Le ministère américain de la Justice a intenté mardi une action antitrust en justice contre Alphabet Inc., la maison-mère de Google, affirmant que la société utilise son pouvoir de marché pour évincer ses rivaux. Le ministère a déclaré que rien n'était hors de propos, y compris une dissolution de la société de recherche et de publicité sur Internet.
« Aujourd'hui, des millions d'Américains dépendent d'Internet et des plateformes en ligne pour leur vie quotidienne », a déclaré le procureur général William Barr dans un communiqué. « La concurrence dans ce secteur est d'une importance vitale, c'est pourquoi la poursuite d'aujourd'hui contre Google pour violation des lois antitrust est une affaire de la plus haute importance à la fois pour le ministère de la Justice et pour le peuple américain ».
« Au cours des 16 derniers mois, la division antitrust a recueilli des preuves convaincantes que Google ne fait plus de concurrence uniquement sur le fond, mais utilise à la place son pouvoir de monopole - et des milliards de profit de monopole - pour verrouiller les voies clés de recherche sur les téléphones mobiles et les navigateurs ainsi que les appareils de nouvelle génération, privant les concurrents de la distribution et de l'évolutivité », a-t-il ajouté.
« Le résultat final est que personne ne peut contester la domination de Google en matière de recherches et de publicité relatives aux recherches ».
Des accords conclus avec Apple pour être le moteur de recherche par défaut sur Safari
Le ministère de la Justice a accusé Google de conclure des accords avec des grandes enseignes comme Apple et d'étouffer la concurrence par le biais de contrats et d'accords commerciaux exclusifs. Les accords de Google avec Apple, les opérateurs de téléphonie mobile et d'autres fabricants de téléphones pour faire de son moteur de recherche l'option par défaut pour les utilisateurs représentaient la majeure partie de sa part de marché dominante dans la recherche, a déclaré le ministère, avançant un chiffre estimé à environ 80%.
Voici quelques citations clés du procès :
« Google est un monopole sur les marchés des services de recherche généraux, de la publicité de recherche et de la publicité textuelle générale. Google utilise de manière agressive ses positions de monopole et l'argent qui en découle pour exclure en permanence ses concurrents et protéger ses monopoles ».
« En résumé, Google prive ses rivaux de la qualité, de la portée et de la position financière nécessaires pour monter une concurrence significative contre les monopoles de longue date de Google. En empêchant la concurrence de ses concurrents, Google nuit aux consommateurs et aux annonceurs ».
« En l'absence d'ordonnance du tribunal, Google continuera d'exécuter sa stratégie anticoncurrentielle, paralysant le processus concurrentiel, réduisant le choix des consommateurs et étouffant l'innovation. Google est désormais la porte d'entrée incontestée vers Internet pour des milliards d'utilisateurs dans le monde ».
« En conséquence, d'innombrables annonceurs doivent s’acquitter d’un péage aux monopoles de publicité de recherche et de publicité textuelle de Google, les consommateurs américains sont obligés d'accepter les politiques, les pratiques de confidentialité et l'utilisation des données personnelles de Google et les nouvelles entreprises dotées de modèles commerciaux innovants ne peuvent pas sortir de l’ombre de longue durée de Google ».
« Dans l'intérêt des consommateurs américains, des annonceurs et de toutes les entreprises qui dépendent désormais de l'économie Internet, le moment est venu d'arrêter le comportement anticoncurrentiel de Google et de restaurer la concurrence ».
« Bien qu'il soit possible de changer la recherche par défaut sur Safari de Google à un moteur de recherche général concurrent, peu de gens le font, ce qui fait de Google le moteur de recherche général exclusif de facto. C'est pourquoi Google verse à Apple des milliards chaque année pour le statut par défaut ».
Le ministère de la Justice a déclaré que Google estimait que près de 50 % de son trafic de recherche provenait des appareils Apple en 2019. Parce qu'il s'agit d'une si grande partie de ses requêtes, Google paie au fabricant d'iPhone entre 8 et 12 milliards de dollars par an pour qu'il reste l'option par défaut sur ses téléphones, iPad et ordinateurs Mac.
Cet arrangement a rendu Apple et Google extrêmement dépendants l'un de l'autre, tout en éclipsant les autres moteurs de recherche et, selon le gouvernement, en protégeant le monopole de Google. Chez Google, perdre sa pole position sur les iPhone est considéré comme un scénario « Code Rouge », selon la plainte, tandis que chez Apple, les paiements de Google représentent environ 15 à 20 % des bénéfices d'Apple.
