
ByteDance a refusé l’offre faite par Microsoft et a misé sur un partenariat avec Oracle pour tenter de maintenir TikTok sur le marché américain. Il ne vendra pas à Oracle, au contraire, ce dernier sera actionnaire minoritaire dans la nouvelle entreprise qui verra le jour très prochainement si l’accord est approuvé par les autorités de régulation américaines. Ces détails ont été révélés hier par le média britannique Financial Times. Le média indique que ByteDance est sur le point de placer les activités mondiales de TikTok dans une nouvelle société dont le siège social sera aux États-Unis.
Selon les termes de l’accord, Oracle aura une participation dans l'ensemble de TikTok et pas seulement dans les opérations américaines. ByteDance de son côté sera l'actionnaire majoritaire de la nouvelle entité. Et la nouvelle qui pourrait étonner plus d’un est la présence de Walmart dans cet accord. Selon le rapport, le détaillant mondial, qui avait proposé une offre conjointe avec Microsoft, détiendrait également une participation minoritaire. Les personnes informées des discussions ont toutefois souligné que les détails exacts sont susceptibles d'être modifiés avant l’annonce officielle.
Toujours selon ces sources, la nouvelle entité qui a été annoncée aura un contrôle indépendant et sera gérée indépendamment de ByteDance. La société chinoise continuera à collaborer avec TikTok à l'échelle mondiale et gardera le contrôle du puissant algorithme qui maintient l'engagement des utilisateurs en prédisant le type de vidéos qu'ils apprécieront. Selon ces dernières, Oracle va traiter indépendamment les données américaines de TikTok et éventuellement les données du monde entier. Les données américaines seront gérées et stockées aux États-Unis pour répondre aux préoccupations de sécurité nationale dans ce pays.
Steven Mnuchin, secrétaire au Trésor américain, a confirmé à CNBC lundi que ByteDance s'était effectivement engagé à créer TikTok Global en tant que société basée aux États-Unis. Mnuchin n'a pas discuté des détails de la transaction, mais a mentionné qu'Oracle est un “partenaire technologique de confiance”. Il a ajouté qu'Oracle a fait « de nombreuses représentations pour les questions liées à la sécurité nationale ainsi que la promesse de créer TikTok Global en tant que société basée aux États-Unis avec 20.000 nouveaux emplois ». La proposition a été renvoyée au Trésor, car c'est là que siège le Comité des investissements étrangers dans le pays, ou CFIUS.
Le CFIUS est une entité avec des membres appartenant à une douzaine d'agences différentes. Il effectue des examens de sécurité nationale sur les transactions dans lesquelles une société étrangère acquiert toute ou partie d'une entreprise américaine. La proposition d’Oracle est en quelque sorte l'inverse, une entreprise américaine investit dans une société étrangère, et pourrait ne pas être normalement examinée par le CFIUS. Toutefois, il y a lieu de rappeler que la commission a été fortement impliquée dans toute la saga TikTok jusqu'à présent.
L'automne dernier, le CFIUS a entamé un examen rétroactif de TikTok, qui a été créé lorsque ByteDance a racheté la société américaine Musical.ly et lui a ensuite donné une nouvelle image. L’administration Trump a mis fin à cette révision le 14 août par un décret et a fait valoir que l'acquisition de Musical.ly représentait effectivement une menace à la sécurité nationale. Ainsi, la Maison-Blanche a interdit l'acquisition en exigeant que le CFIUS supervise une sorte de processus de désinvestissement. Cependant, il faut reconnaître que ByteDance a su bien placer ses coups sur l’échiquier.
Le CFIUS pourrait avoir du mal à continuer d’intervenir dans cette affaire. « Rien de cette transaction n'est habituel. Elle semble être entre les mains des politiciens plutôt que dans celles du personnel professionnel du CFIUS », a déclaré Paul Marquardt, avocat spécialisé dans les questions liées à la réglementation au sein du cabinet Cleary Gottlieb Steen & Hamilton. « Ce qui est inédit ici, c'est le caractère public et politique du processus, et la poursuite des négociations après l'émission d'un ordre de cession ». Alors, ByteDance a-t-il trouvé le bon moyen de rester maître de sa création ?
ByteDance espère également que la collecte de fonds de Larry Ellison pour Trump et le soutien du directeur général d'Oracle, Safra Catz, à l'équipe de transition de Trump il y a quatre ans, augmenteront ses chances. En outre, Financial Times a ajouté que des personnes impliquées dans le dossier ont déclaré que l'offre de ByteDance de créer une nouvelle entité basée aux États-Unis et la promesse de créer 20 000 emplois seraient probablement bien accueillies par Trump en année électorale, et au moment ou plusieurs Américains ont perdu leurs emplois à cause du Covid.
Selon des analystes, il est peu probable que la Maison-Blanche refuse l’offre de ByteDance. Par contre, si la transaction échoue, il y a de fortes chances que TikTok ferme aux États-Unis puisque ByteDance n’est pas en mesure de céder entièrement TikTok, notamment la technologie derrière le réseau social, à une entreprise non chinoise. Cela en raison des nouvelles règles restrictives sur les exportations de technologies, qui empêchent ByteDance et les autres sociétés chinoises de vendre leurs algorithmes à des sociétés non chinoises. D’ailleurs, Pékin ne digère pas du tout cette vente.
La Chine accuse les USA de “harcèlement économique”
Selon Bloomberg et d’autres médias américains, un haut cadre de Pékin a accusé les États-Unis, qui ont forcé la vente de TikTok pour des raisons de sécurité nationale, de “harcèlement économique”, tout en dénonçant les restrictions imposées par l'UE à la société Huawei dans des commentaires. Celui-ci aurait également déclaré que la Chine considère les agissements étrangers envers ses sociétés comme un traitement injuste de la part des gouvernements occidentaux. Ces déclarations montrent que le climat des affaires pourrait plus se compliquer entre le pays et l’occident.
« Ce qui s'est passé avec TikTok aux États-Unis est un exemple typique de possession coercitive », a déclaré le chef de la mission chinoise auprès de l'UE, Zhang Ming. « Certains politiciens américains essaient de construire un réseau soi-disant propre sous le couvert de l'équité et de la réciprocité et bla, bla, bla », a déclaré Zhang dans une interview à Bloomberg TV. « Ce n'est rien d'autre qu'une intimidation économique », a-t-il ajouté. Notons que les commentaires de Zhang représentent un refrain souvent répété de Pékin, qui a accusé Washington de cibler Huawei sans preuve et a qualifié la vente forcée de TikTok de « vol sanctionné par l'État ». Si la transaction est susceptible de plaire à Washington, ce n’est peut-être pas encore fini.
L'offre d'Oracle est très surveillée et devra passer un examen sur la sécurité nationale et obtenir l’approbation de Trump. Dans le même ordre, les termes de l'accord pourraient également nécessiter l'aval de la Chine et beaucoup craignent que Pékin refuse l’accord. Des personnes proches du dossier en Chine ont en effet confié aux journalistes que Pékin préfère voir TikTok fermer aux États-Unis plutôt que de céder à cette intimidation.
Source : Financial Times
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