
Ce lien signalait leur position, confirmant qu'ils restaient effectivement chez eux. Ces derniers devaient répondre aux messages dans un court laps de temps pour empêcher que des tiers ne trichent en laissant leurs téléphones pendant qu’ils s’aventurent à l’extérieur. En sus, les autorités ont procédé à des descentes sur le terrain pour confirmer la localisation des personnes placées en quarantaine. La dernière innovation technologique des autorités de Singapour pour le suivi des mouvements est l’introduction d’une application dénommée TraceTogether. Elle utilise la technologie Bluetooth pour noter les contacts étroits des citoyens – les personnes dont ils se sont approchés à moins de 2 mètres et avec lesquelles ils ont passé au moins 30 minutes. L’application de ces mesures de suivi combinées à d’autres recommandations de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) permet aujourd’hui au pays de 5,7 millions d’habitants d’être parmi ceux qui contrôlent le mieux la propagation de l’infection. À date, Singapour a l’un des taux d’infection les plus lents.
La France envisage-t-elle de suivre cet exemple ?
Le gouvernement français va-t-il envisager le pistage numérique de la population pour vérifier qu’elle respecte bien les règles du confinement et pour déterminer si des personnes a priori saines ont été en contact avec des individus contaminés par le coronavirus ? La France a annoncé mardi la mise en place d’un comité de chercheurs et de médecins qui sera notamment chargé de conseiller l’exécutif sur les pratiques de backtracking qui permettent d’identifier les personnes en contact avec celles infectées par le coronavirus.
Composé de douze chercheurs et médecins, le comité analyse recherche et expertise (CARE) sera installé à 17h00 ce mardi à l’Élysée par Emmanuel Macron en présence du Premier ministre Édouard Philippe, du ministre de la Santé Olivier Véran et de la ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation Frédérique Vidal.
Présidé par Françoise Barré-Sanoussi, virologiste à l’Institut Pasteur/INSERM, prix Nobel et découvreuse du virus du SIDA, le comité assurera « le suivi des études thérapeutiques autorisées en France et les essais engagés sur des traitements à l’étranger ».
Selon un communiqué de la présidence de la République, repris par Reuters, le comité CARE doit accompagner la réflexion des autorités accompagnera « la réflexion des autorités sur la doctrine et la capacité à réaliser des tests ainsi que sur l’opportunité de la mise en place d’une stratégie numérique d’identification des personnes ayant été au contact de personnes infectées ». Celle-ci pourrait s’appuyer sur la géolocalisation des smartphones.
Les contours de cette « stratégie numérique d’identification des personnes » demeurent flous à ce stade, à supposer qu’elle soit effectivement exécutée. Les avis du CARE sont a priori de nature consultative, de sorte qu’ils n’obligent pas le gouvernement. Cela étant, celui-ci assure fonder son action en prenant l’avis de la communauté scientifique.
Une stratégie déjà étudiée ou exploitée par d'autres pays
Cette stratégie, qui vise à utiliser les données de géolocalisation pour tenter d’enrayer la progression de l’épidémie, est déjà en œuvre ou en passe de l’être en Corée du Sud, en Allemagne, en Autriche, en Belgique, en Chine, en Corée du Sud, en Espagne, aux États-Unis, en Italie, en Israël, en Pologne, en Russie, ou encore à Taïwan.
En Israël, le Premier ministre Benjamin Netanyahu a, la semaine dernière, autorisé l'agence de sécurité intérieure du pays à puiser dans une vaste banque de données de téléphones portables (GPS), jusqu'alors non divulguée, pour retracer les mouvements des personnes qui ont contracté le coronavirus et identifier d'autres personnes qui devraient être mises en quarantaine parce que leurs chemins se sont croisés. L'idée est de passer au crible les données de géolocalisation collectées de façon régulière par les fournisseurs de téléphonie mobile israéliens sur des millions de leurs clients en Israël, de trouver les personnes qui ont été en contact étroit avec des porteurs de virus connus et de leur envoyer des SMS leur enjoignant de s'isoler immédiatement.
Depuis le début du mois dernier, Taïwan a bloqué l’accès à son territoire aux citoyens chinois, puis a mis en place un système de quarantaine ciblant ceux et celles qui s’étaient rendus dans les provinces chinoises touchées. À Taïwan, les porteurs potentiels du virus sont dotés d'un smartphone équipé d'un GPS et d’une application de pistage. Ces dispositifs font office de « barrière électronique » et permettent de garantir que les personnes en quarantaine restent chez elles en prévenant les forces de l’ordre si ces dernières sortent de quarantaine, s’éloignent de leur domicile ou éteignent leur téléphone. La police locale appelle jusqu’à deux fois par jour pour s’assurer que les personnes en isolement se trouvent là où ils devraient être.
À Hong Kong, les citoyens de retour au pays sont accueillis par des fonctionnaires de police qui leur posent des bracelets électroniques au poignet. Ces derniers sont liés à une application que les concernés téléchargent avant d’entrer en quarantaine pendant 14 jours. Ainsi, les autorités ont en temps réel la maîtrise de leur situation géographique.
En France, des voix se sont aussi élevées pour suggérer l’exploitation des données, mais pas forcément pour pister les individus : plutôt pour modéliser la propagation du Covid-19, ce qui pourrait servir aux épidémiologistes à l’avenir en cas de nouvelle crise sanitaire. C’est ce que ce défend par exemple Stéphane Richard, le PDG d’Orange, le plus important des opérateurs en France, dans les colonnes du Figaro :
« Nous travaillons avec l’INSERM pour voir comment les données peuvent être utiles pour gérer la propagation de l’épidémie. Un des chantiers du futur avec INSERM est de permettre aux épidémiologistes de modéliser la propagation de la maladie. Dans un tel usage, les données de géolocalisation sont anonymisées. Mais malgré ça, cela demanderait des ajustements réglementaires et un accord de la CNIL. Ainsi, il faudrait pouvoir garder des données sur une durée de temps longue, or actuellement nous devons les supprimer au bout d’un an, nous voudrions les garder deux ans. Ce sont des travaux tout à fait essentiels.
« Les données pourraient aussi être utilisées pour mesurer l’efficacité des mesures de confinement, comme en Italie. Je le répète nous parlons de données anonymisées et agrégées. Leur utilisation est indispensable pour mesurer le confinement et pour ajuster les dispositions en fonction des comportements. Il ne s’agit pas de traquer les gens individuellement. Il faut au moins savoir si les gens respectent les périmètres de confinement, ou s’ils se déplacent, sans pour autant savoir qui va où ».
Source : Reuters, Le Figaro
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