« Au cours de ces rencontres, j’ai noté une certaine frustration des différents acteurs de l’innovation. Les Collectivités Locales regrettent de ne récupérer que rarement leur mise lorsqu’elles investissent dans une entreprise et les investisseurs se sentent bridés par le poids des réglementations ». Tout va mal ? Pas du tout. Pour Bertrand Diard, malgré tout, « le système fonctionne plutôt bien aujourd’hui ».
Pour autant, tout ne va pas pour le mieux dans le meilleur des mondes. « Dans le panorama économique actuel, la tendance est avant tout de maîtriser les risques, mais dans l’univers particulier de l’innovation, cette question n’est qu’un aspect de la démarche ; la créativité, la création de valeur et l’accompagnement des entrepreneurs en sont d’autres, tout aussi importants ». Autrement dit, il faudrait arrêter d'avoir peur avant de parler, par exemple, de fiscalité. « Les français louent souvent et admirent la Silicon Valley, qu’ils considèrent comme l’Eldorado où rêve de s’implanter toute entreprise innovante. Je souhaite simplement rappeler qu’en Californie, il n’existe aucun mécanisme de défiscalisation des investissements ».
Pourquoi n'y a-t-il pas alors de Silicon Valley à la française ? Parce qu'en Californie, « les entrepreneurs, leurs partenaires et les investisseurs s’attachant surtout à créer de la valeur… en acceptant l’existence d’un écosystème établi, reposant sur des règles et des responsabilités bien définies », alors qu'en France, note le PDG de Talend « chacun cherche à dépasser son propre métier ». Une approche dangereuse. Et vaine.
Ne pas avoir peur des risques c'est aussi penser à la dimension internationale d'un business plan. Ce que ferait trop peu d'entrepreneur français. « c’est selon moi s’interdire toute chance de développer son entreprise : au XXIème siècle, le « terrain de jeu » des entrepreneurs est mondial ou n’est tout simplement pas, particulièrement dans l’univers des nouvelles technologies ». Et de citer son propre projet en exemple : « la force de Talend réside dans le fait que dès le départ, nous avons pris en compte l’international, non comme un passage obligé, mais quasiment comme un point de départ de notre développement ».
Mais le PDG de TALEND ne conseille pas qu'aux créateurs à changer de mentalité. Il en appelle également aux investisseurs. Par exemple, le secteur public ne devrait pas se focaliser sur le ROI (retour sur investissement) direct « Les Régions ont aujourd’hui un rôle fondamental d’amorçage, et si leur investissement n’est pas amorti directement, elles contribuent tout de même à la création d’emplois sur leur territoire ».
Quant aux Business Angels, « ils doivent valoriser la forte valeur ajoutée qu’ils sont capables d’apporter : leur expérience et leur savoir-faire d’entrepreneur, au-delà de toute considération financière ».
L'intéressant dans cette tribune libre est le refus de la « sinistrose », du pessimisme ou du jugement idéologique. Bertrand Diard se refuse à critiquer le système français public-privé, exercice souvent lié à ce genre de discours. « Nous disposons aujourd’hui en France d’un mécanisme de financement de l’innovation qui a prouvé son efficacité. De nombreuses sociétés nées en France sont aujourd’hui à l’avant-garde de secteurs tels que les biotechnologies ou les logiciels open source. Des financements d’origine nationale leur ont servi de tremplin pour se développer ensuite à l’international ».
Il souhaite simplement que ces succès se multiplient.
En changeant dans la continuité.
Bertrand Diard, PDG et co-fondateur de TALEND
Pour mémoire, Talend est un des leaders des solutions middleware open source avec plus de 2 000 clients payants issus de l’ensemble du globe (eBay, Virgin Mobile, Sony Online Entertainment, Deutsche Post, Allianz, etc.). Ses solutions d'intégration et de gestion de données ont été téléchargées plus de 12 millions de fois. La société, dont le siège social est à Suresnes, est présente en Amérique du Nord, en Europe et en Asie. Créée en 2005, elle emploie aujourd'hui plus de 200 personnes.
Et vous ?
Que pensez-vous de ces pistes de réflexion de Bertrand Diard et de son analyse de l'écosystème français autour de l'innovation et des nouvelles technologies ?