
Quand il s'agit de terroristes dans le « cyberespace », l'Australie souhaite qu’il y ait une répression.
Pour le procureur général australien, George Brandis, les entreprises de technologie doivent jouer un rôle dans la lutte contre les communications terroristes, ce qui pourrait se manifester par un affaiblissement du chiffrement.
« L'utilisation par les terroristes du cyberespace est une préoccupation majeure pour les services de renseignement et d'application de la loi », a déclaré Brandis dans un communiqué avant la conférence. « L'Australie mènera la discussion sur les moyens d'aborder cette question, en particulier l'implication de l'industrie dans la lutte contre le chiffrement des messages terroristes. »
Le procureur général Brandis a déclaré que l'Australie voulait coopérer avec les fournisseurs de services pour « assurer une assistance raisonnable fournie aux organismes chargés de l'application de la loi et de la sécurité » lorsqu'il s'agit de dépasser les méthodes de chiffrement utilisées par des terroristes soupçonnés.
Une approche qui rappelle une rhétorique similaire du FBI, qui a vu Apple s’opposer l'année dernière à ses tentatives de contournement de sécurité pour accéder aux données de l’iPhone verrouillé d’un terroriste dans un attentat qui a eu lieu à San Bernardino. Une situation qui vient juste illustrer le fait que les questions de la vie privée face à la sécurité nationale suscitent de nombreux débats dans la sphère politique du monde entier.
Le Premier ministre australien, Malcolm Turnbull, a fait écho au procureur général en demandant une répression sur les « espaces non gouvernementaux » en ligne, ne manquant pas de pointer du doigt les entreprises technologiques américaines.
« Nous ne pouvons pas continuer à permettre aux terroristes et aux extrémistes d'utiliser Internet et les grandes plateformes de médias sociaux et de messagerie – dont la plupart sont hébergés aux États-Unis, je dois dire – pour répandre leur poison », a déclaré le Premier ministre.
« La règle de droit doit prévaloir partout en ligne, comme c'est le cas aujourd'hui dans le monde analogique et hors ligne. »
L’allocution du Premier ministre Turnbull fait suite à un discours similaire tenu par la Première ministre britannique, Theresa May, qui a demandé aux entreprises technologiques d'élaborer de meilleures mesures pour éliminer le contenu extrémiste des plateformes en ligne et l'ancien US National Director of Intelligence, James Clapper, qui a exhorté les entreprises technologiques à permettre aux forces de l’ordre « d'accéder au chiffrement ».
Mais cet avis est-il partagé par la population ?
Greg Austin, professeur au Centre australien pour la sécurité informatique, a critiqué les démarches du gouvernement Turnbull qui espère pouvoir créer des lois visant à contraindre les entreprises de médias sociaux à accorder l'accès aux messages des terroristes.
Selon lui, le gouvernement semble plutôt élaborer des lois visant les discours haineux et non le terrorisme en lui-même : « Je suis en faveur du fait que les agences de renseignement aient des pouvoirs de surveillance qui leur permettent d’avoir accès aux communications des terroristes, mais les récentes campagnes sur Facebook, Twitter ainsi que des plateformes similaires ont trait au discours haineux », a-t-il déclaré.
« Quatre-vingt-quinze pour cent des personnes impliquées dans le discours haineux ne sont pas impliquées dans le terrorisme », a-t-il continué. Aussi, pour lui, « Il est important de noter que le gouvernement n’a montré aucun lien entre le discours haineux et le terrorisme. »
Le professeur Austin a déclaré que le gouvernement australien semblait imiter le gouvernement britannique. Il a rappelé que la Première ministre britannique, Theresa May, avait répondu à la dernière grande attaque terroriste en donnant plus de pouvoirs aux autorités pour permettre une plus grande surveillance.
Ironiquement, il a exprimé un doute quant au fait que les terroristes se lancent dans des échanges qui pourraient être repérés par une campagne de surveillance de discours haineux : « Je ne dispose pas de l’expertise technique, mais il existe de nombreuses manières dont les terroristes communiquent sans être suivis et cette volonté sans fin d’avoir de plus en plus accès à une source chiffrée n'est pas entièrement justifiée. Je crois que les citoyens ont le droit au chiffrement », a-t-il déclaré.
Source : TP, The Australian