Composé de douze chercheurs et médecins, le comité analyse recherche et expertise (CARE) a été installé mardi 24 mars à l’Élysée par Emmanuel Macron en présence du Premier ministre Édouard Philippe, du ministre de la Santé Olivier Véran et de la ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation Frédérique Vidal.
Présidé par Françoise Barré-Sanoussi, virologiste à l’Institut Pasteur/Inserm, prix Nobel et découvreuse du virus du SIDA, le comité assurera « le suivi des études thérapeutiques autorisées en France et les essais engagés sur des traitements à l’étranger ».
Selon un communiqué de la présidence de la République, repris par Reuters, le comité CARE doit accompagner la réflexion des autorités accompagnera « la réflexion des autorités sur la doctrine et la capacité à réaliser des tests ainsi que sur l’opportunité de la mise en place d’une stratégie numérique d’identification des personnes ayant été au contact de personnes infectées ». Celle-ci pourrait s’appuyer sur la géolocalisation des smartphones.
Le gouvernement privilégie le volontariat
En compagnie du ministre de la Santé Olivier Véran, Edouard Philippe a répondu, ce mercredi soir, aux premières questions de la mission d’information, nouvellement mise en place par les députés. Il a confirmé que l’option du tracking était sur la table. Toutefois aucune loi ne viendrait rendre obligatoire l’application : « Ces dispositifs en France ne seraient pas légalement permis. On pourrait peut-être sur le fondement d’un engagement volontaire utiliser ces méthodes pour mieux tracer la circulation du virus, mais nous n’avons pas d’instrument légal et nous ne travaillons pas sur des instruments qui le rendraient obligatoire ». En clair, le gouvernement laisse la question ouverte, mais lorgne une solution volontaire s’appuyant donc sur le consentement des personnes concernées.
Le principe serait donc le suivant : les Français utilisent volontairement une application mobile dédiée, qui enregistre les contacts des personnes qu’ils rencontrent. En cas de contraction du virus, toutes les personnes rencontrées précédemment, sur les 14 derniers jours par exemple, peuvent alors être alertées pour se faire dépister et/ou se mettre en quarantaine stricte.
Un tel dispositif a été déployé à Taïwan et en Corée du Sud. En Europe, le projet le plus abouti est mené par un consortium piloté par des chercheurs de l’université britannique d’Oxford. Ils ont travaillé sur une application mobile qui, grâce à la technologie sans fil Bluetooth, est capable de détecter si un autre téléphone mobile équipé de cette même application se trouve à proximité immédiate. Les données ainsi captées, conservées uniquement sur le téléphone et un temps défini pour ne pas violer la protection des données personnelles, ne serviraient qu’à alerter les personnes précédemment croisées en cas de symptômes et/ou de détection du virus.
Cette application, qui ne se base sur aucune géolocalisation, ne permet pas de savoir qui a fait courir le risque d'être contaminé ni où.
Ce schéma résume l’idée des chercheurs
« Une application de pistage des contacts, qui enregistre dans une mémoire locale les contacts de proximité et informe immédiatement ceux des cas positifs, peut permettre de contrôler l'épidémie si elle est utilisée par suffisamment de personnes », estiment les chercheurs dans la présentation de leurs travaux. « En ciblant les recommandations de quarantaine uniquement sur les personnes à risque, les épidémies pourraient être contenues sans avoir besoin de mesures de confinement généralisé, préjudiciables à la société ».
Les résultats de l’enquête du CARE
Selon une étude du CARE, le traçage des contacts au travers d’une application téléphone est très utile parce qu’un individu peut infecter les autres avant même de montrer les symptômes du Covid-19. Une mise en quarantaine immédiate permettrait de protéger la famille, les amis et les collègues de ceux qui sont entrés en contact étroit avec une personne atteinte du Covid-19. Si utilisée par un nombre suffisant de personnes, une telle application permettrait de contrôler l’épidémie sans avoir besoin de recourir à des mesures prolongées et très coûteuses de confinement général.
Raisons pour installer l’application
« Une politique de traçage numérique ne peut être efficace que s’il y a un nombre suffisant de citoyens qui adhèrent au principe et installent l’application. Les résultats de notre étude sont à ce titre encourageants et suggèrent le potentiel d’une telle approche.
« Notre étude suggère que le public français serait plus en faveur d’une installation volontaire que d’une installation automatique (avec possibilité de désinstallation), même si les deux modes d’installation semblent recueillir le soutien de la majorité des personnes que nous avons interrogées. Il y a des tensions évidentes entre ces deux approches. Une installation automatique amènerait certainement à des taux plus élevés d’adoption, par exemple parce qu’elle réduit les coûts d’installation. Cependant, le mode d’installation automatique a un caractère beaucoup plus intrusif et son implémentation pose des questions en termes de respect des lois en vigueur.
« Les raisons les plus souvent citées contre une installation sont la peur d’un piratage du téléphone, la crainte que le gouvernement ne renforce la surveillance, et une plus grande anxiété. Il semble essentiel de prendre en compte ces craintes dans le développement de l’application et les procédures d’installation. D’un point de vue technique, il semble tout à fait possible d’éviter l’utilisation des données GPS et de se reposer uniquement sur les capacités de la technologie Bluebooth (comme à Singapour). D’un point de vue organisationnel, il semble qu’il sera aussi crucial de faire appel à une autorité renommée, transparente, et indépendante du gouvernement, pour établir la confiance des Français dans cette approche. Nos résultats suggèrent en effet que beaucoup de Français se méfieront d’une politique de traçage numérique initiée par la seule volonté du gouvernement. À ce titre, une installation automatique pourrait être beaucoup plus difficile à instaurer politiquement ».
Sources : Assemblée Nationale, enquête CARE
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