« Je ne pense pas que ce que Virgil a fait donne à la RPDC [République populaire démocratique de Corée] une quelconque aide réelle pour faire quelque chose de mal », a tweeté Buterin dimanche. « Il a fait une présentation basée sur des informations publiquement disponibles sur les logiciels open source ». Un argument qui a été contesté en réponse à son tweet par un internaute expliquant que « ce n'est pas parce que ces informations étaient disponibles publiquement dans les logiciels open source que les Nord-Coréens possèdent les compétences techniques nécessaires pour lire le code et en comprendre le fonctionnement. Même les programmeurs expérimentés ont des problèmes avec cela (d'où le besoin de documentation) ».
Les procureurs fédéraux affirment que Griffith, un citoyen américain résidant à Singapour, savait pertinemment que son voyage avait violé les lois américaines en matière de sanctions. Ils rappellent que Griffith a demandé l'approbation de son voyage au département d'État américain et que sa demande avait été refusée. Griffith a quand même fait le voyage, traversant la Chine pour contourner les restrictions imposées aux États-Unis.
Le procureur général adjoint, John Demers a noté que : « Malgré les avertissements, Griffith se serait rendu chez l’un des principaux adversaires des États-Unis, la Corée du Nord, où il aurait enseigné à son auditoire comment utiliser la technologie blockchain pour échapper aux sanctions. Par cette plainte, nous entamons le processus de recherche de la justice pour une telle conduite ».
Pour situer le contexte, le 18 mars 2016, le Président des États-Unis a émis le décret 13722 qui interdisait « l'exportation ou la réexportation, directe ou indirecte, des États-Unis ou par un américain, indépendamment de l'endroit où il est situé, de tout bien, service ou technologie à la Corée du Nord » et aussi « toute approbation, financement, facilitation ou garantie fournie par un américain, indépendamment de l'endroit où il est situé, d'une transaction amorcée par une personne étrangère qui pourrait être interdite par cette section si elle était effectuée par un américain ou sur le sol américain ».
Dans l'acte d'accusation, l'agent du FBI Brandon Cavanaugh a écrit que Griffith « a expliqué comment la RPDC pourrait utiliser la technologie blockchain et les cryptomonnaies pouvaient être utilisés pour blanchir de l'argent et échapper aux sanctions, et comment la RPDC pourrait utiliser ces technologies pour devenir indépendante du système bancaire mondial ».
Virgil Griffith
Griffith fit peu d'efforts pour cacher ses projets de voyage. Il a tweeté une photo de ses documents de voyage et s'est volontairement entretenu avec le FBI après son voyage. Il a même donné la permission aux autorités d'inspecter son téléphone portable.
Selon le gouvernement fédéral, les communications électroniques de Griffith montrent clairement son intention de violer les lois américaines sur les sanctions. Quand une personne lui a demandé par message électronique pourquoi le régime nord-coréen était intéressé par la cryptomonnaie, il a écrit « probablement pour éviter les sanctions... qui sait ? »
Plus tard, il a annoncé à un ami son plan d’aider à envoyer 1 unité de cryptomonnaie (probablement 1 Ether, soit 134 euros) entre la Corée du Nord et la Corée du Sud. Son correspondant a demandé « n'est-ce pas une violation des sanctions ? » Griffith a répondu « oui », selon le gouvernement américain.
L'expert sera poursuivi pour complot au profit de la Corée du Nord. Il risque jusqu’à 20 ans de prison. Il faut rappeler que la Corée du Nord a déjà fait part de sa volonté de développer sa propre cryptomonnaie pour contourner les sanctions internationales portées à son égard. Buterin a déclaré qu’il signait une pétition suite à un appel du développeur italien Enrico Talin, qui lui-même l’exhortait à lancer un document pour recueillir des signatures et obtenir la libération de Griffith.
Virgil Griffith a été présenté lundi devant un juge, ce dernier devant établir la solidité des allégations du Ministère Public. À l’issue de l’audience de l’après-midi, Brian Klein de Baker Marquart, conseil de Griffith a communiqué des nouvelles plutôt rassurantes : en dépit du fait que le juge a statué que le ministère de la Justice des États-Unis disposait de suffisamment de preuves pour poursuivre Virgil Griffith pour « complot », une libération prochaine est envisageable :
« Nous sommes très heureux que le juge ait conclu aujourd’hui que Virgil devrait être libéré de prison en attendant son procès. Nous contestons les allégations non vérifiées de la plainte criminelle. Virgil attend avec impatience le jour ou, devant le tribunal, il pourra exposer toute l’histoire. »
Virgil Griffith est connu entre autres pour son implication en 2003 dans un procès avec l'éditeur américain de logiciel Blackboard, dont il menaçait d'exposer publiquement les lacunes de son système. Le 14 aout 2007 il a lancé un logiciel utilitaire, WikiScanner (qui disparaîtra en 2011). Cet outil permettait de retracer les modifications d’articles Wikipédia à partir de comptes non enregistrés jusqu’à leur adresse IP d’origine et d’identifier les sociétés ou organisations auxquelles ils appartenaient. Selon la BBC, WikiScanner a permis de révéler que certaines des modifications apportées à Wikipédia proviennent d’ordinateurs appartenant au Democratic Congressional Campaign Committee, à la CIA, au Vatican entre autres.
En 2008, Griffith a conçu avec Aaron Swartz (informaticien, écrivain, militant politique et hacktiviste américain qui mettra fin à ses jours le 11 janvier 2013 à l’âge de 26 ans) le proxy Tor2web.
Depuis 2014, il s’engage plus activement dans la cryptomonnaies.
Source : Vitalik Butterin, acte d'accusation, Enrico Talin , fondateur Ethereum
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