Les chiffres d’une collusion
Dès 2005, Practice Fusion s’est démarqué par son unique modèle d’affaires axé sur la mise à disposition gratuite des médecins de son logiciel de gestion des dossiers électroniques des patients. La manœuvre a permis à l’éditeur d’assurer une couverture sur ce que des rapports chiffrent à plus de 2600 villes au sein des États-Unis. Le cas Practice Fusion c’est aussi d’importants chiffres liés à des décès : 400 000 morts entre 1999 et 2017 par overdose aux analgésiques, d’après des publications de responsables de la filière santé US. Si l’éditeur se refuse à endosser à lui tout seul la responsabilité de tous ces décès, il reconnaît qu’il y a bien eu collusion avec une société pharmaceutique de la filière des opioïdes.
« Practice Fusion admet avoir sollicité et reçu des pots de vin d'une importante société pharmaceutique spécialisée dans la filière des opioïdes, ce, pour truquer son logiciel afin d'influencer les prescriptions des médecins », rapporte le département de la Justice des USA.
Le département de la Justice US rapporte que Practice Fusion a reçu 1 million de dollars de pots-de-vin pour truquer son logiciel de gestion des dossiers électroniques utilisé par les médecins. « Ce paiement a été financé par le département marketing de la société pharmaceutique et le truquage a été mis en œuvre avec la participation de ce département », souligne le DoJ. L’éditeur se retrouve ainsi sous le coup d’une sanction financière évaluée à 145 millions de dollars dont 26 millions de dollars d’amende pénale et 118,6 millions de dollars dédiés à des accords civils avec le gouvernement fédéral et les États.
Comment les lobbies s’ingèrent dans les logiciels…
C’est en 2013 que la société pharmaceutique se retrouve avec un problème sur les bras : les ventes de ses pilules antidouleur sont sur le déclin. C’est à cette période qu’elle entre en collaboration avec Practice Fusion si l’on s’en tient à l’exposé des faits accepté par l’éditeur dans le cadre d’un accord de poursuites différées. L' une des idées était de fournir les analgésiques de la société pharmaceutique à ceux qui ne prenaient pas d'opioïdes, autrement dit de créer de nouveaux patients. L’autre axe de l’entente entre les entreprises était de maintenir ceux des patients déjà sous traitement dans le créneau et même de revoir à la hausse leurs doses via des analgésiques à effet prolongé. Un autre objectif poursuivi par Practice Fusion et la société pharmaceutique était de fournir des ordonnances plus longues. En 2017, l’entrée en partenariat des deux entités débouche sur une publication de recherche qui décrit un outil en ligne aux fonctionnalités identiques à celles reprises au sein de la note d’information du département de la Justice. De façon brossée, il s’agit de passer en revue les données entrées par les médecins et proposer un plan de traitement. Résultat : des dizaines de milliers de prescriptions supplémentaires d’analgésiques qui n’étaient peut-être pas nécessaires…
D’après ce que rapporte le DoJ, Practice Fusion a eu des ententes similaires avec d’autres sociétés de la sphère pharmaceutique. Entre 2013 et 2017, l’éditeur est entré en partenariat avec 14 sociétés pharmaceutiques pour atteindre des objectifs similaires à celui qui lui vaut des sanctions. Voilà qui, à l’échelle globale, pose le problème de l’ingérence des lobbies dans les logiciels. Après la mention du terme lobby, celle du mot business ne met généralement pas long pour suivre. Dans le cas d’espèce, il s’est agi de se faire de l’argent quitte à sacrifier des vies humaines. Si l’on n’a pas trop évoqué le cas de la société pharmaceutique, il faut dire que le dossier est à l’étude. Les deux entreprises collaborent désormais avec les autorités pour continuer à apporter de la lumière sur ces stratagèmes et des sanctions la concernant devraient tomber.
Source : DoJ
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