuromorphiques que Samsung veut mettre en place feront de même. (Il s'agit d'une manière non traditionnelle d'utiliser la puissance des ordinateurs. Contrairement aux ordinateurs conventionnels, le cerveau copié-collé de Samsung ne répartira pas les tâches de mémoire et de traitement ; il effectuera ses tâches de manière asynchrone, comme le fait le cerveau humain. Il sélectionne des "neurones et des synapses" de silicium spécifiques pour exécuter une tâche avec une efficacité maximale.)
Si Samsung parvient à mettre en œuvre ces puces informatiques uniques, l'entreprise réduira les coûts énergétiques de l'informatique. Les systèmes informatiques actuels consomment beaucoup plus d'électricité que le cerveau humain. Un ordinateur de bureau typique peut consommer entre 200 et 400 watts par heure. Et un superordinateur ? Plus de deux millions. En revanche, un cerveau humain n'a besoin que de 12 watts, soit environ un cinquième de la consommation d'une ampoule électrique standard. En sus, les puces neuromorphiques fonctionnelles seraient à la hauteur de l'organe pensant.
Malheureusement, il ne semble pas que Samsung ait encore tracé une voie claire pour le public. Et il semble bien que l'entreprise ait du pain sur la planche. Pour développer des puces neuromorphiques, les ingénieurs devront renoncer aux algorithmes actuels d'apprentissage automatique qui nécessitent d'énormes quantités de données pour fonctionner. Les puces neuromorphiques devront également imiter les pics d'"activité" du cerveau humain. Cela nécessite un tout nouveau type d'architecture de puce. En outre, il ne faut pas oublier qu'un cerveau humain compte environ 100 milliards de neurones et mille fois plus de liens synaptiques.
De cette manière, une puce neuromorphique idéale aurait besoin d'environ 100 000 milliards d'unités de mémoire. Il s'agit clairement d'un défi difficile à relever pour toute entreprise, sans compter le code nécessaire pour faire fonctionner ce cerveau virtuel. Samsung a peut-être ouvert une porte vers une IA de type humain, mais il faudra sans doute beaucoup de temps avant que quelqu'un atteigne cet objectif. Cependant, Samsung a déclaré que si ces chiffres sont manifestement énormes, ils ne dépassent pas, en termes de mathématiques simples, la technologie dont le monde dispose actuellement.
« La vision que nous présentons est très ambitieuse », a déclaré Donhee Ham, membre du Samsung Advanced Institute of Technology et professeur à Harvard, dans le communiqué de presse de Samsung. « Mais travailler à un objectif aussi héroïque va repousser les limites de l'intelligence artificielle, des neurosciences et de la technologie des semiconducteurs », a-t-il conclu.
Sources : Samsung Electronics, Article de recherche du groupe Samsung-Harvard
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