Le bras de fer continue entre Uber et la justice californienne. La loi Assembly Bill 5, votée l’année dernière par la Californie, force la société à considérer ses chauffeurs comme des employés, mais Uber n’est pas d’avis. La société a déclaré mercredi qu’elle ne pouvait pas se permettre une telle chose et qu’elle se verrait dans l’obligation de fermer temporairement ses portes en Californie si la décision de justice est maintenue. Dans la foulée, Lyft, un concurrent d’Uber, a également fait la même déclaration. Les deux veulent garder leurs chauffeurs en tant qu’entrepreneurs indépendants.
En 2019, le législateur californien a adopté l’AB5 visant à forcer Uber et d'autres entreprises de la "gig economy" à traiter leurs chauffeurs comme des employés plutôt que comme des entrepreneurs indépendants. Si cette loi était appliquée, elle pourrait leur donner droit à la protection du salaire minimum, au remboursement des dépenses, à une assurance chômage et à d'autres avantages. L’AB5 marque ainsi un développement significatif dans la bataille sur le statut des chauffeurs. Cependant, les sociétés concernées sont réticentes quant à son application.
À l’annonce de la décision, les actions d'Uber et Lyft ont chuté de 5,3 % et 4,2 %, respectivement, en début de négociation. L’AB5 frappe au cœur du modèle économique des plateformes technologiques comme Uber et Lyft qui reposent sur des travailleurs contractuels qu’elles paient moins cher. Uber a déclaré que la loi punit les sociétés basées sur les applications et, avec Lyft, ils considèrent l’AB5 comme erronée. Dans le mois de juin, un porte-parole de Lyft a également rapporté que la majorité des chauffeurs veulent rester indépendants, même dans le contexte actuel du Covid-19.
Mercredi, l’État a déposé auprès d’un juge une demande d’injonction, empêchant Uber et son rival Lyft de continuer à classer leurs chauffeurs comme entrepreneurs indépendants plutôt qu'employés. Le juge a accordé dix jours à Uber et Lyft pour se conformer à cette décision. Toutefois, les deux entreprises ont déclaré qu’elles feraient appel de la décision au cours cette période avant son entrée en vigueur. En outre, Uber espère qu'une cour d'appel bloquera l'exécution de l'ordonnance pendant le déroulement de l'affaire, sinon elle serait obligée de fermer ses portes dans l’État.
Il semblerait que les deux entreprises considèrent cette ordonnance comme un forcing de la part des autorités californiennes. En effet, lorsque l’AB5 a été votée l'an dernier, Uber, Lyft et DoorDash ont dépensé plus de 100 millions de dollars dans le but de recueillir des signatures en faveur d'une initiative des électeurs qui annulerait la loi AB5. L’initiative devrait apparaître sur le bulletin de vote en novembre. Dara Khosrowshahi, PDG d'Uber, a averti que si l’ordonnance n’est pas annulée l’entreprise serait contrainte à fermer son service en Californie jusqu'en novembre.
« Nous pensons nous conformer aux lois », a déclaré Khosrowshahi sur MSNBC. « Mais si le juge et le tribunal constatent que ce n'est pas le cas, et qu'ils ne nous accordent pas un sursis pour arriver en novembre, alors nous devrons essentiellement fermer Uber jusqu'en novembre, date à laquelle les électeurs décideront », a-t-il expliqué. Selon lui, si le tribunal ne reconsidère pas sa décision, alors en Californie, il est difficile de croire que Uber pourra rapidement passer à un emploi à plein temps. Lyft a fait également la même annonce.
Lors d’un appel aux investisseurs mercredi, le PDG de Lyft a déclaré que l’entreprise fermerait ses activités en Californie si elle était obligée de requalifier les chauffeurs comme des employés. « Si nos efforts ici échouent, cela va nous obliger à suspendre nos activités en Californie», a déclaré hier John Zimmer, PDG de Lyft. « Par chance, les électeurs californiens peuvent faire entendre leur voix en votant oui à la proposition 22 en novembre », a-t-il poursuivi. Lyft se joint donc à Uber pour menacer de se retirer de l'un de ses plus importants marchés américains.
La position des deux sociétés pourrait être justifiée par l’état actuel de l’économie, bouleversée par la crise du Covid-19. À titre illustratif, les revenus de Lyft seraient de 339 millions de dollars au deuxième trimestre, soit une baisse significative de 61 % par rapport à la même période l'année dernière. Le nombre d'utilisateurs actifs de Lyft a également diminué de 60 %, passant de 21,8 millions l'année dernière à 8,7 millions ce trimestre. Lyft gagne de l'argent grâce à ses voyages en vélo, en scooter et à ses nouvelles activités de location de véhicules.
Contrairement à son rival Uber, Lyft n'a pas de véritable entreprise de livraison de nourriture et d'épicerie sur laquelle s'appuyer pour faire face à la baisse de ses activités principales de covoiturage.
Source : Reuters
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Le , par Bill Fassinou
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