Est-il possible en Europe de faire émerger 10 géants de la Tech valant au moins 100 milliards d'euros chacun en 10 ans ? Le président français Emmanuel Macron le pense et donne pour exemple l'évolution relativement rapide du climat technologique français entre 2017 et 2020. « En France, nous avons un bilan qui nous permet de dire que c'est crédible », a ajouté Macron lors d'un événement au palais de l'Élysée mardi. Au total, la France compte 15 licornes en 2021 – c'est-à-dire des startups valorisées à plus d'un milliard de dollars – contre seulement trois en 2017.
« Nous devons construire un écosystème et des champions européens plus forts, et les entrepreneurs doivent pousser les gouvernements à être plus efficaces pour rester dans la course face aux puissances américaines et chinoises », a-t-il ajouté. En effet, il a reçu en audience mardi à l'Élysée une dizaine de ministres européens des investisseurs et entrepreneurs du marché numérique français. Il a également reçu des membres d'un groupe baptisé Scale-Up Europe. Ce groupe comprend des startups européennes comme Bolt et Blablacar et des multinationales comme BMW. Ils ont présenté au président 21 recommandations.
Cela devrait aider les géants locaux de la Tech à émerger. Ce plan devrait aider la France à améliorer son agenda numérique pour sa présidence du Conseil de l'UE en janvier 2022. Parmi les 21 suggestions du rapport présenté au président Macron mardi, on retrouve notamment la création d’un « écosystème favorable à la cotation des entreprises technologiques sur les marchés boursiers européens », d’un « statut de Tech worker pour les talents européens, avec un contrat standardisé et la portabilité des droits sociaux sur le continent ainsi que l’aide à l’installation de ces talents », etc.
En outre, ils proposent également de créer un « cadre normalisé pour le transfert de brevets afin d’accélérer les transferts de technologie hors des universités, et entre les startups et les grandes entreprises » ou « de mettre en place un crédit d’impôt pour les entreprises européennes qui investissent dans les startups européennes ». Le président français a repris à son compte certaines des recommandations de Scale-Up Europe. Il a promis de soutenir ce que l'on appelle la "deeptech", c'est-à-dire les entreprises qui proposent des solutions reposant essentiellement sur la science et l'ingénierie.
Il a également approuvé la proposition de Scale-Up Europe de mettre en place un visa technologique européen et a déclaré qu'il promouvrait au niveau européen un plan visant à inciter les investisseurs institutionnels à investir davantage dans les startups. « La France essaiera d'apporter un maximum de réglementation et de progrès pendant sa présidence de l'UE », a déclaré Macron à l'auditoire. « Il n'y a pas de souveraineté sans champions locaux. La première souveraineté est industrielle, liée aux entreprises. La seconde est la régulation et les deux vont ensemble. Sans réglementation, il n'y a pas de normes », a-t-il déclaré.
Notons que ces objectifs s'inscrivent dans le cadre d'une initiative européenne que la France tente de mener pour améliorer le financement des startups, en particulier dans les dernières phases de leur croissance, pour les propulser dans une catégorie plus importante où elles peuvent attirer davantage d'investisseurs et de personnel de haut niveau. Macron a poussé pour faire de la France une "startup nation" depuis son arrivée au pouvoir en 2017, rendant le pays plus attractif pour les investisseurs étrangers grâce à des réformes du travail, par exemple.
En faisant l'état des lieux en Europe, l'on remarque que le bloc compte déjà deux entreprises de plus 100 milliers d'euros. Le premier est le géant néerlandais des équipements pour semiconducteurs ASML, d'une valeur de 243 milliards d'euros, et le deuxième, le spécialiste de l'informatique d'entreprise SAP, d'une valeur de 148 milliards d'euros. Le groupe de paiement Adyen et le fabricant de logiciels industriels Dassault Systemes sont proches, avec respectivement 58 et 52 milliards d'euros. Il suffirait d'augmenter de 10 % par an le nombre actuel d'entreprises technologiques régionales pour obtenir six groupes de plus de 100 milliards d'euros en 2030.
En d'autres termes, le bloc pourrait atteindre l'objectif de Macron sans l'aide de l'État. Si le plan du président français est perçu comme une bonne initiative par certains, d'autres estiment qu'elle est relativement modeste. Alors, pourquoi ne pas viser 20 ou 30 mastodontes, et choisir des secteurs où les gouvernements pourraient apporter leur aide ? L'année dernière, l'Europe aurait récolté 40 % de tous les capitaux investis dans le monde dans des tours de table de moins de 5 millions de dollars, contre 35 % pour l'Amérique. Les investisseurs en capital-risque semblent voir le potentiel de la région.
L'on estime donc que Macron devrait en faire autant. De son côté, le président français reste confiant et espère que les autres pays du bloc accompagneront les nouvelles réformes qu'il juge indispensables. « L'Europe doit renforcer le marché unique, construire un véritable marché unique numérique, terminer le travail pour le capital de marché et le financement de l'économie », a déclaré Macron. Les efforts français pour créer des licornes semblent cependant toujours éclipser par les équivalents américains. L'année dernière, Macron a déclaré que la France devrait compter 25 licornes d'ici 2025.
Source : Scale-Up Europe
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