L’actualité sur un potentiel démantèlement des grandes entreprises technologiques dure depuis trop longtemps maintenant. Des groupes favorables à ce possible démantèlement se forment dans plusieurs coins de la planète et leurs actions se poursuivent à ce jour. La FTC, qui jusque-là n’a fait qu’annoncer enquête sur enquête est peut-être prête à passer à la vitesse supérieure. Ce mardi, le président de la FTC, Joe Simons, a déclaré que démanteler les grandes sociétés technologiques n’est pas aussi facile qu’on le pense, mais cela pourrait être la solution adéquate pour maîtriser ces entreprises et rétablir la concurrence.
Le sujet ne fait que tourner en boucle depuis un bon bout de temps déjà. Les grandes entreprises technologiques qui siègent aux États-Unis sont menacées par un potentiel morcellement. Ce qui a commencé par de simples critiques négatives envers la Big Tech s’est vite transformé en une grande guerre entre ces entreprises, certaines autorités politiques du pays et de nombreux groupes de pression. Ces entreprises sont accusées d’asseoir une position dominante sur Internet, d'étouffer la concurrence en avalant les petites entreprises avant leur croissance et ainsi de limiter l’innovation dans le secteur technologique.
Le lutte en faveur du démantèlement des géants de la technologie a encore pris du poids lorsque la sénatrice démocrate Elizabeth Warren et candidate à l’élection présidentielle américaine de 2020 a choisi de faire de la fragmentation de ces entreprises une réalité si elle était élue présidente du pays. Elle l’a fait savoir en mars de cette année lors d’un discours à Long Island City. « Ces entreprises ont utilisé leurs ressources et la domination d'Internet pour écraser les petites entreprises et l'innovation, et substituer leurs propres intérêts financiers à ceux du peuple américain », avait-elle déclaré.
La sénatrice Elizabeth Warren n’est pas la seule à se montrer aussi impactée par la position dominante de la Big Tech. Cette inquiétude est également partagée par Tim Berners-Lee. Ce dernier s’est dit déçu de l'état actuel de l'Internet, à la suite des scandales sur l'utilisation abusive de données personnelles et l'utilisation des médias sociaux pour diffuser la haine. Il a estimé que les géants de la technologie de la Silicon Valley tels que Facebook et Google sont devenus tellement dominants qu’ils ont peut-être besoin d’être démantelés, à moins que des challengers ou des changements de goût ne réduisent leur influence.
« Ce qui se produit naturellement, c’est que vous vous retrouvez avec une société qui domine le secteur. À travers l’histoire, il n’y a pas eu d’autre solution que de véritablement intervenir et casser des choses. Il y a un danger dans cette concentration », avait-il déclaré lors d’un entretien avec Reuters. Le mois dernier, le ministère américain de la Justice a décidé d’ouvrir une vaste enquête sur la Big Tech afin de déterminer si ces grandes entreprises du numérique se livrent effectivement à des pratiques anticoncurrentielles.
En mars 2018, la Commission européenne avait déjà brandi la menace d’un démantèlement contre Google après qu'il a été condamné à une amende de 2,42 milliards d’euros pour abus de position dominante sur le marché des moteurs de recherche avec son comparateur de prix. Et plus encore, les actionnaires ont demandé le démantèlement d'Alphabet, la société mère de Google, en évoquant des préoccupations relatives aux violations des droits de l'Homme.
À côté, l’on pourrait dire que Facebook est plus dans le tourment que les autres entreprises de la Silicon Valley. À l’instar de la sénatrice démocrate Elizabeth Warren et de Tim Berners-Lee, les groupes de pression qui encouragent le démantèlement de la société se sont multipliés depuis l’année dernière. Chris Hughes qui a cofondé la société avec Mark Zuckerberg a multiplié depuis le début de l’année ses assises et ses rencontres pour justifier auprès de nombreux groupes de personnes, y compris certaines autorités US, pourquoi, selon lui, la société devrait être démantelée.
