
En effet, vendredi, pour la première fois en 12 ans, le ministère chinois du Commerce a publié des modifications dans sa liste de technologies qui ne peuvent pas être exportées et/ou nécessitent un permis pour être cédées à l'étranger.
ByteDance, la société mère de TikTok, devra se conformer à ces nouvelles procédures d'approbation. En tant qu'entreprise à croissance rapide, ByteDance dispose de nombreuses technologies de pointe dans l'intelligence artificielle et d'autres domaines, et certaines technologies peuvent avoir été couvertes par l’ajustement de ces règles, a expliqué le professeur Cui Fan de l'Université des affaires internationales et de l'économie internationale à Xinhua dans une interview.
Le ministère chinois du Commerce a ajouté 23 éléments à la liste des technologies concernées. Il peut falloir jusqu’à 30 jours pour obtenir un accord préliminaire en vue d’exporter une technologie.
Le professeur pointe en particulier deux nouveaux éléments qui ont été ajoutés dans la catégorie des technologies de traitement de l'information comme étant pertinents dans l'accord sur la vente des activités américaines de TikTok. Il s’agissait notamment de «technologie de service de transmission d'informations personnalisée basée sur l'analyse des données » et de « technologie d'interface interactive d'intelligence artificielle ».
Ce qui pourrait signifier que Microsoft, Oracle ainsi que d'autres entités américaines intéressées par le rachat des activités US de TikTok pourraient se voir refuser la vente ou faire face à un processus d’achat long et pénible dans l’optique de les décourager.
Il faut dire que la Chine est extrêmement fière de TikTok, car le service est la première application de l'Empire du Milieu autre qu'un jeu à vraiment marquer la culture occidentale. Les médias d'État utilisent ce succès comme un exemple d'entreprises chinoises capables d'égaler n'importe quelle nation ou entreprise.
Rendu à ce niveau, les spéculations sont nombreuses.
La Chine pourrait décider de faire supporter à ByteDance la douleur de ne pas pouvoir vendre ses opérations américaines, continuer à célébrer le succès de TikTok et expliquer son retrait des marchés étrangers comme une mesure défensive nécessaire. Comme TikTok n'opère pas en Chine, le public national pourrait accepter cette explication.
Ou la Chine pourrait décider de laisser ByteDance vendre, mais faire traîner le processus en lançant une série d’examens qui obligeraient Microsoft, Oracle et d’autres entités à patienter dans l’attente d’un accord. La Chine pourrait même attendre au-delà de la date limite imposée par le président Trump.
La Chine pourrait vouloir simplement montrer aux États-Unis et au reste du monde que les contrôles à l'exportation qu'ils ont utilisés pour rendre la vie difficile à Huawei peuvent jouer dans les deux sens.
Les actions des prétendants américains de TikTok Microsoft Corp, Oracle Corp et Walmart Inc ont chuté lundi après que la décision de la Chine de restreindre certaines exportations de technologies ait suscité des craintes que Pékin ne bloque tout accord pour les actifs américains de l'application vidéo.
La direction de TikTok a déclaré dans une note aux employés plus tôt la semaine dernière que la société « allait rapidement trouver des solutions aux problèmes auxquels nous sommes confrontés dans le monde, en particulier aux États-Unis et en Inde ».
Les changements apportés aux règles d'exportation de la Chine interviennent moins d'une semaine après que Kevin Mayar, ancien PDG de TikTok qui n’aura été en fonction que trois mois, a déclaré dans sa lettre de démission au personnel que la société s'attendait à « parvenir à une résolution très prochainement ».
« Ces dernières semaines, alors que le climat politique a fortement changé, j'ai mené une réflexion importante sur ce que les changements structurels de l'entreprise vont nécessiter, et ce que cela signifie pour le rôle mondial auquel j'ai souscrit », a confié Mayer à ses employés mercredi dernier dans un courrier électronique auquel Financial Time a eu accès. « Dans ce contexte, et comme nous espérons parvenir à une résolution très bientôt, c'est avec le cœur lourd que je voulais vous faire savoir que j'ai décidé de quitter l'entreprise », a-t-il ajouté.
Au milieu de la méfiance croissante entre Washington et Pékin, ce sont les entreprises chinoises, à l’instar de Huawei et de TikTok, qui semblent actuellement payer le prix fort. De son côté, TikTok a intenté une action en justice contre l'administration Trump, qui le classe comme une menace pour la sécurité nationale. « L'administration [Trump] a ignoré nos efforts considérables pour répondre à ses préoccupations, ce que nous avons fait pleinement et de bonne foi », a déclaré TikTok dans un communiqué de presse il y a quelques jours.
« Nous ne prenons pas les poursuites contre le gouvernement à la légère. Cependant, nous pensons que nous n'avons pas d'autre choix que de prendre des mesures pour protéger nos droits, ainsi que ceux de notre communauté et de nos employés », a ajouté l’entreprise. D’autre part, il y en a qui pense que les efforts de l’administration Trump pour forcer la vente des activités américaines de TikTok à une entreprise nationale mettent à mal la liberté sur Internet. « Si les États-Unis venaient à bannir TikTok, ce serait le début d’une plus sérieuse balkanisation d’Internet », estime Eva Galperin, directrice de la cybersécurité à l’Electronic Frontier Foundation.
Selon elle, l’excuse de la menace contre la sécurité nationale émise par Trump ne permet pas un pouvoir illimité. Galperin pense qu’il ne peut pas simplement décider qu’une chose représente une menace à la sécurité nationale américaine et la faire bannir du pays. « Il doit venir à bout du droit au premier amendement de TikTok de distribuer son code en vertu de la liberté d’expression, mais également du droit d’Apple et Google de distribuer TikTok dans leurs magasins d’applications », a-t-elle confié
Source : Xinhua, déclaration du ministère chinois du Commerce
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