D'ailleurs, les documents de Google reconnaissent « qu'être proposé par défaut sur Safari est un canal de revenus important » et que la perte de l'accord nuirait fondamentalement aux résultats de Google. Aussi, Google paie des milliards à Apple pour être le fournisseur de recherche par défaut, en partie parce que Google sait que l'accord augmente la valeur de l'entreprise; mais cela a pour conséquence de bloquer cet accès aux rivaux.
Google paie les fabricants de smartphones pour que ses applications soient préchargées
Dans la plainte, le ministère parle également des milliards de dollars que Google verse aux fabricants de smartphones tels qu'Apple, Samsung et d'autres pour être un moteur de recherche par défaut sur leurs appareils. « Certains de ces accords exigent également que les distributeurs prennent un ensemble d'applications Google, y compris ses applications de recherche, et les présentent sur des appareils dans des positions de premier ordre où les consommateurs sont les plus susceptibles de commencer leurs recherches sur Internet », indique la plainte.
La plainte, qui va déboucher sur un procès qui s’étendra potentiellement sur des années, pourrait déclencher une cascade d'autres poursuites antitrust de la part des procureurs généraux des États. Environ quatre douzaines d’États et de juridictions, dont New York et le Texas, ont mené des enquêtes parallèles et certains d’entre eux devraient déposer des plaintes distinctes contre l’emprise de la société sur la technologie de la publicité en ligne. Onze procureurs généraux, tous républicains, se sont engagés à soutenir le procès fédéral.
Le procureur général William P. Barr avait parlé publiquement de l'enquête pendant des mois. Il a exhorté le ministère à déposer une plainte d'ici la fin du mois de septembre, semant le chaos au sein des avocats parmi lesquels certains ont demandé plus de temps pour mieux se préparer et d’autres ont dénoncé des motivations politiques.
La plainte, déposée devant le tribunal de district des États-Unis dans le district de Columbia, sera également un test majeur des lois antitrust. De nombreux démocrates affirment que les lois doivent être ajustées pour tenir compte de l'ère numérique, lorsque de nombreux produits sont gratuits et qu'il peut être plus difficile de prouver le préjudice causé aux consommateurs par la ferme emprise d'une entreprise sur un marché.
Ryan Shores, un sous-procureur général adjoint, a déclaré que « rien n'est écarté de la table » en termes de recours.
Kent Walker : « les gens utilisent Google parce qu'ils choisissent de le faire et non parce qu'ils y sont contraints »
Google a longtemps nié les accusations de violations des lois antitrust et la société devrait se défendre férocement contre les accusations du gouvernement en utilisant son réseau mondial d'avocats, d'économistes et de lobbyistes. Alphabet, évalué à 1,04 billion de dollars et doté de réserves de liquidités de 120 milliards de dollars, a combattu des poursuites antitrust similaires en Europe. La société a dépensé 12,7 millions de dollars en lobbying aux États-Unis en 2019, ce qui en fait l'une des entreprises les plus dépensières à Washington.
La société affirme avoir une forte concurrence sur le marché de la recherche, avec plus de personnes trouvant des informations sur des sites comme Amazon. Elle affirme que ses services ont été une aubaine pour les petites entreprises.
« Les gens utilisent Google parce qu'ils choisissent de le faire et non parce qu'ils y sont contraints ou parce qu'ils ne peuvent pas trouver d'alternatives », a déclaré Kent Walker, directeur juridique de l'entreprise, dans un billet de blog.
Walker a déclaré que le procès ne ferait « rien pour aider les consommateurs. Au contraire, cela favoriserait artificiellement des alternatives de recherche de qualité inférieure, augmenterait les prix des téléphones et rendrait plus difficile pour les utilisateurs d'obtenir les services de recherche qu'ils souhaitent utiliser. »
Dans le même billet de blog, Google a fait valoir qu'il n'y avait rien de mal dans ses accords avec Apple ainsi que d'autres fabricants de smartphones, en les comparant aux marques de céréales payant pour un placement de premier plan dans les rayons des magasins. L'entreprise a également déclaré qu'il n'était pas difficile pour les consommateurs de changer les paramètres par défaut de Google vers un autre moteur de recherche.
Et d'expliquer « qu'Apple propose Google Search dans son navigateur Safari, car ils déclarent que Google est "le meilleur". Cet arrangement n'est pas exclusif - nos concurrents Bing et Yahoo! payent pour figurer en bonne place, et d'autres services concurrents apparaissent également. »
Sources : Ministère américain de la Justice réponse de Google aux allégations du DoJ
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Le ministère US de la Justice accuse Alphabet (Google) de protéger illégalement son monopole sur le marché de la recherche à coups de milliards de dollars
Et n'exclut pas un démantèlement
Le ministère US de la Justice accuse Alphabet (Google) de protéger illégalement son monopole sur le marché de la recherche à coups de milliards de dollars
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Le , par Stéphane le calme
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