Contourner les sanctions économiques grâce au minage de bitcoins
Le défi majeur de la filière des cryptomonnaies est leur forte consommation d'énergie. Le bitcoin et les autres réseaux de cryptomonnaies fonctionnent à l'électricité, et en grande quantité. Les mineurs de bitcoins font fonctionner des ordinateurs gourmands en énergie, qui traitent les nouvelles transactions et les ajoutent ensuite à la blockchain. En retour, les mineurs sont récompensés par des bitcoins, provenant à la fois des frais de transaction et de la création de nouveaux bitcoins. En termes simples, le processus de minage convertit effectivement l'énergie en cryptomonnaie.
Cependant, alors que cette forte demande en énergie des cryptomonnaies inquiète certains gouvernements et experts qui cherchent activement des solutions pour la réduire, l'on apprend que l'activité du minage constitue un "effort de survie" dans certaines régions du monde. Elliptic estime que c'est actuellement le cas de l'Iran. En effet, les exportations de pétrole de l'Iran auraient chuté de 70 % lors de la dernière décennie, plongeant le pays dans une profonde récession, avec un chômage galopant. Face à cette situation, l'Iran se serait tourné vers une solution improbable : le minage de bitcoins.
Le rapport d'Elliptic estime que l'Iran s'est vite rendu compte que le minage de bitcoins représente une opportunité intéressante pour une économie frappée par des sanctions et souffrant d'une pénurie d'argent liquide, mais disposant d'un excédent de pétrole et de gaz naturel. Ainsi, en 2019, il aurait officiellement reconnu le minage de cryptomonnaies comme une activité industrielle. Il aurait établi par la suite un régime d'autorisation obligeant les mineurs à s'identifier, à payer un tarif plus élevé (mais toujours bon marché) pour l'électricité, et à vendre leurs bitcoins minés à la banque centrale iranienne.
Lorsque la législation est entrée en vigueur, des milliers de fermes minières sans licence auraient été identifiées et fermées. Ensuite, la perspective d'une énergie bon marché pour l'exploitation minière du bitcoin aurait attiré d'importants investissements étrangers, notamment de la Chine, leader du secteur. Plusieurs entreprises chinoises auraient obtenu ainsi des licences d'exploitation minière et se seraient installées dans le pays. Selon les informations rapportées par Elliptic, les entreprises ayant obtenu ces licences entretiennent de bonnes relations avec "l'armée iranienne".
Quelle est l'ampleur du minage de bitcoins en Iran ?
Selon Elliptic, les chiffres exacts sont très difficiles à déterminer, mais la société estime que les mineurs basés en Iran représentent environ 4,5 % de l'ensemble du minage de bitcoins. Ce chiffre serait basé sur les données recueillies auprès des mineurs par le Cambridge Centre for Alternative Finance jusqu'en avril 2020. Il serait également basé sur les déclarations de la société de production d'électricité contrôlée par l'État iranien en janvier de cette année. Selon ces déclarations, les mineurs consommaient jusqu'à 600 MW d'électricité pour leur activité de minage de cryptomonnaies.
Ce niveau de minage de Bitcoin rapporterait actuellement des revenus annualisés de près d'un milliard de dollars à l'État iranien. En outre, l'électricité utilisée par les mineurs en Iran nécessiterait l'équivalent d'environ 10 millions de barils de pétrole brut chaque année pour être produite, soit environ 4 % des exportations totales de pétrole iranien en 2020. D'après le rapport, l'État iranien vend ses réserves énergétiques sur les marchés mondiaux, en utilisant le processus de minage de bitcoins pour contourner les embargos commerciaux pesant sur son économie.
Les mineurs basés en Iran seraient payés directement en bitcoins, qui peuvent ensuite être utilisés pour payer les importations. Selon le rapport, cela permettrait de contourner les sanctions sur les paiements effectués par les institutions financières iraniennes. « C'est devenu pratiquement une politique officielle », indique le rapport de la société d'analyse. Elle note également qu'un groupe de réflexion rattaché au bureau du président iranien a récemment publié un rapport soulignant l'utilisation des cryptomonnaies pour éviter les sanctions.
L'autre chose, le rapport estime qu'un grand nombre de ceux qui effectuent les transactions en bitcoin et paient les frais aux mineurs basés en Iran sont situés aux États-Unis, le pays même qui est le fer de lance des sanctions.
Source : Elliptic
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