
Mais qu’en est-il de l’interprétation de ce texte dans le contexte du numérique ?
Au début de ce mois, une décision de la Cour d'appel de la Floride a infirmé une décision du tribunal de première instance qui a estimé qu’un suspect, qui avait été accusé d’avoir pris des photos inappropriées d’une femme, n'avait pas à remettre le code d'accès à son téléphone. Le tribunal de première instance avait déclaré que cela équivaudrait à faire témoigner le suspect contre lui-même, et donc à bafouer le cinquième amendement.
Suite à cette décision de la Cour d’appel, la police n’a donc pas été en mesure d'accéder au contenu du téléphone du suspect et donc de confirmer l’existence des photos compromettantes.
Cette décision qui estime que le cinquième amendement ne protège pas le suspect s'écarte de décisions antérieures dans des cas semblables, notamment en Pennsylvanie et au Colorado où les tribunaux avaient conclu qu’un mot de passe est quelque chose que la personne sait et qui serait donc considéré comme une auto-incrimination s’il était transmis aux forces de l’ordre.
Le juge Anthony Black, qui a rendu la décision du groupe de trois juges du deuxième district de la Cour d'appel de la Floride, a déclaré : « le fait de fournir le code ne “trahit aucune connaissance [que le défendeur] pourrait avoir sur les circonstances des infractions” pour lesquels l'accusé est inculpé. Aussi, le fait “d’obliger un suspect à faire une déclaration non factuelle qui facilite la production d'éléments de preuve” pour lesquels l'État a pu obtenir un mandat indépendamment des déclarations de l'accusé et qui lient l'accusé au crime n'enfreint pas le privilège ».
En première instance, le juge s’est appuyé sur une décision de 1998 rédigée par le juge de la Cour suprême des États-Unis, John Paul Stevens : dans une affaire X contre États-Unis, Stevens a conclu qu’un accusé peut être « forcé de remettre la clé d’un coffre contenant des documents incriminants » mais ne saurait « être obligé de révéler la combinaison de son coffre-fort ». Aussi, pour lui, le mot de passe devait lui aussi être protégé.
La Cour d’appel pour sa part a pensé autrement : « nous nous demandons si l'identification de la clé qui ouvrira le coffre fort - telle que la clé qui est remise - est, en fait, distincte de dire à un officier la combinaison », a déclaré le juge Black avant de décider « qu’il s'agit d'un cas de reddition et non de témoignage », en raison du fait que l'État savait déjà qu'il pourrait trouver des preuves sur le téléphone par d'autres moyens et a obtenu un mandat basé sur ces connaissances..
Par ailleurs, notons que le combat ne se limite pas qu’aux individus puisque les entreprises sont également sollicitées pour déverrouiller les appareils lors d’enquêtes des forces de l’ordre, comme l’a révélé le bras de fer entre Apple et le FBI autour du déverrouillage d’un iPhone 5C.
L’ACLU (l'American Civil Liberties Union) a fait savoir sur son blog qu’il ne s’agit pas là d’un cas isolé : le défenseur des droits numériques a répertorié 63 cas confirmés et 13 autres cas « dans lesquels le gouvernement a demandé une injonction en vertu de la loi All Writs pour contraindre Apple ou Google à fournir une assistance pour accéder aux données stockées sur un appareil mobile »..
« Le FBI veut que vous pensiez qu'il n'utilisera la loi All Writs Act que dans des cas extraordinaires pour obliger les entreprises de technologie à l’aider au déverrouillage des téléphones. Il s’avère que ces ordres sont devenus tout à fait ordinaires », a déclaré l'ACLU..
Source : Court House News, ACLU
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