Facebook a annoncé diverses mesures prises dans le cadre de sa campagne contre la propagation de ces types d’articles, s’alliant parfois aux médias locaux ou proposant d’autres solutions comme un système indiquant les sources de confiance qui auraient été validées entre autres par les utilisateurs.
Mais des chercheurs de Cambridge ont opté pour une autre approche : les chercheurs ont développé un jeu en ligne, simplement intitulé Bad News, dans lequel les joueurs rivalisent pour devenir « un magnat des fake news et de la désinformation ».
« L'idée est qu'une fois que vous avez vu la tactique, et que vous l'avez utilisée dans le jeu, vous pouvez développer de la résistance », a déclaré Sander van der Linden, directeur du Cambridge Social-Making-Making Lab. « Nous voulons que le public apprenne ce que font ces gens en marchant dans leurs chaussures. »
En faisant ainsi la lumière sur ces pratiques, ils espèrent que le jeu va « vacciner » le public, et rendre les gens immunisés à la propagation des contrevérités. Les joueurs doivent s’attirer des sympathisants Twitter en déformant la vérité, en diffusant des faussetés, en divisant et en détournant l'attention quand ils grondent. Pendant tout ce temps, ils doivent maintenir leur crédibilité aux yeux de leur public.
La charte du jeu dit ceci : « Dans ce jeu, vous prenez le rôle de faux messager. Lâchez toute prétention d'éthique et choisissez le chemin qui construit votre personnage en tant que magnat des médias sans scrupules. Mais gardez un œil sur vos indicateurs "followers" et "credibility". Votre tâche est d'obtenir autant d'adeptes que vous le pouvez tout en construisant lentement une fausse crédibilité en tant que site d’information. Mais attention : vous perdez si vous racontez des mensonges évidents ou si vous décevez vos supporters ! »
Le jeu fonctionne de manière simple et directe : les joueurs voient un court texte ou une image (comme un mème ou un titre d'article) et peuvent y réagir de différentes façons. Comme expliqué dans la charte, il y a deux façons dont le score est mesuré : « followers » et « credibility ». Choisir une option en accord avec ce qu’un « vrai » producteur de désinformation choisirait permet au joueur d’obtenir plus d'adeptes (followers) et de gagner en crédibilité. Si, cependant, le joueur ment de manière trop flagrante à ses partisans, choisir une option qui est ouvertement ridicule ou qui est trop en ligne avec les meilleures pratiques journalistiques fait perdre des partisans ou diminue la crédibilité. Le but du jeu est donc de rassembler autant d'adeptes que possible sans perdre trop de crédibilité.
Étant donné qu’il est impossible de couvrir en détail tous les aspects de la désinformation, les éditeurs du jeu ont opté pour la couverture de six aspects des plus récurrents dans cet art. Il est donc question pour les joueurs de collecter un badge dans chacun de ces aspects : imitation, émotion, polarisation, conspiration, discrédit et trolling.
Imitation
Il est très facile de démarrer un site web et de publier du contenu qui semble entièrement légitime. Le but de ce badge est de montrer à quel point ce processus est facile et comment une apparence professionnelle ou un nom populaire n'implique pas nécessairement la légitimité. Dans le jeu, « imitation » (impersonation) fait référence à deux choses :
- usurper l'identité d'une personne ou d'une organisation réelle en imitant leur apparence, par exemple en utilisant un nom d'utilisateur légèrement différent ;
- se présenter comme un site d'actualités ou un blog légitime sans les références journalistiques habituelles et des lignes directrices.
