Qu'est-ce que le carrousel "Top stories" et quels sont les changements en vue ?
« Le carrousel "Top stories" est une collection d'articles de fond, conçue par un algorithme, qui est pertinente pour votre recherche », a expliqué Greg Barkley, directeur du référencement et des relations publiques numériques chez Effective Spend, un cabinet de conseil numérique. Ce contenu comprend une vignette, un titre et une date de publication, qui sont placés au-dessus des résultats de la recherche organique. « Le carrousel "Top stories" », poursuit-il, « est le moyen qu'utilise Google pour donner rapidement aux utilisateurs les nouvelles les plus récentes sur les sujets qu'ils recherchent ».
Depuis son apparition en 2016, Google n'inclut que les pages AMP dans cette section, concédant ainsi un privilège aux utilisateurs de cette technologie. Les pages mobiles accélérées (AMP) utilisent le framework de développement Web de Google pour accélérer les sites Web pour les appareils mobiles. « L'utilisation des pages mobiles accélérées est un facteur important », a expliqué Zaine Clark, responsable de compte SEO chez Seer Interactive, « et aide Google à afficher du contenu avec des temps de chargement plus rapides pour satisfaire les chercheurs ».
Google a déclaré qu'il souhaite simplement désormais classer les résultats de recherche autrement, après avoir mené quelques expériences couronnées de succès. « En mai dernier, nous avons annoncé que les signaux d'expérience des pages seraient inclus dans le classement de Google Search. Ces signaux mesurent la façon dont les utilisateurs perçoivent l'expérience d'interaction avec une page Web et contribuent à notre travail en cours pour faire en sorte que les gens profitent au maximum des expériences utiles et agréables du Web », explique Google.
« Au cours des derniers mois, nous avons constaté une augmentation médiane de 70 % du nombre d'utilisateurs s'engageant avec Lighthouse et PageSpeed Insights, et de nombreux propriétaires de sites utilisant le rapport Core Web Vitals de Search Console pour identifier les possibilités d'amélioration », précise-t-il. En outre, il a également ajouté qu'en plus des mises à jour de calendrier décrites ci-dessus, il prévoie de tester un indicateur visuel qui met en évidence les pages des résultats de recherche qui ont une grande expérience des pages.
"Top stories" serait-il victime des poursuites antitrust visant Google ?
Si dans son annonce, l'entreprise associe ce changement à "une nouvelle façon de mettre en valeur de grandes expériences dans la recherche Google", de nombreux analystes l'associent à la pression antitrust actuelle qui pèse sur elle. Ainsi, ils font remarquer que l'annonce d'un calendrier concret de l'abandon de "Top stories" intervient moins d'un mois après que le ministère américain de la Justice a qualifié Google de "gardien de monopole sur Internet" dans un procès pour violation des règles de concurrence. Il y a également les accusations sans cesse des entreprises concurrentes.
Dans le même temps, la pression monte sur les fonctionnaires de l'Union européenne (UE), qui a déjà infligé à Google une amende de plus de 9 milliards de dollars pour violation des règles de concurrence en vigueur dans l'union. « J'ai toujours pensé que l'AMP posait des problèmes antitrust », a déclaré Sally Hubbard, auteure du livre "Monopolies Suck" et experte antitrust de l'Open Markets Institute.
Google rejette ses allégations, disant qu'il ne compte pas abandonner la technologie AMP. Meghann Farnsworth, porte-parole de Google, n'a pas abordé le moment du changement, mais a déclaré que l'AMP n'est pas mort, affirmant que la société est "pleinement engagée dans l'AMP en tant que technologie". « L'AMP continue à être nécessaire pour certaines fonctionnalités qui ne sont pas techniquement possibles sans elle, comme "glisser pour visiter" dans Google Images », a-t-elle précisé, ajoutant qu'elle est "préférée" dans le flux "pour vous" de l'application de lecture de nouvelles de Google, Google Discover.
Quelle que soit la raison de ce changement, certains sites d'information sont soulagés de ne pas devoir continuer à utiliser le standard mobile "préféré" de Google. « Nous sommes ravis de voir Google commencer à tracer une voie pour s'éloigner de la norme AMP », a déclaré Robin Berjon, responsable de la gouvernance des données au New York Times, dans une déclaration écrite en réponse aux questions de The Markup, une organisation américaine à but non lucratif, qui se concentre sur le journalisme axé sur les données, couvrant l'éthique et l'impact de la technologie sur la société.
