Sans surprise, la FCC, l’organisme américain chargé de réguler les télécommunications, a voté en faveur d’une nouvelle politique mettant fin à la neutralité du net. Mais qu’en est-il pour l’Europe ?
Sébastien Soriano, le patron de l’Arcep (l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes), chargé de l’application de la neutralité du Net en France, a déclaré que la décision des autorités américaines de mettre fin à la neutralité du Net « n’aura pas d’impact direct en Europe »
Des propos qui ont trouvé un écho dans une déclaration de Mounir Mahjoubi, secrétaire d’État auprès du premier ministre chargé du Numérique : « La France continuera à promouvoir le principe de neutralité du net, en Europe et dans le monde. »
Un principe qui est en effet garanti par le droit européen depuis le printemps 2016 et qui a notamment deux axes principaux : les fournisseurs d’accès à Internet (FAI) ne peuvent pas discriminer les contenus transmis sur le réseau et les internautes peuvent y consulter et y diffuser librement des contenus.
Bien entendu, les FAI sont exceptionnellement autorisés à bloquer des contenus pour parer une attaque informatique, résoudre un encombrement exceptionnel de leurs réseaux, comme lors de la rupture d’un câble sous-marin, ou bien si la justice leur en donne l’ordre. Les FAI peuvent proposer des services plus performants que leur offre de base, tant que celle-ci ne soit pas dégradée.
« La neutralité du Net a permis de mettre un terme définitif à toutes les pratiques de blocage et de bridage techniques. Les opérateurs qui empêchaient d’utiliser Skype ou le pair à pair, qui bloquaient la fonction modem des téléphones… Tout ça a été balayé par les règles européennes », se réjouit Sébastien Soriano, qui est aussi à la tête du groupement des autorités de régulation des télécoms européennes, chargé de faire respecter la neutralité des réseaux dans l’Union européenne.
Yannick Harrel, expert auprès de l'Union Internationale des Télécommunications (UIT) a estimé que cette disparition de la neutralité du net aura de nombreuses répercussions sur les entreprises, mais également pour les consommateurs : « Ce qui se profile, c'est une lutte entre les fournisseurs d'accès et les producteurs et diffuseurs de contenu. In fine, il y a tout lieu de penser que c'est surtout le consommateur qui va payer la note parce, que c'est sur lui qu'est toujours reporté le coût du changement. »
Même son de cloche pour Cécile Untermaier, députée nouvelle gauche et présidente du groupe de travail «Démocratie numérique et nouvelles formes de participation citoyenne» : «Cette décision va probablement créer un internet à deux vitesses, où les grandes entreprises, déjà bien installées, pourraient payer cher pour devenir prioritaires, tandis que les nouveaux venus n'auraient plus les moyens de se faire une place. C'est pourquoi internet doit rester un bien commun, un service public, ouvert et accessible à tous.».
D'autant plus que «la suppression de la neutralité du Net permettra aux FAI de privilégier la vitesse de connexion de certains clients, qui paieraient plus cher leur abonnement. Le consommateur risquerait de voir son accès internet ralenti ou perturbé. En conséquence, les sociétés qui ne paient pas pour obtenir un traitement favorisé se retrouveront sur les parties les moins rapides du réseau.»
« Cette situation se traduirait soit par une dégradation du service pour les usagers, soit par l'augmentation des prix de certains services en ligne pour faire face à ces nouvelles dépenses », regrette la députée.
Un avis qui n'est pas forcément partagé par les opérateurs. Rappelons que Stéphane Richard, PDG d’Orange, c'était érigé contre le principe de la neutralité du net et avait déclaré :
« C’est une obligation, mais en même temps ce débat est pollué par des considérations politiques. Parce que lorsqu’on dit “neutralité du net” on voit tout de suite la main des opérateurs qui viendraient fouiller des contenus et faire un tri entre les contenus. Ce n’est pas du tout ça le sujet.
« Le sujet c’est qu’effectivement, dans les usages futurs de l’Internet, il y en a certains comme l’Internet des objets, par exemple avec la voiture autonome, qui vont nécessiter un Internet particulier en termes de latence, en termes de vitesse.
« Il faudra alors que nous soyons capables de proposer à l’industrie un Internet avec des fonctionnalités et des puissances différentes, donc un Internet avec des qualités de service différentes. Pour y parvenir, il faut qu’on nous laisse le faire. »
Source : Le Monde, SN
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La décision américaine pourrait-elle avoir, selon vous, des répercussions (directes ou indirectes) en Europe ?
Neutralité du net : la décision des autorités américaines « n'aura pas d'impact direct en Europe »
Assure le patron de l'Arcep
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Assure le patron de l'Arcep
Le , par Stéphane le calme
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