
« Ne laissez pas les mythes vous tromper : le plan du W3C pour le DRM dans HTML5 est une trahison pour tous les utilisateurs du Web », tel était le titre du billet de blog de Kẏra, datant de 2013. Elle explique en effet que le Web Consortium s’est basé sur trois mythes pour défendre la nécessité d’intégrer le DRM dans HTML5.
Le premier mythe serait la croyance selon laquelle « le DRM ne fonctionne pas, qu’il existe pour protéger les créateurs, mais comme il peut être facilement contourné, il est complètement inefficace et impertinent ». D’après Kẏra, c’est complètement faux, parce que le DRM ne vise pas à protéger les droits d'auteur, mais plutôt à limiter les fonctionnalités des œuvres et commercialiser des fonctionnalités sous forme de services. « La perception publique selon laquelle le DRM existe pour empêcher la copie non autorisée est une erreur grave qui dissimule la fonction réelle du DRM, qui a un succès majeur : éviter les utilisations légales de la technologie afin que les entreprises de médias puissent facturer à plusieurs reprises pour des services qui fournissent des fonctionnalités qui ne devraient jamais être supprimées pour commencer. »
L’un des arguments avancés pour défendre l’intégration du DRM dans HTML5 est que cela constitue « un compromis nécessaire pour finalement mettre fin à la prolifération de plugins de navigateurs propriétaires comme Adobe Flash Player et Microsoft Silverlight ». D’après Kẏra, c’est également une fausse idée. Elle estime en effet que le DRM dans HTML5 n’entrainera pas la fin de ces plugins propriétaires, mais les encourage. La spécification Encrypted Media Extensions pourrait en effet offrir à ces plugins propriétaires « un nouvel espace en tant que module de déchiffrement de contenu (CDM) ». À propos, l’Electronic Frontier Foundation avait dénoncé le fait que « la proposition EME abdique explicitement la responsabilité sur les problèmes de compatibilité et permet aux sites Web de disposer d'un logiciel tiers exclusif ou même d'un matériel spécial et de systèmes d'exploitation particuliers (tous désignés sous le nom générique « modules de déchiffrement du contenu », et aucun d'entre eux n'est spécifié par la proposition EME). »
Notons déjà que certains contenus protégés par DRM peuvent être lus en utilisant les plugins Microsoft Silverlight et Adobe Flash. Autrement dit, Kẏra sous-entend que la spécification EME pourra intégrer de nouvelles implémentations de ces plugins sur le Web. « Les extensions pour médias chiffrés prévoient de prendre ce qui rend ces technologies particulières terribles pour les utilisateurs (gestion des restrictions numériques, support multiplateforme médiocre, etc.) et l'injecter directement dans le tissu du Web », dit-elle. « Ceci équivaut à inviter Microsoft Silverlight, Adobe Flash Player et autres technologies similaires à faire partie de la norme HTML5. »
Le dernier mythe serait le fait que le Web a besoin du DRM dans HTML5 afin que Hollywood et d'autres géants des médias puissent finalement commencer à donner la priorité au Web, plutôt qu’aux voies traditionnelles, pour la distribution de médias. Ici, elle rappelle que ce sont les grands médias qui dépendent du Web et non l'inverse, et les grandes entreprises médiatiques savent qu'elles doivent s'adapter pour survivre.
En somme, pour Kẏra comme pour nombreux observateurs, le DRM n’a pas sa place dans HTML5, surtout que cela va à l’encontre de la mission du W3C. Celle-ci consiste en effet à rendre les avantages du Web « disponibles à tous, quels que soient leur matériel, leur logiciel, leur infrastructure réseau, leur langue maternelle, leur culture, leur situation géographique ou leur capacité physique ou mentale », comme indiqué sur le site officiel de l’organisme de normalisation. Kẏra conclut donc que la proposition pour les extensions de médias chiffrés n’est pas un compromis pour l'avancement du Web, mais plutôt « une concession complète des principes du W3C. »
Source : Kẏra
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