L'administration Biden hérite d'un certain nombre de poursuites visant à briser les grands monopoles technologiques aux États-Unis. C’est une cause que la plupart des Américains soutiennent, selon un nouveau sondage réalisé par Vox et Data for Progress.
Quelque 59 % des personnes interrogées dans le cadre du sondage en ligne ont déclaré être en faveur de la dissolution des grands monopoles technologiques, dont 24 % qui ont déclaré soutenir fermement une telle initiative. Les efforts pour freiner les monopoles technologiques pourraient inclure l'annulation de l'acquisition d'Instagram par Facebook ou l'interdiction à Amazon d'être à la fois un marché en ligne et un vendeur sur ce marché.
Un pourcentage encore plus élevé (près des deux tiers) d'Américains estiment que la puissance économique de ces entreprises technologiques est un problème auquel est confrontée l'économie américaine. Le sondage Vox and Data for Progress a été mené en janvier auprès de 1 164 électeurs américains probables.
De manière frappante, les sentiments à propos de la Big Tech et de l'antitrust sont généralement cohérents parmi les démocrates et les républicains, bien que les républicains soient plus susceptibles de dire qu'il s'agit là d'un problème et qu'il doit y avoir un démantèlement. Cela reflète le rare soutien bipartite que les affaires antitrust ont vu de la part des législateurs (les nouvelles données étaient cohérentes avec un sondage similaire Vox et Data for Progress mené en 2019).
Les raisons pour lesquelles les démocrates et les républicains croient que les entreprises technologiques détiennent trop de pouvoir varient cependant.
Par exemple, une autre question du sondage a révélé que si 87 % des démocrates approuvaient la décision de Twitter de suspendre définitivement le compte du président de l'époque Donald Trump à la suite de l'émeute du Capitole, seuls 28 % des républicains approuvaient; 67 % des républicains n’ont pas approuvé la décision. La grande différence dans les réponses indique des critiques divergentes des entreprises technologiques entre les deux parties. Ceux de droite ont fustigé les grandes entreprises technologiques pour ce qui été perçu comme étant une censure, tandis que ceux de gauche ont accusé des entreprises comme Facebook et Google d'attiser l'extrémisme en ligne.
Quoi qu'il en soit, le soutien à une action antitrust est l'une des raisons pour lesquelles le gouvernement, après deux décennies de clémence, a déposé un total de cinq plaintes antitrust contre les entreprises technologiques à la fin de l'année dernière. En décembre, la Federal Trade Commission et les procureurs généraux de 48 États et territoires ont intenté deux poursuites contre Facebook, alléguant qu'il maintenait illégalement son monopole sur les réseaux sociaux par le biais d'acquisitions de sociétés rivales, notamment Instagram et WhatsApp. Google fait face à trois plaintes antitrust au nom de presque tous les États et du ministère de la Justice : deux concernant son moteur de recherche et son activité d'annonces de recherche et un autre concernant son activité de technologie publicitaire. Les trois plaintes accusent le géant des moteurs de recherche de maintenir illégalement ses monopoles.
En octobre, le Congrès a publié un rapport de 400 pages affirmant que Facebook, Google, Apple et Amazon étaient tous engagés dans un comportement anticoncurrentiel. Il est donc possible qu'Apple et Amazon soient également confrontés à des poursuites antitrust à l'avenir.
Les affaires existantes seront probablement combinées en moins de poursuites, dont les issues pourraient prendre des années à être déterminées. Elles dépendront également, en partie, des nominations que le président Biden fait aux agences gouvernementales qui supervisent les affaires antitrust: la FTC et le ministère de la Justice.
Lina Khan, qui a été conseiller juridique dans l'enquête antitrust de la Chambre et est considérée comme une ennemie des Big Tech, est l'une des meilleures candidates pour un poste de commissaire à la FTC. Le leadership du ministère de la Justice pourrait être plus favorable aux Big Tech. L'American Prospect et the Intercept ont rapporté que les deux meilleurs candidats à la tête de sa division antitrust, Renata Hesse et Juan Arteaga, avaient déjà conseillé de grandes entreprises technologiques.
