Le pouvoir des plateformes numériques va grandissant et le contexte actuel du Covid-19 est un accélérateur de ce phénomène. La ruée vers les services Internet depuis le début de la pandémie a mis en évidence l’importance de ces services dans la vie de l’ensemble des utilisateurs, des particuliers aux organisations. Toutefois, cette situation a également révélé que ces entreprises sont en mesure de transgresser le pouvoir qui leur était accordé en l'absence de règles plus strictes. L'UE travaille sur cette question depuis quelques mois et de nouvelles règles sont attendues dans les prochaines semaines.
À en croire les propos de Thierry Breton ce dimanche, les futures règles de l'UE incluront l'interdiction pure et simple d'un service Internet d'une entreprise, et peut-être de l'entreprise elle-même, lorsque celui-ci n'est pas conforme ou enfreint les règles en vigueur dans l'union. « Les services des entreprises technologiques pourraient être interdits sur le marché européen si elles ne respectent pas la réglementation européenne », a-t-il déclaré à l'hebdomadaire allemand Welt am Sonntag, alors que la Commission européenne finalise les règles sur les entreprises Internet.
Selon un rapport de Reuters, les règles établiront une liste de choses à faire et à ne pas faire pour les gardiens, des entreprises en ligne qui ont un pouvoir de marché, les obligeant à partager des données avec leurs rivaux et les régulateurs et à ne pas promouvoir leurs services et produits de manière déloyale. Le projet de règles permettrait à l'UE d'interdire des entreprises ou une partie de leurs services dans le bloc des 27 pays, ce qui serait une option extrême. Tant que le projet de règles n'aura pas été adopté, les autorités européennes de réglementation des ententes et du numérique n'ont pas le pouvoir d'imposer de telles interdictions.
Le nouveau projet de règles intervient alors que les critiques des géants technologiques américains se multiplient. Davantage d'entreprises et d'organismes industriels accusent ces géants d'Internet de pratiques anticoncurrentielles, leur permettant de conserver une position de leader sur les différents marchés. C'est le cas par exemple de Google qui est accusé d'user de pratiques déloyales pour demeurer le leader de la recherche en ligne et sur le marché de la publicité. Apple fait face à de pareilles accusations en ce qui concerne son magasin d'applications mobiles, l'App Store.
En juin dernier, Margrethe Vestager, la commissaire européenne à la concurrence, a déclaré que l'Europe a aujourd'hui plus que jamais besoin de règles plus strictes sur les géants américains de l'Internet, faisant allusion à ce que ces plateformes sont devenues au cours de ces 20 dernières années, mais aussi au fait que la crise sanitaire que nous traversons à amplifier leur pouvoir. « Ces dernières semaines, nous avons tous été fascinés par ce qui est possible en numérique. Mais le coronavirus a montré à quel point nous sommes dépendants des entreprises américaines, et c'était un signal d'alarme », a déclaré Vestager.
En outre, non seulement le nombre d'entreprises plaignantes, dont la plupart sont des entreprises relativement petites, s'accroît, mais bon nombre d'entre elles remettent aussi en question les décisions de l'UE contre les grandes entreprises américaines, affirmant qu'elles n'ont pas freiné leurs comportements prétendument anticoncurrentiels. Certains veulent que les autorités européennes aillent plus loin que le simple fait d'ordonner aux entreprises de mettre fin à ces pratiques. L'UE semble désormais prête à agir dans ce sens.
« Les règles strictes doivent être applicables », a déclaré Breton au média Welt am Sonntag ce dimanche. « Pour cela, nous avons besoin d'un arsenal approprié de mesures possibles : imposer des amendes, exclure des entreprises ou des parties de leurs services du marché unique, insister pour qu'elles se séparent si elles veulent conserver l'accès au marché unique. Ou une combinaison de toutes ces mesures ». Il a ajouté que ces sanctions ne s'appliqueraient qu'aux entreprises qui ne respectent pas les règles de l'UE, et que les mesures les plus sévères ne seraient utilisées que dans des circonstances exceptionnelles.
L'UE est désormais proche d'une proposition finale de nouvelles règles régissant les sociétés Internet. Selon le rapport publié par Reuters dimanche, le 2 décembre, Breton annoncera les nouvelles règles , connues sous le nom de "Digital Services Act" et "Digital Markets Act", en compagnie de Margrethe Vestager.
Source : Reuters
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