Dans une tribune accordée à The Gardian, Tim Berners-Lee, l’inventeur du Web livre ses inquiétudes quant à l'avenir de la toile. L’informaticien britannique pointe du doigt les nombreuses failles qui rendent le Web moins sûr et exposent ses utilisateurs. Selon lui, le recul des protections de la neutralité du Net, la prolifération de « Fake News », la propagande et la polarisation croissante du Web sont autant de maux qui menacent l’avenir d’un Web sûr. Il se préoccupe notamment de la manière dont les systèmes publicitaires de grandes plateformes ont été conçus pour attirer l'attention des internautes à tout prix.
« Le système est en train d'échouer. La manière dont les revenus publicitaires fonctionnent, avec les Clickbait, n’est pas conforme à l’objectif d'aider l'humanité à promouvoir la vérité et la démocratie. Je suis donc préoccupé », affirme Tim Berners-Lee. Selon lui, quelques entreprises puissantes sont aujourd’hui en train de s’approprier le Web. En effet, il déclare que « ce n'est pas de la démocratie » que de mettre tout entre les mains d’entreprises qui sont « les plus manipulatrices ».
Tim Berners-Lee souhaite qu’il s’opère un changement de mentalité dans la conscience collective pour que les habitudes puissent changer de manière positive. Il déclare que « nous sommes tellement habitués à ce que ces systèmes soient manipulés que les gens pensent que c'est comme cela qu'Internet fonctionne ». Pour lui, ce sont les internautes ensemble qui doivent « réfléchir à ce à quoi le Web devrait ressembler ». Les réseaux sociaux sont à l’origine de plusieurs polémiques ces derniers mois notamment à cause de campagnes publicitaires qui ont visé à influencer des électeurs. Cependant, l’inventeur du Web pense que s’il est vrai que cela pose de nombreux problèmes, ces derniers ayant été créés par des humains « peuvent et doivent être résolus » pour que le Web reste fidèle à son objectif premier.
Tim Berners-Lee se dit cependant encore optimiste même s’il reconnaît que son optimisme a pris un sérieux coup à cause de différents événements survenus çà et là ces dernières années. Il pense que le Web doit rester une « plateforme ouverte permettant à quiconque de partager des informations, d'accéder à des opportunités et de collaborer au-delà des frontières géographiques ». « Je suis toujours un optimiste, mais un optimiste debout au sommet de la colline avec une violente tempête qui me souffle au visage, accroché à une clôture », déclare-t-il de façon imagée. Pour que la toile reste ce que ses initiateurs ont voulu qu’elle soit, « nous devons serrer les dents et nous accrocher à la clôture et ne pas tenir pour acquis que le Web nous mènera à des choses merveilleuses ».
L’intelligence artificielle, notamment l’utilisation qu’en font certaines entreprises sans se préoccuper des règles éthiques qui devraient primer, est aussi critiquée par l’informaticien britannique. Des entreprises d'analyse de données telles que Cambridge Analytica, qui construit des profils de personnalité de millions d'individus afin de pouvoir les manipuler grâce à un « microciblage comportemental », ont également été critiquées et taxées d’avoir créé une « propagande armée d'IA ».
La neutralité du Net, que certains ont qualifiée de « première modification d'Internet », est l'idée que les fournisseurs d'accès Internet (FAI) doivent traiter toutes les données de la même manière que ce soit un simple courriel, une vidéo de Netflix ou encore un virement bancaire. Cette neutralité devait garantir que les grands fournisseurs de services Internet par câble notamment ne puissent pas choisir quelles données sont envoyées en priorité et quels sites sont bloqués ou restreints selon des intérêts financiers ou partisans.
En février 2015, la Federal Communications Commission (FCC) des États-Unis a voté en faveur d'une réglementation plus stricte des FAI en tant que services publics et a intégré dans la loi les principes de la neutralité du Net. Cependant, la nouvelle administration américaine n’entend pas les choses de la même manière que sa prédecesseure et considère que ces règles ont été établies sur « des préjudices hypothétiques et des prophéties hystériques de malheur ». Berners-Lee, exhorte à ce propos les législateurs à reconsidérer un retour en arrière.
Certains agissements des acteurs du Web sont en totale contradiction avec les principes de neutralité du net. C’est le cas par exemple, de AT & T qui a bloqué Skype et d'autres services similaires sur l'iPhone afin de gagner plus d'argent grâce aux appels téléphoniques traditionnels. C’est aussi le cas de Verizon qui a bloqué Google Wallet sur certains smartphones lorsqu'il développait un service de paiement mobile concurrent. Selon Berners-Lee, le Net doit rester un « espace sans restriction » pour la créativité, l'innovation et la liberté d'expression. « Quand j'ai inventé le Web, je n'ai pas eu à demander à Vint Cerf la permission d'utiliser Internet » déclare-t-il à ce propos.
Source : The Guardian
Et vous ?
Qu'en pensez-vous ?
Voir aussi
« Les données des internautes sont leur propriété, non celle des annonceurs » Tim Berners-Lee s’insurge contre la publicité ciblée
L'inventeur du Web, Tim Berners-Lee livre ses inquiétudes quant à l'avenir de la toile
Et pointe du doigt le recul de la neutralité du Net
L'inventeur du Web, Tim Berners-Lee livre ses inquiétudes quant à l'avenir de la toile
Et pointe du doigt le recul de la neutralité du Net
Le , par Victor Vincent
Une erreur dans cette actualité ? Signalez-nous-la !