
pour permettre à l'UE de réduire les importations de puces
Taiwan Semiconductor Manufacturing Company (TSMC), la plus importante fonderie de semiconducteurs indépendante au monde, veut construire une usine en Europe et pourrait choisir l'Allemagne comme pays hôte. La société a déclaré ce lundi qu'il était encore trop tôt pour dire si elle allait construire des usines en Allemagne et que les discussions n'en étaient qu'à leurs débuts. Toutefois, le projet d'extension du fabricant taïwanais de semiconducteurs intervient à un moment où l'UE cherche à réduire les importations de puces, mais aussi éliminer les risques d'espionnage, dans un contexte de pénurie d'approvisionnement.
Ces dernières années ont été couvertes d'allégations selon lesquelles des matériels importés, comme des puces et des routeurs, vers l'Europe pouvaient contenir des portes dérobées, permettant ainsi au fabricant d'origine d'espionner les infrastructures dans lesquels ils sont utilisés. La multiplication de ces allégations a incité l'UE à encourager l'émergence de fondeurs européens. En outre, la course à la production de puces sur place s'est intensifiée et a pris un tournant mondial avec la pénurie déclenchée par la crise sanitaire du Covid-19, où certaines entreprises ont été accusées d'avoir constitué des stocks.
Maintenant, l'UE cherche à stimuler la production de semiconducteurs et à se protéger des chocs dans la chaîne d'approvisionnement mondiale. Ainsi, depuis le début de l'année, la Commission européenne a tenu des discussions avec les géants mondiaux de l'industrie des puces, dont Intel et TSMC. Pour répondre à cette démarche, TSMC a déclaré ce lundi que l'entreprise avait commencé à envisager la construction d'une usine en Allemagne. La décision dépendra de la demande et des exigences des clients de TSMC, tandis que le coût de l'installation sera partagé entre TSMC, ses clients et/ou les gouvernements locaux ou d'État.
« Nous sommes dans la phase préliminaire d'examen de l'opportunité d'aller en Allemagne », a déclaré le président du conseil d'administration de TSMC, Mark Liu, aux actionnaires lors de l'assemblée générale annuelle de la société. « Il est encore trop tôt, mais nous l'évaluons sérieusement, et [une décision] dépendra des besoins de nos clients », a-t-il ajouté. Ces commentaires sont le dernier signe en date montrant que la société de puces la plus précieuse au monde s'éloigne de sa stratégie de plusieurs décennies consistant à concentrer la majorité de sa production de puces à Taïwan.
La société construit déjà une usine de puces de 12 milliards de dollars en Arizona et envisage de construire sa toute première usine de plaquettes au Japon. En ce qui concerne l'usine avancée de TSMC aux États-Unis, Liu a déclaré qu'elle soutiendrait la demande des clients, notamment dans le domaine des infrastructures et de la sécurité nationale. « Les clients sont le support de notre expansion mondiale. Nous allons agir très prudemment », a déclaré Liu. L'usine sera la première installation de TSMC dans le pays en vingt ans. La production devrait commencer dans environ deux ans et demi, soit début 2024.
Dans son dernier rapport d'examen de la chaîne d'approvisionnement, la Maison-Blanche a spécifiquement souligné que la concentration de la production de puces de pointe à Taïwan crée une vulnérabilité pour les chaînes d'approvisionnement mondiales en semiconducteurs. TSMC fournit des puces à presque tous les principaux développeurs mondiaux de puces, d'Apple, Qualcomm et Advanced Microelectronics Devices à Intel, Infineon et Sony. Selon un rapport du média asiatique Nikkei, les clients américains représentent 70 % des revenus de TSMC, tandis que ceux du Japon comptent pour 4,72 % et ceux d'Europe pour 5,24 %.
Le fondateur de TSMC, l'ancien président Morris Chang, a récemment averti que la précipitation à ramener les semiconducteurs sur le territoire national entraînerait des coûts massifs sans pour autant assurer l'autosuffisance en puces que recherchent les grandes économies. Dans le cadre de son implantation au Japon, Liu a déclaré que l'entreprise discute actuellement avec ses clients japonais des moyens de réduire les coûts d'exploitation. Selon ses propos, le coût de construction et d'exploitation d'une usine de puces au Japon est beaucoup plus élevé qu'à Taïwan.
« Nous discutons directement avec nos clients japonais des moyens de réduire l'écart de coût. Une fois le processus de diligence raisonnable terminé, notre objectif est d'atteindre au moins le seuil de rentabilité en matière de coûts », a déclaré Liu. Taïwan et TSMC sont devenus des acteurs centraux dans les efforts visant à résoudre la pénurie de puces induite par la pandémie, qui a obligé les constructeurs automobiles à réduire leur production et a nui aux fabricants de smartphones, d'ordinateurs portables et même d'appareils électroménagers. En outre, l'on estime que l'Europe n'est pas un grand centre de développement de puces.
Selon les analystes, très peu de conceptions développées dans l'UE nécessitent les procédés de pointe pour lesquelles TSMC est réputée. Selon eux, la construction d'une installation de production de semiconducteurs compatibles N3 ou N2 (3 nm ou 2 nm) en Europe n'a pas beaucoup de sens (c'est également ce que souhaitent les bureaucrates européens). Néanmoins, il existe suffisamment d'entreprises européennes dans les secteurs de l'automobile et des télécommunications qui utilisent les nœuds avancés et matures de TSMC. Ces entreprises pourraient être intéressées par la fabrication de puces plus près de chez elles.
Mais les analystes estiment qu'il y a toujours un hic. Alors que les semiconducteurs eux-mêmes peuvent être produits presque partout, les installations de test et de conditionnement de TSMC se trouvent à Taïwan. Il existe des sociétés indépendantes d'assemblage et de test de semiconducteurs externalisés qui offrent des services similaires, mais elles sont également situées à Taïwan, en Chine ou dans d'autres pays asiatiques. Ainsi, si les puces peuvent être fabriquées en Europe, elles devront être expédiées en Asie pour y être testées et assemblées, puis renvoyées en Europe où elles seront utilisées.
Pour l'instant, TSMC ne parle pas de construire une installation de conditionnement en Europe, mais il semble que la décentralisation de l'ensemble de la chaîne d'approvisionnement pourrait être nécessaire si les clients de TSMC veulent éliminer les risques géopolitiques. Par ailleurs, il est important de noter que l'UE s'est engagée à investir jusqu'à 145 milliards d'euros pour développer des processeurs de nouvelle génération et faire évoluer le procédé de gravure à 2 nm pour les processeurs. Cela pourrait également servir à financer des unités de test et de conditionnement dans l'Union.
Source : Nikkei
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