
D’après la plainte, en plus d'avoir collecté du contenu utilisateur tel que des vidéos sans leur consentement, TikTok a aussi des politiques de confidentialité « ambiguës ». Elle soulève des inquiétudes quant au fait que les données recueillies par TikTok pourraient être utilisées pour identifier, profiler et suivre les utilisateurs aux États-Unis. Selon la plainte, l'entreprise utiliserait ces données pour vendre des publicités ciblées.
La plaignante répond au nom de Misty Hong, une étudiante résidant à Palo Alto en Californie, et qui a téléchargé l'application TikTok en mars ou avril 2019, mais n'a jamais créé de compte. Pourtant, elle affirme dans sa plainte que, des mois plus tard, elle a découvert que TikTok avait créé un compte pour elle à son insu et a produit un dossier d'informations privées la concernant. Ces informations comprendraient également des informations biométriques glanées dans des vidéos qu'elle avait créé, mais qu'elle n'avait jamais publiées.
La plainte accuse TikTok d'avoir transféré des données d’utilisateur à deux serveurs distincts en Chine, bugly.qq.com et umeng.com, pas plus tard qu'en avril 2019, y compris des informations sur le périphérique de l'utilisateur et tous les sites Web visités par l'utilisateur. TikTok a maintenu qu’il stocke toutes les données des utilisateurs américains aux États-Unis avec des sauvegardes à Singapour. « Nous n'avons pas de priorité plus élevée que la promotion d'une expérience d'application sûre et sécurisée pour nos utilisateurs. Nous n'avons jamais fourni de données utilisateur au gouvernement chinois, et nous ne le ferions pas si cela nous était demandé », a déclaré TikTok dans un communiqué envoyé par courriel.
Les hésitations américaines ?
C'est dans ce contexte qu'en août 2020, le président américain Donald Trump a publié des décrets visant à interdire les transactions américaines avec WeChat, l'application de messagerie appartenant à Tencent Holdings, et ByteDance, propriétaire de TikTok, dans les 45 jours, décrivant les entreprises chinoises comme des menaces pour la sécurité nationale.
Le décret sur la lutte contre la menace posée par TikTok indique ce qui suit à propos de l'application : « TikTok capture automatiquement de vastes étendues d'informations de ses utilisateurs, y compris Internet et d'autres informations sur l'activité du réseau telles que les données de localisation et les historiques de navigation et de recherche. Cette collecte de données menace de permettre au Parti communiste chinois d'accéder aux informations personnelles et exclusives des Américains - permettant potentiellement à la Chine de suivre les emplacements des employés et des sous-traitants fédéraux, de constituer des dossiers d'informations personnelles pour le chantage et de mener de l'espionnage d'entreprise. »
La porte de sortie accordée à TikTok était de vendre son activité américaine à une entité américaine.
Le ministère chinois des Affaires étrangères n'a pas tardé à monter au créneau et s'est opposé fermement aux décrets annoncés par le président américain Donald Trump. Pékin défendra les droits et intérêts légitimes des entreprises chinoises et les États-Unis devraient supporter les conséquences de leurs actions, a déclaré à la même période le porte-parole du ministère Wang Wenbin aux journalistes lors d'un briefing quotidien, sans donner de détails.
« Les États-Unis utilisent la sécurité nationale comme excuse et utilisent le pouvoir de l'État pour opprimer les entreprises non américaines. C'est juste une pratique hégémonique. La Chine s'y oppose fermement », a-t-il indiqué.
Mais TikTok a eu plusieurs fois un sursis. En effet, fin octobre, le juge Wendy Beetlestone a donné son accord, estimant qu'une fermeture causerait aux créateurs « une perte économique significative et irrécupérable » et accordant une injonction contre l'interdiction. D'ailleurs, un groupe de créateurs de contenu qui gagnent leur vie en utilisant TikTok a figuré parmi les personnes qui ont porté plainte contre l'administration Trump, alléguant que l'interdiction allait fondamentalement détruire leurs moyens de subsistance.
Avant cette dernière injonction du juge sur laquelle s’est alignée l’administration Trump, TikTok a intenté une action en justice contre le gouvernement peu après la signature des décrets en août. Le 27 septembre, le juge Carl Nichols du tribunal de District américain pour le District de Columbia a émis une injonction préliminaire dans le procès qui a empêché le Département de Commerce d'ordonner aux app stores d’Apple et de Google de supprimer TikTok pour un téléchargement par les nouveaux utilisateurs.
Le sort de l’application TikTok aux États-Unis est toujours en suspens, mais au moins les utilisateurs aux États-Unis peuvent encore la télécharger et installer les correctifs.
« Depuis un an, TikTok s'est engagé activement et de bonne foi avec le CFIUS pour répondre à ses préoccupations de sécurité nationale, même si nous ne sommes pas d'accord avec son évaluation », a déclaré TikTok en novembre dans un communiqué. Le CFIUS est le Comité gouvernemental chargé d’examiner les investissements étrangers aux États-Unis. « Depuis que le président a donné son approbation préliminaire à notre proposition pour répondre à ces préoccupations, nous avons proposé des solutions détaillées pour finaliser cet accord, mais nous n'avons reçu aucun retour d'information substantiel sur notre vaste cadre de sécurité et de protection de la vie privée », a ajouté TikTok.
Selon Bloomberg, l’administration Trump ne va pas imposer sa propre date limite à ByteDance pour vendre ses activités américaines de la plateforme de partage de vidéos TikTok aux États-Unis. La dernière date limite, donnée par le Comité des investissements étrangers aux États-Unis (CFIUS) le 28 novembre, était le 4 décembre. Une prolongation n'est pas attendue, bien que la date limite actuelle « soit ignorée pendant que les discussions se poursuivent » entre l'administration Trump et TikTok, rapporte Bloomberg.
Le journaliste de CNN, Brian Fung, corrobore que les États-Unis n'appliqueront pas leur propre délai, ses sources suggérant de manière amusante que l'absence de délai est la preuve que les États-Unis sont « très motivés » pour finaliser les discussions sur la vente.
L'administration Trump a soutenu à plusieurs reprises que TikTok et ByteDance constituaient un risque pour la sécurité nationale, et le département américain du Commerce a émis un ordre de blocage des téléchargements de TikTok en septembre. Mais Trump a ensuite déclaré qu'il approuvait une offre d'Oracle et de Walmart « en principe » pour créer une nouvelle entité basée aux États-Unis appelée TikTok Global. Cet accord nécessite également l’approbation finale de la Chine, qui est très loin d'être acquise.
Sources : Bloomberg, Brian Fung
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