« L'AMP maintient les utilisateurs dans le domaine de Google et détourne le trafic d'autres sites Web au profit de Google », peut-on lire dans une lettre ouverte de 2018 signée par plus de 700 technologues et défenseurs. « À l'échelle de milliards d'utilisateurs, cela a pour effet de renforcer encore la domination de Google sur le Web ». Selon Statcounter, près de neuf recherches sur dix sur Internet aux États-Unis sont effectuées sur Google. Le deuxième moteur de recherche le plus populaire, Microsoft Bing, ne détient que sept pour cent du marché, soit moins d'une recherche sur dix aux États-Unis.
Un ingénieur a déclaré à The Markup, sous couvert d'anonymat, que c'est la taille de Google qui a conduit les éditeurs à utiliser AMP. Le moteur de recherche chinois Baidu a lancé une initiative similaire à l'AMP appelée MIP, qui n'a pas eu de succès auprès des éditeurs américains. Bing utilise également l'AMP, mais n'a pas l'influence que Google a sur les éditeurs. Cela dit, quelques experts de l'industrie spéculent maintenant que l'abandon du carrousel "Top stories" pourrait à terme rendre le format AMP obsolète.
Par exemple, Matt Dorville, responsable SEO de BuzzFeed, s'est dit "sceptique" quant à l'utilisation de l'AMP une fois que Google cessera de l'exiger pour "Top stories". Il prévoit de faire des tests approfondis pour s'assurer que l'abandon du format ne tue pas le trafic du site et surveillera les choix des autres acteurs majeurs qui utilisent l'AMP, comme Axios et The Guardian. « On ne veut jamais vraiment être le premier à faire ces changements », a-t-il déclaré.
Google aurait utilisé la technologie mobile AMP pour ses propres intérêts
Dans une analyse publiée par The Markup au début de l'année sur 15 269 recherches populaires sur Google, l'organisation a constaté que les résultats compatibles avec l'AMP apparaissaient souvent, occupant plus de 13 % de la première page de résultats. Selon le rapport, Google a pris 41 % de la page pour ses propres produits. À l'époque, la porte-parole de Google, Lara Levin, a qualifié la méthodologie utilisée par The Markup de "défectueuse et trompeuse". De nombreux sites d'information ont signalé que le passage à l'AMP a augmenté leur trafic sur le Web.
Cela est en grande partie dû à l'exposition accrue dans "Top stories". Toutefois, ces derniers ont aussi ajouté que les avantages financiers et la fidélité des lecteurs n'ont pas nécessairement suivi les clics supplémentaires. News Media Alliance a publié un livre blanc en juin qui indique que ses membres ont rapporté que les pages AMP génèrent moins de revenus et convertissent moins de lecteurs en abonnés. Un organisme de presse a déclaré que les visiteurs des articles diffusés par AMP lisaient moins d'articles par visite, ce que l'alliance a appelé "un et fait" (one and done).
Une autre a découvert que le nombre d'abonnés par million de lecteurs était inférieur de 39 % pour les lecteurs qui arrivaient par un lien AMP. Cependant, une porte-parole de Google a déclaré que d'autres ont trouvé un succès financier avec AMP, et a pointé du doigt un site Web de style de vie, avec un lien vers un article dans une page de succès AMP. « Il y a plusieurs facteurs qui affectent le potentiel de monétisation de n'importe quelle page », a-t-elle déclaré. Par ailleurs, Danielle Coffey, avocate générale et vice-présidente de News Media Alliance a déclaré que es coûts liés au soutien de l'AMP peuvent également être importants pour certains éditeurs.
« Pour nos plus petits éditeurs, c'est un peu difficile parce qu'ils n'ont pas toujours les ressources nécessaires pour mettre en forme le contenu d'une manière spécifique », a-t-elle dit. Et la norme AMP cause parfois des problèmes que les éditeurs n'ont pas le pouvoir de régler eux-mêmes. Par exemple, les éditeurs ont découvert qu'il n'y avait aucun moyen de permettre aux utilisateurs de refuser que leurs données soient vendues.
De son côté, Google affirme qu'il ne considère pas la norme AMP comme un facteur de "classement de recherche", bien qu'il ait déclaré que la vitesse de chargement des pages est un facteur. Pour s'affranchir de la norme AMP, une coalition d'éditeurs (New York Times, Washington Post, Gannett, etc.) a proposé le mois dernier que les entreprises technologiques et médiatiques collaborent sur une alternative à l'AMP qui permettrait aux plateformes d'agréger le contenu du Web sans "tirer parti du pouvoir du marché" pour le faire.
Sources : Annonce de Google, Rapport de The Markup
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