Au cours des différentes réunions qu’il a tenues, Chris Hughes et ses interlocuteurs auraient discuté d’un potentiel dossier antitrust mettant en accusation le géant les médias sociaux, qui compte aujourd’hui plus de 2,7 milliards d’utilisateurs actifs par mois. Pour Hughes, le constat est simple : « Facebook et Mark Zuckerberg tuent la concurrence ». Selon lui, le gouvernement doit demander des comptes à Mark. Il estime que pendant trop longtemps, les législateurs se sont émerveillés de la croissance explosive de Facebook et ont négligé leur responsabilité de veiller à la protection des Américains et à la compétitivité des marchés.
Les autres sociétés (Apple, Microsoft , Amazon) constituant la Big Tech sont toutes aussi dans le tourment qu'Alphabet, Facebook et Google. Elles font l’objet d’enquêtes minutieuses d’antitrust par la Federal Trade Commission (FTC). Parallèlement à cela, l’aversion profonde du président américain Donald Trump pour les entreprises de médias sociaux pourrait le pousser à prendre une ordonnance pour réduire considérablement les privilèges accordés à ce genre d’entreprises par la loi CDA 230 (Communications Decency Act 230). Si le décret est adopté, elle donnerait aux organismes fédéraux le pouvoir de choisir quel type de données seraient acceptables ou non sur Internet.
Longtemps restée sans un avis tranché sur la question du démantèlement des entreprises de la Big Tech, la FTC s’est finalement prononcée ce mardi à travers son président, Joe Simons. Selon ses propos rapportés par le média américain Bloomberg, le président de la Commission fédérale du commerce des États-Unis a déclaré qu'il était prêt à démanteler les grandes plateformes technologiques en annulant leurs fusions antérieures. Cette déclaration du président de la FTC intervient quelques semaines après la grande enquête antitrust lancée par le ministère de la Justice sur ces entreprises.
Le président de la FTC, qui dirige un vaste examen du secteur de la technologie, a déclaré dans une interview mardi que démanteler une entreprise posait problème, mais qu'il pourrait être le bon remède pour maîtriser les entreprises dominantes et rétablir la concurrence. « Si vous devez le faire, vous le faites », a déclaré Simons à propos de la dissolution des sociétés de technologie. « Ce n'est pas idéal parce que c'est très salissant. Mais si tu le dois, tu dois le faire ». Simons supervise un groupe de travail technique chargé d’examiner la conduite dans l’industrie et pourrait procéder à l’annulation des fusions si les enquêteurs trouvaient que les accords étaient anticoncurrentiels.
L'agence a ouvert une vaste enquête sur Facebook, indiquant notamment si l'entreprise avait acquis des startups pour contrecarrer la concurrence, selon des personnes proches du dossier. En effet, à lui seul, Facebook a acquis plus de 75 petites entreprises au cours des 15 dernières années. À ce titre, deux universitaires spécialistes de lois antitrust, collaborateurs de longue date et travaillant avec Chris Hughes, ont développé un argument en faveur de la fragmentation de Facebook qu’ils ont présenté aux membres du gouvernement et aux entités de régulation des marchés du pays, comme la FTC.
« Les achats d’Instagram et de WhatsApp représentaient une violation flagrante du Sherman Act, la plus vieille loi antitrust du pays », a déclaré l’un des universitaires dans une interview. Selon Simons, les autorités antitrust américaines pourraient annuler les acquisitions même si elles avaient déjà obtenu l'approbation. La FTC pourrait dire « nous avons commis une erreur », a-t-il déclaré. Une rupture nécessiterait l'approbation du tribunal. Selon certains, les géants de la technologie ont utilisé une vague de rachats de startups pour bloquer la concurrence. Elles l’ont fait en achetant et en éliminant leurs rivaux émergents.
En mai 2019, Facebook, à travers son vice-président des affaires mondiales et des communications, Nick Clegg, avait déclaré qu'il était favorable à la réglementation, mais que casser l'entreprise ne réglerait pas les problèmes de confidentialité et de données des législateurs. Selon Facebook, sa taille lui permet de faire les choses que les régulateurs veulent voir, comme une meilleure surveillance du contenu, ce qui serait beaucoup plus difficile si Instagram ou WhatsApp étaient des sociétés distinctes.
Source : Bloomberg
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Si cela s'avère nécessaire
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Le , par Bill Fassinou
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