Un peu de contexte
Après avoir été pointé du doigt en octobre par la Chambre américaine des représentants, qui estime que lui et ses compères Google, Amazon et Apple enfreignent la loi antitrust, Facebook se retrouve à nouveau dans le viseur d'un groupe d'États américains. Cela fait suite à la plainte antitrust de sept États américains, en association avec le DoJ, contre Google à laquelle l'entreprise doit répondre d'ici le 19 décembre.
Les GAFA sont dans le collimateur des autorités politiques qui les accusent, depuis un certain temps, d’être trop puissants pour respecter les règles. Le premier réseau social au monde Facebook est également le propriétaire de la messagerie WhatsApp et du site de partage de photos Instagram. Google de son côté, premier moteur de recherche sur Internet au monde, détient le site de partage de vidéos YouTube et le système d’exploitation mobile Android qui équipe l’immense majorité des smartphones vendus dans le monde. Amazon, pour sa part, leader mondial du commerce électronique, est aussi un géant du Cloud Computing.
Depuis le début de l'année 2020, la Big Tech a été la cible d'une importante enquête de la Chambre des représentants des États-Unis, qui a publié un rapport contenant ses conclusions en octobre dernier. L'enquête a porté sur les pratiques commerciales de la Big Tech, notamment Google, Facebook, Apple et Amazon. Le rapport a accusé ces sociétés d’avoir acheté les plus petites entreprises principalement pour éviter la concurrence.
Il les accuse aussi de faire du favoritisme quant à leurs propres services et produits et de détenir un pouvoir démesuré sur les autres entreprises qui utilisent leurs plateformes.
L'un des points qui viennent illustrer la situation est l'entente alléguée entre Facebook et Google sur le marché de la publicité en ligne. En 2017, Facebook a déclaré qu'il testait une nouvelle façon de vendre de la publicité en ligne qui menacerait le contrôle de Google sur le marché de la publicité numérique. Mais moins de deux ans plus tard, Facebook a fait volte-face et a déclaré qu'il rejoignait une alliance d'entreprises soutenant un effort similaire de Google.
Facebook n'a jamais dit pourquoi il s'était retiré de son projet, mais des éléments de preuves présentés dans une action en justice antitrust déposée par 10 procureurs généraux d'État le mois dernier indiquent que Google s'était entendu avec Facebook. Selon les documents judiciaires, c’est en septembre 2018 que Facebook a signé un accord dans lequel le réseau social a accepté de ne pas faire concurrence aux outils de publicité en ligne de Google. En retour, le numéro un des réseaux sociaux a reçu un « traitement spécial » lorsqu'il les a utilisés lui-même.
Les détails de l'accord, basés sur des documents que le bureau du procureur général du Texas a déclaré avoir découverts dans le cadre de la poursuite multiétat, ont été fortement censurés dans la plainte déposée devant un tribunal fédéral du Texas le mois dernier. Mais ils n'ont pas été cachés dans une version préliminaire de la plainte examinée par le New York Times.
Selon le Times, le contrat « Jedi Blue » aurait permis à Facebook d’être avantagé dans le domaine de la publicité en ligne. Les conditions offertes par Google à Facebook donnaient au géant des réseaux sociaux des avantages sans précédent. Facebook a eu plus de temps pour faire des offres sur la plupart des enchères et Google a fourni des informations confidentielles à Facebook sur les audiences. Dans le cadre de cet accord illégal, Facebook avait promis de se positionner sur au moins 90 % des enchères dès lors qu’il pourrait identifier l’audience.
Facebook aurait donc dépensé au moins 500 millions de dollars par an dans le cadre de l’accord « Jedi Blue ». Selon le New York Times, les autres partenaires publicitaires de Google n’auraient jamais pu faire une aussi bonne affaire. La firme de Mountain View a don délibérément favorisé le géant des réseaux sociaux en lui garantissant un nombre déterminé de gains publicitaires.
Source : résultats du sondage
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Le démantèlement des grandes entreprises technologiques, une initiative qui gagne en popularité ?
59 % du panel d'un sondage réalisé par Data for Progress se disent en faveur de cette mesure
Le démantèlement des grandes entreprises technologiques, une initiative qui gagne en popularité ?
59 % du panel d'un sondage réalisé par Data for Progress se disent en faveur de cette mesure
Le , par Stéphane le calme
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