Les joueurs publient d'abord un tweet sur quelque chose qui les frustre. Ce qui leur permet d’obtenir leurs premiers adeptes et le jeu explique par la suite comment fonctionnent le compteur de followers et celui de la crédibilité. Les joueurs incarnent alors soit le compte officiel de Donald Trump (qui déclare la guerre à la Corée du Nord), l'US Geological Survey Earthquake Alerts (qui avertit d'un séisme de magnitude 9,3 près de Londres), ou Nickelodeon (qui annonce l'annulation imminente de Bob l’éponge). Les joueurs reçoivent par la suite les tweets de réaction des utilisateurs qui sont tombés dans le panneau. Le jeu invite ensuite les joueurs à passer à un autre niveau en créant leur propre site d’actualité. Ils choisissent un nom de site, un titre et un slogan.
Émotion
Le contenu émotionnel est un contenu qui n'est pas nécessairement « faux » ou « réel », mais joue délibérément sur les émotions de base des gens telles que la peur, la colère ou l’empathie. Le but de ce badge est de montrer comment les joueurs peuvent faire usage de ces émotions dans leur contenu. C’est ici que les joueurs vont produire du contenu pour la première fois.
Polarisation
Pour les auteurs, ce mot implique des tentatives délibérées pour élargir l'écart entre la gauche politique et la droite politique. Afin de gagner des adeptes, les jeunes sites d'information s’appuient souvent sur la polarisation comme un moyen d'implanter une niche dans le paysage médiatique. Ce badge couvre également le concept de « fausse amplification », l'idée selon laquelle vous n'avez pas à monter une histoire complètement factice afin de faire passer un message. Au lieu de cela, vous pouvez amplifier les griefs existants et les faire paraître plus importants ou populaires qu'ils ne le sont en réalité.
Conspiration
Les théories du complot font partie intégrante de la frange des sites d’actualité en ligne. Les conspirations peuvent être définies comme la croyance que les événements inexpliqués sont orchestrés par un groupe ou une organisation secrète.
Ici, les joueurs sont d'abord encouragés à trouver une nouvelle théorie intéressante
et à la publier sur leur site d'actualités. Ils sont invités à chercher la conspiration la plus crédible à vendre à leurs followers.
Les joueurs marquent des points dès lors qu’ils arrivent à semer un doute sur un communiqué officiel ou lancent des débats qui emmènent les lecteurs dans le sens de la pensée conspiratrice.
Discrédit
Discréditer vos adversaires est une partie importante de la désinformation. Quand les sites qui s’adonnent à la désinformation d’actualité sont accusés de mauvais journalisme, ils ont tendance à détourner l'attention de l’accusation en attaquant la source de la critique ou en niant que le problème existe.
Rendus à ce niveau, les joueurs sont confrontés à un fact-checker qui démystifie la théorie du complot évoqué par le joueur à l’étape précédente. Le joueur a trois options : s'excuser, ne rien faire ou se venger. La première option lui coûte des points, et il lui est expliqué que s'excuser n'est jamais une bonne idée. « Ne rien faire » incite l’un de ses abonnés à son site d’information à lui demander pourquoi il ne répond pas au fact-checker. Le joueur est alors amené à choisir entre réfuter les allégations ou attaquer le fact-checker.
Trolling
Ici, les joueurs vont appliquer toutes les techniques qu'ils ont apprises dans les cinq autres niveaux.
Les auteurs assurent que, pour terminer une partie, il faut approximativement 20 minutes. « Il est adapté pour une utilisation en classe, par exemple lors de la formation aux médias. Dans nos ateliers, nous y jouons d'abord et ensuite nous discutons des techniques que les étudiants ont acquises. Nous recommandons de diviser les élèves par paires et de les faire jouer ensemble, tout en pensant activement à ce qu'ils font. Dans notre expérience, le jeu
donne aux joueurs un aperçu décent (quoique quelque peu limité) des divers principes de la désinformation et montre à quel point il est facile de manipuler l'information », affirment les auteurs.
découvrir Bad News
Source : info sur Bad News en PJ
Et vous ?
Que pensez-vous de cette approche ? Vous semble-t-elle plus bénéfique que celles adoptées jusqu'à présent par Facebook ou Google ?