
Tout commence en juin 2020, période pendant laquelle trois associations engagées dans le programme SPIM (Système Publicitaire et Influence des Multinationales) ont publié un « rapport accablant sur les effets néfastes du marketing qui envahit nos vies et des publicités qui bombardent nos cerveaux », selon la France Insoumise. Les élus notent que ce rapport est une pierre supplémentaire à de nombreux rapports et études qui documentent comment la publicité commerciale « ce fléau, manipule nos pensées jusqu’au plus intime, à savoir nos désirs ». Chaque jour, une personne verrait entre 1 200 et 2 200 messages publicitaires et subirait 15 000 stimulis commerciaux. Selon les auteurs du rapport, « son but n’est pas d’accorder la marchandise aux besoins réels de l’individu, mais d’accorder les besoins de l’individu à l’accumulation infinie de marchandises (..) ». Ainsi, une étude publiée en 2018 démontre une hausse de 6,79 % du niveau global de consommation entre les années 1976 et 2006 due à la publicité.
Les élus continuent en ces termes :
« Les marques savent aujourd’hui parfaitement comment influer sur nos choix de consommation ou de non‑consommation. Sur nos choix de consommation tout d’abord en nous faisant passer pour indispensables des biens ou des services absolument inutiles ou superflus. Sur nos choix de non‑consommation en nous persuadant que la sobriété n’est pas une solution, mais qu’il est possible de consommer sans cesse plus sans que cela altère ni la quantité de ressources disponibles ni la qualité de l’environnement.
« L’écologie libérale, celle des incitations et des petits pas, ne sert à rien contre le changement climatique. Croire que la publicité peut être un levier de la transition écologique est au mieux une illusion, au pire un mensonge éhonté. En 2019, les investissements de publicité et de communication des secteurs automobile, aérien et énergies fossiles en France étaient estimés à plus de 5,1 milliards d’euros (dont 4,3 milliards d’euros rien que pour l’automobile, et seulement 5 % sont consacrés aux gammes de véhicules électriques). Autant d’argent qui n’est pas investi dans la recherche en faveur de cette transition. Il est impossible de préparer la conversion du parc automobile à des modes moins polluants et le développement des transports en commun si le monde de la publicité continue de vendre aux citoyens le mythe de l’accomplissement individuel et de l’épanouissement personnel par l’acquisition de véhicules à motorisation thermique ».
Ils estiment qu’à ce jour aucune mesure forte n’est prise pour faire taire le marketing climaticide des multinationales. Au contraire, tout est fait, sous couvert de la liberté d’entreprendre, pour laisser prospérer la publicité en faveur des secteurs et produits les plus polluants : voitures, smartphones et voyages en avion en tête. Récemment, l’autorité de régulation professionnelle de la publicité a censuré une publicité vantant les vélos VanMoof. En cause : la publicité en question donnerait une vision « anxiogène » du secteur automobile, pourtant responsable de 60 % de la pollution liée aux transports sur route en Europe.
Pour eux, le droit actuel est insuffisant. Les « mentions légales » sont trop générales et stigmatisent le consommateur au lieu de dissuader l’achat du produit : « C’est au consommateur qu’il est demandé de " mangez, bougez ", pas aux agro‑industriels d’arrêter de vanter les mérites d’une alimentation trop grasse, trop sucrée, trop salée. Encore moins de mettre un terme à sa production ! » France Insoumise estime que l’impact de la publicité alimentaire auprès des jeunes est bien documenté. Une étude comparative menée dans plusieurs pays (Australie, Royaume‑Uni, Italie, Pays‑Bas, États‑Unis) auprès d’enfants âgés de 6 à 11 ans a montré́ que l’exposition à la publicité́ alimentaire télévisée contribuait à la prévalence de l’obésité des enfants dans des proportions allant de 4 % à 40 % selon les pays. Une autre étude de simulation a pointé qu’entre un septième et un tiers des enfants obèses américains n’auraient pas été obèses en l’absence de publicité́ télévisée pour des aliments non favorables à la santé. Les élus notent que les trois quarts des investissements publicitaires alimentaires (72 %) réalisés sur les écrans télévisés jeunesse, soit 29,7 millions d’euros, portent sur des produits gras, sucrés et/ou salés.
Ainsi, en matière de publicité alimentaire, le Haut Conseil de la santé publique (HCSP) a fait le constat de l’insuffisance des engagements volontaires des professionnels. Le HCSP insiste, comme l’OMS, sur la nécessité pour les pouvoirs publics, de prendre des mesures contraignantes. Dans son rapport de 2017 sur le PNNS 2017‑2021, le HCSP recommande ainsi de réglementer le marketing et d’interdire les communications commerciales et la promotion des marques agroalimentaires pour les aliments de pauvre qualité nutritionnelle (classés D et E selon le Nutri‑Score). Pour France Insoumise, si la décision politique, par les interdictions et les contraintes, ne vient pas mettre un terme à cette influence, les publicitaires poursuivront la même trajectoire « écodestructrice ».
« Il faut avant tout chose balayer l’argument économique et le chantage à l’emploi, déployés par les défenseurs de cette activité et ses principaux annonceurs. En effet, parmi les quelque 3 millions d’entreprises en France, moins de 1 % ont accès au marché publicitaire. En 2014, à peine plus de 600 (soit 0,02 % d’entre elles) représentent 80 % des dépenses publicitaires engagées. Les TPE/PME qui constituent la grande majorité de nos emplois et notre tissu économique non délocalisable ne sont donc pas concernées par la régulation de cette activité. En réalité, la publicité est l’affaire de quelques grandes multinationales parmi les plus polluantes et d’une poignée d’annonceurs. À l’autre bout de la chaîne, certaines collectivités pourraient être réticentes à l’élimination de certaines publicités de leur espace public, ce pour des raisons financières. En réalité, la taxe locale sur la publicité extérieure se répartissait en 2018 entre quelques milliers de villes pour un montant total de 180 millions d’euros. Près de 40 millions d’euros par an vont à la seule ville de Paris ».
L’article unique prévoit en premier lieu l’interdiction de toute publicité numérique et lumineuse, ainsi que l’affichage de publicité commerciale dans les gares, aéroports et stations de transports publics de personnes. Il vise ensuite à réguler fermement les publicités qui portent atteinte à l’environnement et/ou à la santé humaine. Il interdit tout d’abord toute forme de publicité ou action de communication commerciale qui inciteraient directement ou indirectement à dégrader, abandonner ou remplacer prématurément des produits encore fonctionnels. Il interdit également les messages publicitaires relatifs à des secteurs polluants et ceux encourageant les pratiques alimentaires dangereuses pour la santé. Il pose ainsi les fondements d’une « loi Evin Climat » en interdisant notamment les publicités relatives à l’automobile, les vols aériens entre deux villes métropolitaines ou encore les téléphones portables et l’eau en bouteille plastique jetable et en encadrant fortement la publicité relative à la malbouffe et à destination des enfants, en suivant les préconisations du Haut Conseil de la santé publique et de l’OMS.
Source : Assemblée nationale
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